Le cinéaste français nonagénaire Alain Resnais a dévoilé lundi au 64ème Festival international du film de Berlin 2014 Aimer, boire et chanter, une fantaisie entre théâtre, cinéma et bande dessinée avec six comédiens tout à la joie de leur texte.
(CLIQUEZ ICI OU SUR LES IMAGES POUR VOIR LE RESTE DES PHOTOS) © Isabelle Vautier pour Commeaucinema.com
" J'ai essayé de réaliser ce que Raymond Queneau appelait dans 'La Saint-Glinglin', 'la brouchecoutaille', une sorte de ratatouille, en cassant les barrières entre cinéma et théâtre pour gagner en liberté ", explique dans les notes d'intention du film Alain Resnais, 91 ans, qui n'a pu se rendre à Berlin.
Aimer, boire et chanter est tiré de la pièce "Life of Riley" du dramaturge britannique Alan Ayckboum avec lequel Resnais a déjà oeuvré notamment pour Smoking/No Smoking, Ours d'argent à Berlin en 1993.
À l'instar de la pièce de Samuel Beckett "En attendant Godot", les personnages du film parlent beaucoup d'un autre, George Riley, sans que jamais il n'apparaisse.
Dans la campagne du Yorkshire, trois couples. L'annonce de la maladie de leur ami George Riley, dont les jours sont comptés, va bouleverser leur vie. Lorsque le médecin Colin (Hippolyte Girardot) apprend par mégarde la situation à sa femme Kathryn (Sabine Azéma), il ignore que Riley a été son premier amour.
Jack, riche homme d'affaires et mari volage (Michel Vuillermoz), a confiance en sa femme Tamara (Caroline Silhol) jusqu'au jour où elle doit jouer au théâtre des scènes d'amour appuyées avec son meilleur ami, Riley, enrôlé dans leur troupe amateur. Jack tente alors de persuader Monica (Sandrine Kiberlain), femme de George qui vit avec le fermier Simeon (André Dussolier), de revenir auprès de son mari pour l'accompagner dans ses derniers mois.
Le tout se déroule devant de grandes toiles peintes façon décors de théâtre pour représenter les domiciles des couples où l'action se déroule alternativement. Pour mieux souligner le théâtre de la vie et de l'amour.
" Je le dis pour tous mes films, ce qui m'intéresse c'est la forme, et s'il n'y a pas de forme, il n'y a pas d'émotion", poursuit l'auteur d'Hiroshima mon amour ou d'On connaît la chanson, dont l'oeuvre éclectique et l'imagination sans bornes ont été saluées dans le monde entier.
Avant chaque changement de lieu, des dessins représentant les maisons des uns et des autres situées en ville ou à la campagne apparaissent à l'écran. Ils sont signés Blutch, un des plus grands auteurs actuels de BD. De même, quand la caméra se concentre sur la confession d'un personnage, le fond devient graphique. Des images de la campagne anglaise et de ses routes sinueuses apportent encore des ponctuations.
La passion de Resnais pour la bande dessinée est connue. Blutch avait réalisé l'affiche de son précédent film, Vous n'avez encore rien vu. D'autres auteurs de BD en ont signé d'autres comme Enki Bilal, tandis que le cinéaste avait consacré au monde des bulles "I want to go home" en 1989.
Dans sa nouvelle comédie, le réalisateur de Vous n'avez encore rien vu en 2012 poursuit également sa déclaration d'amour au texte et à des comédiens qui le savourent.
Et pourtant, les premiers mots prononcés semblent hésitants. Ce ne sont pas les vrais dialogues du film, mais le début des répétitions dans un des couples.
Le film semble se construire en même temps que la troupe amateur progresse dans son travail. Le spectateur peut alors mieux apprécier les méandres et les rebondissements de l'histoire.
(10 Février 2014 - Relax News)