Berlin 2014 : Michel Houellebecq en acteur de comédie pour son enlèvement

Berlin 2014 : Michel Houellebecq en acteur de comédie pour son enlèvement

L'écrivain français Michel Houellebecq se révèle acteur dans L'Enlèvement de Michel Houellebecq, comédie loufoque aux allures de documentaire où il interprète son propre rôle, présentée en avant-première au 64ème Festival international du film de Berlin 2014.

Ce film de Guillaume Nicloux, réalisé pour la chaîne de télévision franco-allemande Arte, prend pour point de départ une rumeur qui évoquait en septembre 2011 la possibilité d'un kidnapping de l'écrivain, prix Goncourt l'année précédente.

" J'avais envie de partir d'un fait divers qui était celui dont la presse s'était emparée par rapport à une absence de Michel à un colloque. On est parti là-dessus, et je me suis plu à imaginer ce qui aurait pu se passer pendant cette absence, cette disparition ", a expliqué Nicloux à Berlin.

L'auteur des "Particules élémentaires", sorte de Droopy égaré, se retrouve confronté à un trio de pieds-nickelés - un Gitan obèse et impulsif, un body-builder à fleur de peau et un adepte du free-fight amoureux de son chien d'attaque - qui le séquestrent dans un petit pavillon du Loir-et-Cher, dans le centre de la France, à la décoration kitsch.
De dîners bien arrosés en tête-à-tête savoureux se noue entre les petits malfrats et Houellebecq une relation truculente, à coups de dialogues parfois surréalistes et le plus souvent hilarants.

" C'était improvisé (...). Je pense que je serais capable d'apprendre un texte s'il le fallait mais un texte, j'aurais peut-être tendance à le réécrire, je serais pénible avec un texte ", a expliqué l'écrivain à quelques journalistes.
" Il y a eu une tonalité qui a été donnée (...) cette tonalité de comédie mais aussi une tonalité sentimentale où une empathie se crée entre chacun des personnages ", soulignait de son côté Nicloux.

Les parents septuagénaires d'un des ravisseurs, Ginette et Dédé, un mécano qui ne parle que le Polonais et une jeune prostituée nommée Fatima, complètent cette petite communauté improbable dans laquelle "Michel" comme tout le monde l'appelle, laisse libre cours à ses considérations sur "Le Seigneur des Anneaux", Lovecraft, la paternité, la démocratie représentative en Suède ou le milieu littéraire "volontiers dans la pédophilie"...

" Je pense que j'ai été pris en partie pour ça car l'une de mes caractéristiques, c'est qu'on sait jamais trop ce que je vais dire, donc je suis surprenant ", souligne l'écrivain et poète.

Drôle, le film laisse aussi apparaître un Houellebecq touchant, presque sentimental qui rompt avec l'image publique cynique, dépressive voire provocatrice du personnage, comme dans cette scène de petit-déjeuner entre lui et la jeune Fatima qu'il couve d'un regard enamouré.

" Ce qui m'a donné envie de faire ce film, c'est Michel, pas Houellebecq, l'image de Michel Houellebecq ne m'intéresse pas, ce qui m'intéresse c'est la personnalité de Michel, c'est lui qui m'a donné envie de faire le film, c'est cette condition humaine-là qu'il m'intéressait de travailler, de confronter Michel à des personnages assez hauts en couleur et de voir ce qui allait se produire ", raconte Nicloux.

Personne ne sait qui a commandité cet enlèvement. Un mystérieux avocat (interprété par l'ancien avocat de plusieurs figures du banditisme, Karim Achoui), intervenant pour le compte de non moins mystérieux responsables vient finalement solder l'affaire en remettant quelques enveloppes de liquide aux kidnappeurs.

Et Houellebecq retrouve une liberté qui, confesse-t-il, ne lui apporterait finalement pas grand chose de plus que son état de captif.

" Ce qui est surtout troublant, c'est que ma vie ordinaire n'est pas tellement plus intéressante, c'est la vérité, c'est assez embarrassant comme conclusion, je suis obligé de convenir que ma vie est pas terrible ", sourit l'acteur-auteur.

Et est-il satisfait du film ? " Oui, dans la mesure où j'arrive à dépasser la stupéfaction de me voir à l'écran ".

(9 Février 2014 - Relax News)