Les Oscars sous une pluie de polémiques

Les Oscars sous une pluie de polémiques

Ah les Oscars, ses paillettes, ses stars, son tapis rouge, et surtout ses polémiques, qui loin de faire rêver, entachent la fête d’un arrière-goût de bêtise. La plus grosse vient de sortir, elle concerne Avatar, et plus particulièrement un sketch qui a été tout simplement coupé.

Celui-ci était censé mettre en scène Sacha Baron Cohen et Ben Stiller ; le premier, tout de bleu vêtu, devait représenter une Naa’vi, le second son interprète... Dans le déroulement, Ben Stiller devait mal traduire le discours de l’habitante de Pandora, jusqu’à l’énerver - et que l'on comprenne que la demoiselle (jouée par Sacha Baron Cohen, donc) était en fait enceinte du bébé de James Cameron. Enfin, l’histoire devait se régler comme cela se passe souvent chez l’oncle Sam : sur le plateau de Jerry Springer (avec bagarre, vigiles et bip sur les insultes).

Devant ce scénario, le producteur de la cérémonie Bill Mechanic a pris peur, et pour éviter que « James Cameron ne quitte la cérémonie fou de rage devant les caméras de télévision », il a tout simplement décidé de le couper. Là où Cameron pourrait surtout piquer une colère, c’est sur le manque d’humour que lui présume le producteur.

Rien de grave dans tous les cas - si ce n’est qu’on nous prive du sketch de deux des larrons les plus drôles d’Hollywood. Mais on ne peut s’empêcher de se poser la question sur la place que tient Avatar, et sur ce « protectionnisme ». Il ne faut pas oublier que même si le film a rendu le sourire à bien des financiers de la côte Ouest, il est déjà énormément parodié, notamment sur internet, sans que cela ne pose de problèmes.

À côté, Avatar n’est pas le seul à faire polémique et certaines feraient presque croire qu’elles n’existent que pour créer du buzz. Le producteur français de Démineurs s’est vu interdit de cérémonie car il a ouvertement appelé à voter pour des films indépendants (comme le sien), plutôt que pour des grosses machines de guerre à 500 millions de dollars (suivez mon regard). Cette machine de guerre ne plait d’ailleurs pas à tout le monde non plus, parce que “paradoxalement“ le message pacifiste, écolo et anti-impérialiste d’Avatar ne convient pas du tout aux « vrais Américains », ceux qui se baladent toujours avec un fusil dans la main droite, la bannière étoilée dans la gauche et traitent Bush de gauchiste. Ces derniers qualifient le dernier Cameron d’anti-américain, comme si les USA étaient l’antithèse de toutes les notions positives. On ne reviendra pas sur les cigarettes de Sigourney Weaver qui enflamme la colère des associations anti-tabac.

D’autres attaques auraient leur place dans une pièce de Ionesco tellement l’absurde le dispute à la drôlerie, si ces attaques n’avaient pas de répercutions sur l’inspiration des créateurs et la frilosité des producteurs. Le film Precious, la grosse surprise de cette année est accusée de véhiculer une mauvaise image des noirs, comme si l’obésité, l’illettrisme et les abus sexuels étaient la norme dans leur communauté. Le réalisateur, lui-même noir doit rigoler... jaune. Le film District 9 malgré son parallèle à l’apartheid n’y échappe pas, et le gouvernement du Niger (où le film a été interdit) accuse le réalisateur Neill Blomkamp de faire passer ses ressortissants pour des « criminels, des cannibales ou des prostituées qui couchent avec des extraterrestres. » Et ouais, rien que ça !

Toujours dans la chasse aux sorcières racistes, le dernier bébé des frères Coen A serious man où ces derniers reproduisent l’univers de leur enfance dans un quartier juif du Middle West américain est accusé d’antisémitisme. Même procès pour le film Une éducation. À vouloir parfois être plus Juif que le rabbin, on deviendrait presque plus bête que son chien.

Fredell Pogodin, un responsable des relations publiques à Hollywood explique ça très bien : « Quand vous avez des critiques à faire ou que vous voulez faire parler d’un sujet, est un bon moment pour le faire. Je ne dis pas que les reproches ne sont pas légitimes, mais vous savez que c’est un moment où les médias vous écouteront. » En vous laissant méditer sur ces belles paroles qui en disent long sur l’état d’esprit de ces polémistes en herbe, dont le seul but est de tirer la couverture à eux, on va attendre gentiment que ça passe, puis on se remettra à regarder ces films comme avant en se faisant soi-même l’opinion qui prévaut si un film semble dépasser les bornes.

=> Toutes les infos sur 82ème Cérémonie des Oscars 2010
=> Toutes les infos sur Sacha Baron Cohen

Yohan Labrousse (04 mars 2010)