PlayTime vient d'une autre planète disait François Truffaut. Ce chef d’œuvre de Jacques Tati de 1967 revient en salles mercredi en version restaurée numérisée en très haute définition, "comme jamais Tati l'a vu ou entendu" avant, assure Jérôme Deschamps.
"Un film exceptionnel, l’œuvre la plus ambitieuse et la plus visionnaire de Tati", résume pour l'AFP cet homme de théâtre, petit-cousin du cinéaste. Au côté de sa compagne Macha Makeieff, il gère Les Films de mon oncle, qui restaure et réédite les films de Tati.
Ce film effectivement ne ressemble pas aux autres œuvres du maître du burlesque Jacques Tatischeff dit Tati, né en 1907 et disparu en 1982.
Un décor inouï. Un tournage homérique. Et en bout de course, des producteurs et un réalisateur ruinés.
Tati a carrément fait construire ce que l'on appellera "Tativille" reproduisant du côté de Joinville-le-Pont (Val-de-Marne) une ville à l'architecture ultramoderne avec "des tours à 50% de hauteur", rappelle Jérôme Deschamps.
Dans ce décor impressionnant, Tati fait se croiser un groupe de touristes américains venu visiter la capitale et un M. Hulot, personnage fétiche du cinéaste qu'il incarne encore, venu dans des bureaux pour un entretien mais qui se perd dans l'immensité du bâtiment.
Au gré de ses rencontres et de ses déambulations, M. Hulot va se trouver embarqué dans un Paris ultramoderne.
Outre son format, ses qualités scénaristiques, l'image (tournée en 70 mm), le son, restaurer "PlayTime" était "très important car pendant longtemps Tati a eu une image un peu de réactionnaire, avec la nostalgie des petits villages".
- Trois ans de tournage -
"Or on voit bien dans sa façon de filmer la modernité dans PlayTime qu'elle l'inquiète, mais au fond, ce n'est pas à elle qu'il en veut", assure Jérôme Deschamps.
"Il se pose plus la question de la perdition de l'homme, M. Hulot en l'occurrence, dans les changements du monde. Il ne déteste pas la modernité. La preuve, Orly est filmé comme jamais dans PlayTime".
"Le tournage a duré trois ans et a coûté six fois plus cher que le budget prévisionnel", poursuit-il. Les quelque 1,2 million de spectateurs n'y suffiront pas.
"Ça a mis sur la paille les producteurs, Tati et cela a fait que les films ont été saisis après".
Les Films de mon Oncle s'occupent depuis 2000 de l’œuvre de Tati après en avoir récupéré tous les droits.
Le film a déjà fait l'objet d'une restauration en 2002, année où il a été projeté à Cannes.
Douze ans plus tard, cette œuvre à part revient en 4K, autrement dit en ultra haute définition qui a permis d'aller encore beaucoup plus loin dans le lourd travail de restauration, avec l'évolution des techniques dans l'image et le son.
Dans ce film, "le son est une œuvre à part entière", assure-t-il encore. Pour Macha Makeieff, il faut même "écouter PlayTime. Les voix et les grincements, les sons mécaniques, électriques, caoutchouteux. C'est là sa vraie sensualité", dit-elle dans un texte de présentation.
Le travail de restauration a été d'autant plus passionnant enchaîne Jérôme Deschamps que "maintenant on a des techniques pour nettoyer les sons sans toucher à la matière elle-même".
Pour Vincent Paul-Boncour de Carlotta Films, qui distribue le film en salles, "PlayTime fait partie de ces rares films de l'histoire du cinéma qui deviennent un classique bien après sa sortie. "Il est devenu plus important aujourd'hui qu'à l'époque".
En 2002, 200.000 fans avaient revu PlayTime. Un score irréalisable en 2014. Vincent Paul-Boncour table entre 30.000 à 50.000 spectateurs, le plus haut actuellement en matière de film de patrimoine.
Depuis dix ans, la concurrence dans le secteur a explosé de même que les supports de diffusion.
Le 6 août, c'est l’œuvre complète de Jacques Tati, dont Jour de fête, Mon oncle et Parade, qui ressortira dans les salles.
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(13 Juil 2014 - Relax News)