Alita – Battle Angel sur TF1 : quand James Cameron doutait du potentiel de Robert Rodriguez

600 pages de script à retravailler

Alita – Battle Angel sur TF1 : quand James Cameron doutait du potentiel de Robert Rodriguez

Face au succès monstrueux d’"Avatar", James Cameron décide de ne pas mettre en scène "Alita : Battle Angel" et propose le projet à son ami Robert Rodriguez. Et le scénario de ce dernier inquiète en premier lieu le réalisateur de "Titanic"…

Alita : l’adaptation d’un manga culte

En 2019, après cinq ans d’absence dans les salles obscures depuis la sortie de Sin City : J’ai tué pour elle, Robert Rodriguez signe son retour avec un projet ultra ambitieux. Sous la houlette du scénariste et producteur James Cameron, le cinéaste réalise Alita : Battle Angel, l’adaptation du manga culte Gunnm de Yukito Kishiro.

Dans le film, l’héroïne Gally devient donc Alita. En l’an 2563, 300 ans après l’effondrement de la Terre à la suite d'une guerre contre Mars, le corps de cette cyborg (Rosa Salazar) est retrouvé au cœur d’une décharge d’Iron City par le docteur Ido (Christoph Waltz), spécialiste des augmentations biomécaniques.

Réparée, Alita se réveille amnésique. Elle prend rapidement conscience de ses capacités surhumaines et se lance en quête de son passé, aidée par le jeune Hugo (Keean Johnson), revendeur de pièces détachées. Ses aptitudes sont vite repérées et convoitées par l’énigmatique Vector (Mahershala Ali), l’organisateur du violent Motorball en lien avec des puissants de Zalem, ultime cité flottante qui surplombe Iron City.

Alita : Battle Angel
Alita (Rosa Salazar) - Alita : Battle Angel © Walt Disney Studios Motion Pictures

Jennifer Connelly, Ed Skrein, Jackie Earle Haley, Eiza González, Edward Norton, Rick Yune et Jai Courtney complètent la distribution du long-métrage, qui ne comble pas les attentes financières de la Fox lors de sa sortie. Doté d’un budget estimé à 170 millions de dollars, sans compter les frais de promotion, Alita : Battle Angel récolte 404 millions de dollars au box-office mondial, dont seulement 85,8 millions aux États-Unis. Un score décevant pour le studio, qui rend la possibilité d’une suite incertaine, malgré l’envie de Robert Rodriguez et du producteur Jon Landau.

Une longue gestation

S’ils aimeraient que l’avenir hollywoodien d’Alita ne soit pas réduit à néant, c’est en partie parce que le film a connu un long développement. Dans les années 1990, un certain Guillermo del Toro conseille à son ami James Cameron de se pencher sur Gunnm. La porte d’entrée du réalisateur de Terminator vers le manga cyberpunk se fait par l’anime constitué de deux épisodes : Rusty Angel et Tears Sign. Conquis, il achète les droits d’adaptation.

Débute alors une fastidieuse période d’écriture. Dans le reportage promotionnel intitulé Du manga à l’écran, James Cameron se souvient :

Il y avait un processus d’écriture au cours des ébauches. Je travaillais avec une autre scénariste, Laeta Kalogridis, qui a apporté une superbe énergie. À un moment donné, je me suis dit qu’on se trouvait face à un mur, donc j’ai rédigé ma propre ébauche. Elle faisait 185 pages. Mais elle contenait l’essence d’une histoire d’amour très simple. L’histoire d’amour de Roméo et Juliette. Elle est un cyborg. Il est humain. Ils sont dans des camps opposés. Mais ça faisait trop long. Je me suis dit : 'Je suis encore face à un mur'.

Pendant cinq ans, le cinéaste planche sur le script pour obtenir une version qui lui convient. En 2005, des artwork et des esquisses sont développés.

Avatar ou Alita ?

Mais au même moment, James Cameron et Jon Landau comprennent qu’ils ont désormais les capacités technologiques leur permettant de concrétiser un autre projet qui tient énormément à cœur à l’auteur de Titanic. Ils se retrouvent face à un dilemme impossible. Le réalisateur déclare à ce sujet :

On en est arrivés à devoir tirer à pile ou face entre Battle Angel et Avatar. On s’est dit : 'Soyons malins'. Développons un système de capture de performances pour créer ces personnages de synthèse, puis on fera Avatar, puis Battle Angel, ou Battle Angel, puis Avatar. Mais on amortira notre développement en l’utilisant sur deux projets.

Alita : Battle Angel
Alita (Rosa Salazar) - Alita : Battle Angel © Walt Disney Studios Motion Pictures

Durant les phases de tests de ce procédé révolutionnaire, James Cameron "tombe amoureux" d’Avatar. Alors qu’il ne cesse de repousser la mise en chantier d’Alita : Battle Angel, le cinéaste tranche et décide de se consacrer à Avatar et ses suites :

Je me suis toujours dit que j’y reviendrais (à Alita : Battle Angel). Puis avec le succès fou d’Avatar et la situation qui a encore dégénéré dans le monde réel en matière de droits indigènes, de réchauffement climatique et de problèmes environnementaux, je me suis dit : 'Avatar est important. Je dois continuer ces films. C’est peut-être la meilleure façon d’utiliser mon temps'. J’ai donc abandonné Battle Angel en tant que réalisateur.

"Ça va être nul"

Au cours d’un déjeuner avec James Cameron, Robert Rodriguez l’interroge sur ses projets. James Cameron lui parle d’Alita : Battle Angel, toujours dans les tiroirs. Comprenant qu’il pourrait le confier à un autre réalisateur, il lui propose de retravailler plus de 600 pages de script et de notes pour en tirer un scénario.

Lorsque Robert Rodriguez lui montre sa version dégrossie, James Cameron se montre sceptique :

Il est revenu avec une version de 130 pages. Je me suis dit : "Ça va être nul". Tous les bons trucs auront disparu ou auront été modifiés.

Néanmoins, il constate finalement que sa vision a été préservée par le cinéaste derrière Desperado :

Je l’ai lu d’une traite. C’était la bonne histoire. C’était l’histoire que j’avais envie de raconter.

Jon Landau précise :

On était tous les deux étonnés qu’il ne manque rien du scénario de base. (…) Les thèmes importants, les moments de personnages étaient là.

Ne souhaitant pas brider Robert Rodriguez, James Cameron ne se rend qu’une fois sur le tournage du blockbuster. Comme nous le confiait le premier lors de la sortie, le second l’a cependant énormément aidé lors de la pré-production, notamment pour le former à la capture de mouvement. Il assure ensuite :

Il voulait que je me sente libre, que je fasse mon film. Et moi je voulais faire un film de James Cameron !