Pentagon Papers : retour sur le point de départ héroïque d’une enquête nécessaire

Pentagon Papers : retour sur le point de départ héroïque d’une enquête nécessaire

Dans "Pentagon Papers", Meryl Streep et Tom Hanks unissent leurs forces pour dévoiler la vérité peu reluisante des intentions du gouvernement américain pendant la guerre du Vietnam. L’enquête journalistique que dépeint le film part d’un geste héroïque de Daniel Ellsberg, ancien analyste du Pentagone qui a œuvré pour stopper un massacre injustifié.

Pentagon Papers : l’intégrité ou la rentabilité ?

En 1971, le New York Times révèle que le gouvernement des États-Unis était conscient qu’il ne remporterait pas la guerre du Vietnam dès 1965, grâce à une étude de 7000 pages commandée par le secrétaire à la Défense Bob McNamara. Alors que le quotidien est poursuivi par l’administration du président Nixon, un reporter du Washington Post, qui n’est encore qu’un journal local, parvient à mettre la main sur une partie du rapport compromettant.

Amie proche de Bob McNamara à une époque où la presse et le gouvernement peuvent encore échanger autour d’un cigare et d’un verre, la directrice de publication Kay Graham (Meryl Streep) est alors confrontée à un dilemme de taille. Si elle décide de faire paraître des extraits de l’étude, elle tournera le dos aux mondanités dans lesquelles elle s’est habituée à vivre, et provoquera également la colère d’actionnaires qui la jugent incompétente. Encouragée par le rédacteur en chef Ben Bradlee (Tom Hanks), Kay Graham va prendre une décision qui va changer la face du Washington Post, quelques mois avant le scandale du Watergate.

Pentagon Papers : retour sur le geste héroïque qui a entraîné les révélations journalistiques nécessaires évoquées dans le film.

Steven Spielberg s’attaque à la fin d’un rêve

Sorti en 2018, deux mois avant Ready Player One, Pentagon Papers permet à Steven Spielberg d’explorer diverses thématiques avec une cohérence et une fluidité impressionnantes dans la réalisation. Le long-métrage relate l’histoire vraie d’une femme qui s’impose progressivement malgré le sexisme d'actionnaires qui la dénigrent ouvertement. Le film est également une ode au journalisme d’investigation qui parvient à explorer tous les maillons d’une rédaction, du stagiaire qui mène une course effrénée pour rechercher une information aux imprimeurs qui rendent concrets l’existence d’un scoop.

Pentagon Papers est par ailleurs traversé par le sentiment de désillusion des États-Unis propre à la période dans laquelle les événements se jouent. En 1971, la guerre du Vietnam est un fiasco qui divise le pays, et les retombées de l’assassinat de John F. Kennedy sur le moral des citoyens sont encore perceptibles. Le rêve a laissé place à l’amertume, et la plénitude du début des sixties paraît déjà bien loin.

Pentagon Papers : retour sur le geste héroïque qui a entraîné les révélations journalistiques nécessaires évoquées dans le film.

Le geste héroïque à l’origine de Pentagon Papers

Steven Spielberg n’avait jusqu’à Pentagon Papers jamais réalisé de film autour de la guerre du Vietnam. Le cinéaste a choisi d’ouvrir son long-métrage sur le conflit, en suivant brièvement le travail de Daniel Ellsberg, expert et analyste en renseignements au sein du Pentagone. Envoyé sur place en tant que civil pendant deux ans, il comprend que les soldats américains sont en déroute, tandis que Bob McNamara assure à la presse que la tournure de la guerre est en faveur des États-Unis.

Face à ces mensonges, Daniel Ellsberg décide de transmettre le rapport ultra confidentiel à la presse. Un geste héroïque qui marque le point de départ d’une enquête journalistique passionnante et nécessaire, à propos duquel l’ancien analyste déclare dans un reportage autour du film :

Ça révélait que nous, nos présidents, préféraient une guerre sans fin au Vietnam à une solution politique que nous n’aimions pas. L’unification sous un gouvernement communiste ou un gouvernement nationaliste opposé à la politique américaine en général. On a préféré la guerre et on leur a imposé ça. Et c’était très clair dans ces documents. Donc, c’était surtout une guerre américaine. Et ce n’était pas qu’une guerre. Ce n’était pas une noble cause. Elle n’avait aucune légitimité. Pour moi, ça signifiait que tous ces morts étaient un homicide non justifié. Et je devais faire mon possible pour l’arrêter. J’ai commencé à les recopier avec l’intention de les donner d’abord aux Relations Internationales du Sénat, ce que j’ai fait. Mais le sénateur Fulbright a choisi de ne pas les publier, par peur, en fait, d’en souffrir politiquement. Finalement, ayant échoué à les faire publier, je les ai donnés au New York Times sans être sûr qu’ils feraient quoi que ce soit.

La suite des événements est à voir ou revoir dans Pentagon Papers.