[Critique] A Ghost Story de David Lowery

[Critique] A Ghost Story de David Lowery

Dans "A Ghost Story", David Lowery filme un drap blanc pour raconter une histoire sensible et triste sur un fantôme livré à lui-même.

Après s’être attaqué pour Disney à Peter et Elliott le dragon, David Lowery est allé tourner en cachette A Ghost Story. Un petit film intimiste et longtemps tenu secret, avec Rooney Mara et Casey Affleck. Une œuvre personnelle, marquée par l’approche contemplative du cinéaste, d’une beauté sensible indéniable.

Le thème du deuil a déjà été abordé moult fois. Mais avec A Ghost Story, l’approche de David Lowery s’avère des plus singulières. Comme son titre l’indique, l’histoire concerne un fantôme. Celui que joue Casey Affleck, qui ne peut se résoudre à quitter son épouse (Rooney Mara), et continue de hanter leur demeure, recouvert d’un drap blanc. Après sa mort soudaine, elle, devra se reconstruire. Accepter la perte de son amant, et partir refaire sa vie.

Une vraie intention de cinéma !

Il suffit d’une poignée de séquences au réalisateur pour mettre en place ce récit simple, et construire le caractère de ses personnages. Débutant par un acte de boulimie de Rooney Mara (comme toujours sublime et inégalable), avalant durant de longues minutes une tarte entière pour tenter de combler le vide laissé - on repense alors aux fameuses bouchées de Norah Jones dans My Blueberry Nights. Une scène interminable qui joue avec les nerfs du spectateur, mais qui suffit à nous mettre en empathie avec son personnage.

Dans la même optique, le cinéaste fait preuve d’une délicatesse magnifique en filmant longuement, en plan fixe, un tendre baiser entre les deux interprètes, enlacés dans un lit. Entre Lowery et ses deux acteurs, qu’il retrouve après Les Amants du Texas (2013), la complicité est palpable et tend vers une émotion certaine.

Tout en les filmant durant de longues séquences sans coupure, le cinéaste joue avec une avancée du récit rapide. Il parvient néanmoins à garder une vraie fluidité, obtenue par un montage maîtrisé entre l’image et le son (dont l’utilisation du morceau I Get Overwhelmed de Dark Rooms), ainsi qu’une alternance entre plans fixes et mouvements de caméra.

Un fantôme témoin de la vie

Ainsi, assez vite, Rooney Mara disparaîtra du cadre pour ne laisser que ce fantôme errant. Un drap blanc qui déambule dans une maison abandonnée, dans l’espoir de revoir un jour sa femme. Les nouveaux locataires se succèdent, mais le temps semble interminable pour ce fantôme, qui ne peut qu’observer passivement (ou presque) la vie qui l’entoure. On ne peut alors que relever les nombreuses intentions du réalisateur. Chaque plan étant parfaitement étudié pour révéler les fêlures de l’être (comme cette peinture craquelée à l’extérieur de la maison).

Derrière son aspect hermétique, dû à une approche parfois cosmique et contemplative, qui rappellerait presque Kubrick ou bien Terrence Malick (The Tree of Life), la poésie qui ressort d’A Ghost Story est indéniable. David Lowery parvient à s’accaparer autant le drame que le fantastique dans ce récit d’une rare beauté, dont survit la tristesse évidente d’un fantôme abandonné. Une vraie merveille.

 

A Ghost Story de David Lowery, en salle le 20 décembre 2017. Ci-dessus la bande-annonce.

Conclusion

Note de la rédaction

Bien que difficile d'accès, A Ghost Story reste un petit bijou poétique, émouvant et sensible qui traite avec originalité du deuil.

Premier de la classe

Note spectateur : Sois le premier