A Taxi Driver - Notre avis

A Taxi Driver - Notre avis

"A Taxi Driver", quatrième long-métrage de Jang Hoon (Rough Cut, Secret Reunion, The Front line), un ex-protégé de Kim Ki-duk, n'a ni la veine politique ni la radicalité formelle de son aîné.

Film d’ouverture de la 12e édition du Festival du film coréen à Paris, A Taxi Driver de Jang Hoon arrive en France avec son étiquette d’énorme succès national derrière lui laissant penser que son sujet, ou mieux encore son traitement, soit parvenu à entraîner plus de dix millions de coréens dans les salles. Avec un tel titre, si emblématique de l’histoire du cinéma et d’une certaine époque, la dimension politique d’A Taxi Driver se devait, par-delà l’événement historique qu’il retranscrit, dépasser le simple témoignage « dénonciateur » qu’engendre généralement les films qui sont inspirés de faits réels.

A Taxi Driver

Mais le politique reste ici la toile de fond d’un récit qui, par facilité ou peur, n’apporte aucune variation, aucune surprise, tant à travers le comportement des personnages que dans la description de l’événement, qui serait à même d’altérer la vision formatée du cinéaste. Le film s’enferme dans une représentation linéaire et didactique de « l’histoire vraie » distillant son lot de scènes attendues à l’image des manifestations étudiantes. Lors de celles-ci, la violence démonstrative, soumise à des effets de mise en scène pompeux tels que le ralenti ou la musique, reflète parfaitement l’emphase non mesurée dans laquelle se complaît le film.

Un bien triste hommage

Il n’y a finalement qu’un seul moment dans le film où le cinéaste fait preuve d’une véritable audace scénaristique. Par l’intermédiaire d’un militaire qui, l’espace d’un instant, ne répond plus au "généralisme" manichéen ambiant (dictature = militaire = méchant) mais retrouve des traits humanisant, la fiction romanesque reprend ainsi sa liberté expressive face au rétrécissement que lui impose sans arrêt la description « réaliste ». Car au-delà de ces images « chocs » qui évoquent la mémoire d’une histoire tragique, le choix du réalisateur de faire de l’anonyme chauffeur de taxi, et non du reporter allemand, la figure héroïque de son film possédait un réel intérêt. Ce n’est pas le fait qu’il soit veuf – l’histoire avec sa fille est inutile – mais bien apolitique qui entrouvre un espace politique dans lequel l'affrontement avec l'argument historique serait imprévisible et livrerait une vision altérée de l’événement à partir d’un héroïsme dégradé.

A Taxi Driver

Mais une nouvelle fois, le film ne s’aventure jamais sur ces pentes ambivalentes, préférant uniquement s’amuser des problèmes de communication entre le coréen et l’allemand à des fins tristement comiques. Avec son suspens et ses enjeux étriqués – l’allemand doit à tous prix diffuser les images qu’il a enregistrées – le film comble maladroitement le vide avec des séquences « intimes » totalement anecdotiques (le repas avec la famille), incapable d’approfondir les deux ou trois relations que le film esquisse avec un étudiant ou quelques chauffeurs de taxi.

Même l’allemand, supposé faire contrepoint dans ce duo atypique, est sacrifié au profit du chauffeur, interprété par un Song Kang-ho que l’on a connu plus inspiré chez Bong Joon-ho (Memories of murder, The Host). Si le spectateur cherche à en savoir plus sur cette rencontre rocambolesque ou sur cet événement majeur de l’histoire récente coréenne, A Taxi Driver ne dépasse pas l'usage purement informatif. Le visage figé, presque caricatural, de Song Kang dit à peu près tout de cet hommage lénifiant qui ne dit rien de profond et ne fait rien de conséquent d’un tel événement, preuve que la fiction ne doit jamais se replier sur l’histoire.

 

A Taxi Driver de Jang Hoon, présenté au festival du film coréen à Paris du 24 au 31 octobre 2017. Ci-dessus la bande-annonce.

Conclusion

Note de la rédaction

Présenté au Festival du film coréen à Paris, "A Taxi Driver", immense succès en Corée du sud, est à l'image de son héros, apolitique et maladroit.

Peut mieux faire

Note spectateur : 4.7 (1 notes)