Argylle : Matthew Vaughn tourne en rond

Argylle : Matthew Vaughn tourne en rond

CRITIQUE / AVIS FILM - Après trois films "Kingsman", Matthew Vaughn reste dans le genre de l'espionnage avec "Argylle", qui parodie le genre en suivant une romancière embarquée dans une folle aventure.

Argylle : entre parodie d'espionnage et film méta

Si son premier film, Layer Cake (2004), était une petite pépite de comédie de gangsters, digne de celles de son compère Guy Ritchie (dont il a produit les premiers films), Matthew Vaughn s'est fait connaître par la suite grâce à des adaptations de comics. Avec Kick-Ass (2010), puis X-Men : Le commencement (2011), le cinéaste a touché un plus large public et a pu développer son style. Mais c'est peut-être avec Kingsman (2015) que le réalisateur a définitivement posé sa pâte, faisant preuve d'une vraie maîtrise dans sa mise en scène et dans le rythme. Un film (toujours tiré de comics) qui a donné au genre de l'espionnage un coup de jeune avec un style pop et déjanté.

Après deux suites (2017 et 2021), Matthew Vaughn ne semble pas prêt à aller voir vraiment ailleurs. Avec Argylle, il reste dans le même genre, tout en changeant de point de vue. Car s'il met d'abord en scène les aventures d'un espion stéréotypé au possible, incarné par Henry Cavill, le sujet est ailleurs. Premier retournement d'une longue série de rebondissements, Argylle est, dans le film, un personnage de fiction imaginé par Elly Conway (Bryce Dallas Howard), une romancière à succès qui vit seule avec son chat.

Bryce Dallas Howard - Argylle ©Universal Pictures International France
Bryce Dallas Howard - Argylle ©Universal Pictures International France

Alors qu'elle peine à terminer son dernier roman, elle part rejoindre sa mère pour qu'elle l'aide dans son écriture. C'est là que sa fiction rejoint sa réalité, puisqu'Elly tombe sur un vrai espion au style moins glamour, Aidan (Sam Rockwell, génial), qui lui apprend qu'elle est visée par une organisation criminelle. Hasard (ou pas), ses romans présentent de manière trop précise cette organisation et Elly est désormais dans leur viseur.

Des bonnes idées qui ne suffisent pas

Le concept n'est pas nouveau. On pense immédiatement au film À la poursuite du diamant vert (1984), dans lequel une romancière croise la route d'un aventurier. Mais aussi à La Mort aux trousses (1959) d'Alfred Hitchcock, qui propulse un homme ordinaire dans une aventure d'espionnage. Deux références assumées par Matthew Vaughn. Sur le papier, ce "détournement" du film d'espionnage avait donc tout pour plaire, avec un côté méta passionnant.

En effet, à l'origine du scénario de Jason Fuchs, il y aurait le vrai roman Argylle, d'une autrice encore inconnue, Ellie Conway. Plutôt que d'adapter simplement ce roman d'espionnage, Matthew Vaughn aurait préféré créer une version fictive de la romancière pour en faire l'héroïne de son film - et pour brouiller un peu plus les pistes sur ses véritables intentions.

Argylle ©Universal Pictures International France
Argylle ©Universal Pictures International France

Il y a donc dans la création même d'Argylle quelque chose de fascinant. Mais le résultat est malheureusement en deçà des espérances. Matthew Vaughn ne réussissant à convaincre que sur la moitié de son œuvre. Une première partie efficace, drôle et bien rythmée, avec notamment une bonne idée de mise en scène lors de la rencontre d'Elly et d'Aidan. Tandis que ce dernier se démène pour lui sauver la vie, la romancière passera son temps à avoir des visions d'Argylle, avant que la version moins sexy et élégante (Aidan donc) la ramène inlassablement à la réalité.

Long et visuellement laborieux

C'est amusant, lors d'une scène où l'action est bien faite dans son ensemble. Sauf qu'après cette séquence, toutes les autres s'avèrent visuellement hideuses (à commencer par le prologue), la faute à un usage excessif et inutile d'effets numériques qui gâchent le potentiel de la mise en scène de Matthew Vaughn. C'est d'ailleurs le grand défaut du cinéaste, qui dans la majorité de ses œuvres se contente un peu trop de mauvais VFX. Or, lorsqu'un film affiche un budget d'environ 200 millions de dollars, on est en droit de demander mieux visuellement. Avec bien moins de moyens, Guy Ritchie avait davantage convaincu avec Agents très spéciaux : Code U.N.C.L.E, autre hommage au genre, en moins parodique.

Sam Rockwell - Argylle ©Universal Pictures International France
Sam Rockwell - Argylle ©Universal Pictures International France

Dès lors, on ressent un profond regret devant une scène d'action d'Argylle dynamitée par des fumigènes, ou une autre totalement incohérente avec du pétrole qui ne tâche pas et où tout paraît faux - à commencer par les protagonistes. Viennent ensuite d'innombrables retournements de situation qui étirent inutilement un récit qui n'a rien de passionnant - et qui demeure trop sérieux. Avec plus de deux heures, il y a dans Argylle de vraies longueurs que même son casting prestigieux ne peut combler. D'autant plus que les seconds rôles, tout de même portés par Samuel L. Jackson, Dua Lipa, John Cena, Sofia Boutella ou encore Henry Cavill, font au final office de figuration au sein d'un film oubliable, pas même sauvé par une scène post-générique qui tente vainement de surélevée l'ensemble.

Argylle de Matthew Vaughn, en salles le 31 janvier 2024. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Convaincant dans sa première partie, "Argylle" finit par lasser. La faute à de trop nombreux rebondissements servant à rendre hommage au genre du film d'espionnage à l'ancienne, et à des séquences d'action loin d'être à la hauteur.

Note spectateur : 5 (1 notes)