Cry Macho : Clint Eastwood remonte en selle

L'infatigable légende est de retour

Cry Macho : Clint Eastwood remonte en selle

CRITIQUE / AVIS FILM - Clint Eastwood incarne une ancienne gloire du rodéo fatiguée et apaisée dans "Cry Macho". Un long-métrage qui offre des retrouvailles mitigées avec le monstre sacré…

Cry Macho :  l’impossible retraite

Trois ans après La Mule, Clint Eastwood repasse devant et derrière la caméra pour Cry Macho, son quarantième long-métrage. Encore plus que sur ce précédent film, le cinéaste et comédien de 91 ans confirme que la colère et l’amertume pas si lointaines de Gran Torino semblent désormais loin derrière lui.

L’acteur prête ici ses traits à Mike Milo, une ancienne gloire du rodéo devenue éleveur de chevaux. En 1979, le dresseur est renvoyé par son patron Howard Polk (Dwight Yoakam). Un an plus tard, ce dernier vient chercher son aide, en lui rappelant qu’il a une dette à régler. Polk demande à Milo de se rendre à Mexico afin de retrouver son fils Rafael (Eduardo Minett), ce qu’il réussit à faire sans trop de difficultés. En revanche, leur trajet jusqu’au Texas ne se déroule pas comme prévu.

Cry Macho
Cry Macho © Warner Bros. Pictures

À l’instar du personnage qu’il incarne, Clint Eastwood n’arrive pas à raccrocher. Sa rapidité et sa productivité font évidemment plaisir à voir, surtout lorsqu’il enchaîne coup sur coup des œuvres touchantes et nuancées comme La Mule et Le Cas Richard Jewell. Des nuances et des émotions, Cry Macho en contient. Mais contrairement à ses deux prédécesseurs, ce western contemporain accumule les maladresses, laissant un sentiment de précipitation et un goût d’inachevé.

Trop vieux pour ces conneries ?

L’ouverture met pourtant en place de belles promesses. L’invitation au voyage se fait sur de somptueux plans du soleil couchant avec l’apparition d’un héros fatigué mais encore loin de n’être plus que l’ombre de lui-même. L’époque du récit ramène par ailleurs le spectateur au temps où Clint Eastwood faisait valoir sa toute-puissance, notamment dans L’Épreuve de force, Doux, dur et dingue ou Ça va cogner. Un cadre idéal pour prendre à contre-pied l’image machiste ouvertement moquée dans le titre.

C’est d’ailleurs à la fin des années 70 que le cinéaste se voit proposer d’adapter le roman éponyme de N. Richard Nash. Se considérant trop jeune pour interpréter le cow-boy, il envisage de le proposer à Robert Mitchum mais le projet tombe à l’eau, d’après ses dires, avant de refaire surface ces dernières années.

La question de l’âge se pose à nouveau pour Cry Macho, mais dans le sens inverse. Si son rôle dans La Mule lui allait à merveille, Mike Milo paraît dorénavant trop jeune pour être incarné par Clint Eastwood. Certaines séquences ne collent tout simplement pas à l’allure boiteuse du protagoniste. C’est par exemple le cas lorsqu’il se met à débourrer des chevaux en retrouvant sa fougue d’antan, alors qu’il peine à se déplacer quelques secondes auparavant.

Mieux vaut être seul…

Le long-métrage souffre donc d’un vrai problème de crédibilité. Si Clint Eastwood a toujours ri de ses personnages avec le spectateur, il s’agit de l’une des rares fois où celui-ci rit en raison d’une gêne involontaire. Sans remettre en cause le sex-appeal du monstre sacré, la scène où Mike se fait très lourdement draguer et intimider par la mère du jeune Rafael s’impose par exemple comme un sommet de malaise. Un malaise également dû au fait que ce passage intervient au cours d’une première partie bâclée, marquée par des ellipses catastrophiques et une mise en place expéditive des enjeux.

Cry Macho
Cry Macho © Warner Bros. Pictures

L’interprétation des personnages secondaires est l’autre souci majeur de Cry Macho. Difficile de s’attacher au compagnon de route du héros tant il rappelle les heures sombres de jeunes premiers comme Horst Buchholz et Hayden Christensen. L’alchimie entre Clint Eastwood et Eduardo Minett met énormément de temps à décoller. Faussement rebelle, l’adolescent récite ses dialogues de manière appuyée et force les mimiques, face au regard parfois désemparé de son légendaire partenaire.

Une tendresse préservée

Cry Macho serait donc un naufrage total de la part total de Clint Eastwood ? Non. Lorsque Mike et Rafael sont contraints de s'installer temporairement dans un petit village, le film trouve son véritable intérêt. Le cinéaste semble alors s’être débarrassé d’une première heure dont il n’a que faire et peut enfin se concentrer sur le long-métrage qui l’intéresse.

La bascule se fait avec un court instant où le cow-boy fait une confidence déchirante à son jeune ami. Par la suite, le rythme se pose et la fragilité de Clint Eastwood fait des merveilles. Le réalisateur prend le temps d'ausculter son propre mythe - inscrivant ainsi l'œuvre dans le sillage de Gran Torino et La Mule - et de développer une romance qui cette fois-ci fonctionne avec une habitante jouée par Natalia Traven. L’humour fait mouche et des émotions émergent de situations simples. Cry Macho révèle dans cet acte une douceur et une mélancolie qui évoquent certains westerns comme Un nommé Cable Hogue de Sam Peckinpah ou L’Aventurier du Rio Grande de Robert Parrish.

Il faut donc patienter jusqu’à la moitié pour que le film offre des retrouvailles certes inconséquentes mais chaleureuses avec Clint Eastwood, avant une conclusion elle aussi expédiée. Un long-métrage largement dispensable, mais loin d’être exempt de beauté.

Cry Macho de Clint Eastwood, en salle le 10 novembre 2021. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Plombé par une première partie expéditive, "Cry Macho" se rattrape au cours d’une deuxième, plus simple et légère, où la douceur et la fragilité de Clint Eastwood offrent de jolis moments.

Note spectateur : Sois le premier