Dalva : retrouver le chemin de l’enfance

Dalva : retrouver le chemin de l’enfance

CRITIQUE / AVIS FILM – " Dalva " d'Emmanuelle Nicot donne à voir avec délicatesse une jeune fille brisée par l’emprise et l’inceste, qui parvient à se reconstruire.

Une première réussie pour Emmanuelle Nicot

Avant même de la voir à l’écran, ce sont les cris de Dalva (Zelda Samson, formidable dans son premier rôle au cinéma) qu’on entend. Des cris de détresse, de colère et d’incompréhension quand la police arrête son père. Dans son premier long-métrage Dalva, la réalisatrice Emmanuelle Nicot réussit brillamment à happer le spectateur dans la vie et dans la tête de son héroïne si attachante.

Comme Dalva, le spectateur se retrouve en état de sidération, bousculé, à terre. Dalva est prise en main par des policiers, la juge, l’avocate, le médecin, la psychologue. Autour d’elle, tout le monde s’agite. On lui retire ses vêtements, on l’examine, on lui assure qu’elle est en sécurité.

Dalva : survivre après l’inceste

On l’envoie dans un centre, sous la responsabilité des éducateurs Jayden (Alexis Manenti) et Zora (Marie Denarnaud). Dalva questionne, résiste, s’insurge, se cabre. Elle clame son amour pour son père, veut le voir et ne comprend pas les raisons pour lesquelles ils sont séparés. Car ce que montre parfaitement le film, c’est qu’avec cette arrestation, le monde de Dalva s’effondre. Même s’il s’agit d’un monde fondé sur les mensonges, l’emprise, la violence. Un monde dans lequel un père, sous couvert d’amour, abuse de sa fille et lui fait croire qu’elle est sa petite femme.

Zelda Samson - Dalva ©Diaphana Distribution
Zelda Samson - Dalva ©Diaphana Distribution

Un monde sexualisé qui a volé l'enfance insouciante de Dalva et l’a privée de l’amour de sa mère, à qui elle a été enlevée. Toute la gageure de Dalva consiste à faire découvrir à l'héroïne les conséquences de l'abus autant physique que psychique. Les émotions à fleur de peau de la jeune fille sont pleinement ressenties par le spectateur. Mais peut-on parler de jeune fille alors qu’elle n’a que douze ans ? Dalva n’est certes plus une petite fille, mais l’a-t-elle jamais été ? Car le film rappelle avec subtilité l’importance de ne pas brûler les étapes pour devenir une femme.

Ni tout à fait une enfant, ni tout à fait une femme

« L’enfer, c’est les autres », disait Jean-Paul Sartre. Mais pour Dalva, l’enfer, c’est son père Jacques (Jean-Louis Coulloc’h). Lors d'une rencontre en prison, il est présenté comme un homme calme et honteux, et on peut supposer qu’il a eu droit à quelques leçons de morale. À moins qu’il n'ait pris conscience, bien avant son arrestation, de son acte et de ses conséquences. On ne le saura pas, car la réalisatrice ne s’attarde pas sur lui. Il n’est pas le sujet de son film et c’est le point de vue de Dalva qui importe.

Dalva montre sans pathos que ce sont bien les autres qui vont sauver la jeune fille. Ils vont la confronter à la notion du bien et du mal, de l’autorisé et de l’interdit, des codes de la sexualité et de la défaillance parentale. Ils vont l’aider à lui ôter ses œillères, se détacher de l’emprise, ouvrir son cœur, se faire confiance, se construire de nouveaux repères. Des repères de la vie normale. Sous les yeux du spectateur empathique, Dalva se reconstruit donc et se réapproprie peu à peu son âge, son corps, son adolescence, sa vie.

Zelda Samson - Dalva ©Diaphana Distribution
Zelda Samson - Dalva ©Diaphana Distribution

Pourtant, ceux du foyer ne prennent pas vraiment de pincettes avec elle. On est même parfois surpris des réactions un peu brutales de Jayden, son éducateur référent. Samia (Fanta Guirassy), qui partage la chambre, lui apprend comment doit se comporter une fille de son âge. Le rapprochement avec les autres élèves de l'école apporte une autre touche de violence, malgré tout salutaire.

Enfin, sa mère Marina (Sandrine Blancke), avec qui elle renoue doucement. Ces moments hésitants de reconnexion et d'apprivoisement entre mère et fille sont particulièrement émouvants. Malgré quelques maladresses, Dalva se révèle donc un film puissant et lumineux, qui incite les spectateurs à réfléchir à la façon dont se relèvent les enfants victimes d'inceste.

Dalva de Emmanuelle Nicot, en salles le 22 mars 2023. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la Rédaction

"Dalva" est un film puissant et plein d'espoir qui adopte le point de vue d'une jeune fille brisée par l'inceste sur le chemin de sa reconstruction.

Note spectateur : Sois le premier