Destroyer : la vendetta de Nicole Kidman

Destroyer : la vendetta de Nicole Kidman

CRITIQUE FILM - Avec "Destroyer" la réalisatrice de "Jennifer's Body" et "Girlfight" se lance dans le polar et fait de Nicole Kidman une flic vengeresse méconnaissable, marquée, comme ses anciens acolytes, par un braquage qui a mal tourné des années auparavant.

On a déjà vu mille fois ce flic au bout du rouleau, ivre à longueur de journée et hanté par de vieux démons. Sauf que cette fois, ce flic est joué par Nicole Kidman. L’actrice, qui évoquerait davantage la grâce et l’élégance, est méconnaissable dans Destroyer. On la découvre dans la première scène les cheveux mal coupés et le teint gris, avec un jean qui met en avant un physique rachitique. Elle se traîne lentement vers une scène de crime. La vision en est presque comique. Et d’ailleurs, la réalisatrice Karyn Kusama n’a pas peur de jouer là-dessus, comme en attestera plus tard une poursuite difficile (voire inutile) entre son personnage, la détective Erin Bell, et un suspect.

Destroyer ou le pathétisme des bad guy

Déjà avec Jennifer’s Body, Karyn Kusama se détournait le genre horrifique. Une histoire grotesque de jeune fille assassinée par un groupe de rock sataniste et revenue d’entre les morts pour se venger, avec Megan Fox hyper sexualisée et une pointe d’érotisme lesbien. Voilà à quoi se résumait le film, à prendre très au second degré. Pour Destroyer, il ne s’agit pas tant de tourner en dérision le genre du film de flics, mais plutôt les personnages qui les composent. De les aborder d’une manière différente, loin des fantasmes habituels.

Critique Destroyer : la vendetta de Nicole Kidman

Suite à la scène de crime, Erin comprend que le tueur n’est autre que Silas, une ancienne connaissance qui fera longtemps figure de démon. À l’aide de flashbacks Kusama dévoile son passé, ses premières années dans la police où elle fut choisie pour infiltrer un gang de braqueurs. Dans le présent, plus elle avancera dans sa poursuite du leader (Silas), sa vendetta personnelle, plus on découvrira son passé, l’évolution de sa relation avec Chris, son collègue, jusqu’au fameux braquage qui ne se déroula évidemment pas comme prévu, et un twist malin.

Dans le style, on retrouve du Michael Mann. Kusama en récite les gammes en filmant Los Angeles de nuit durant de longs parcours en voiture et sous fond de musique tribale. La cinéaste va même jusqu’à reproduire quasiment à l’identique la scène du coyote de Collateral - mais sans vraiment en comprendre le fond derrière. Et si on peut relever une séquence de fusillade musclée et maîtrisée, là où la cinéaste parvient néanmoins à éviter la pale copie, c’est dans sa représentation des protagonistes.

Critique Destroyer : la vendetta de Nicole Kidman

Car si Michael Mann a pour habitude de se focaliser sur des professionnels, et notamment du braquage en concentrant ses films sur la préparation (Le Solitaire et Heat en sont les meilleurs exemples), Destroyer questionne lui davantage l’après. D’autant que chez Mann cela se termine rarement bien, le film de Kusama pourrait en être une certaine continuité. Dans Destroyer, bien des années après le braquage, les acolytes n’ont plus rien de glorieux.

L’un n’a pu sortir de prison que parce qu’il lui reste quelques mois à vivre et les passera en étant cloué au lit chez sa mère. Une autre est devenue une junkie délaissée par Silas qui lui préfère des petites jeunettes. Tous sont plus pathétiques les uns que les autres, et Erin ne fait pas exception. La cinéaste use d’ailleurs de ces flashbacks pour créer un véritable contraste entre les deux périodes. Montrant une jeunesse insouciante et dépassée, chez les truands comme les flics infiltrés. Un regard presque nostalgique sur le passé qui permet au film d’atteindre une certaine émotion au fil des révélations (notamment dans la relation entre Erin et sa fille). Destroyer ne renouvelle pas le genre, mais en propose une légère variante efficace.

 

Destroyer de Karyn Kusama, en salle le 20 février 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

"Destroyer" rentre dans la case des polars efficaces. Il ne révolutionne pas le genre mais reste notable grâce à l'interprétation de Nicole Kidman (méconnaissable) et à la représentation de criminels particulièrement pathétiques, loin des fantasmes habituels dans le genre.

Note spectateur : Sois le premier