Freaks Out : des super-héros pas comme les autres pendant la Seconde Guerre mondiale

Une proposition singulière et aboutie

Freaks Out : des super-héros pas comme les autres pendant la Seconde Guerre mondiale

CRITIQUE / AVIS FILM - Après son excellent "On l'appelle Jeeg Robot" sorti en 2017, Gabriele Mainetti est de retour avec un nouveau film de super-héros alternatif : "Freaks Out". Un long-métrage atypique qui prend place pendant la Seconde Guerre mondiale.

Freaks Out : la nouvelle proposition de Gabriele Mainetti

Son nom ne vous dit peut-être rien. Gabriele Mainetti est un réalisateur italien de 45 ans qui s'est illustré, il y a quelques années, avec On l'appelle Jeeg Robot. Sorti en 2017, le long-métrage s'est avéré être une réussite critique, avec de nombreux prix aux David di Donatello (l'équivalent des César en Italie), et financière avec près de 6 millions de dollars de recettes au box-office mondial. Face à ce succès, Gabriele Mainetti a décidé de rester dans la thématique des super-héros pour proposer une nouvelle histoire décalée sur le sujet. Comme avec Jeeg Robot, son nouveau film, Freaks Out, se concentre sur des super-héros de l'ombre, qui évoluent dans un univers réaliste, dénué de justiciers masqués.

Freaks Out
Freaks Out ©Metropolitan FilmExport

L'intrigue prend place à Rome en 1943, pendant l'occupation nazie. Le récit suit un groupe d'artistes de cirque, possédant des pouvoirs fantastiques incroyables. Matilda, Cencio, Fulvio et Mario sont obligés de rejoindre la ville pour trouver du travail. Évidemment, leur destinée va les conduire à s'opposer au régime nazi malgré eux.

Une nouvelle dérivation du genre super-héroïque

Comme avec Jeeg Robot, Gabriele Mainetti joue avec les codes du film de super-héros traditionnel. Il reprend ainsi des éléments bien connus des aficionados du genre. Comme par exemple : le rejet de la société, la difficulté à accepter sa condition et ses pouvoirs, la recherche d'un but plus grand via l'exploitation des capacités super-héroïques. Comme dans son précédent film, Gabriele Mainetti utilise les clichés classiques du style pour servir son récit. Ce qui change réellement, ce sont le décor et les personnages. C'est effectivement dans sa volonté de se placer pendant la Seconde Guerre mondiale que Freaks Out se démarque des productions habituelles.

Ainsi, il met en place une relecture étonnante des 4 Fantastiques, en Italie, et pendant la Seconde Guerre mondiale. Il met en scène un quatuor un peu particulier avec, encore une fois, les lieux communs des films de super-héros. On retrouve ainsi une parodie de la Chose, ici un homme poilu à la force démesurée ; un personnage féminin qui cherche sa place, personnifié par la jeune Matilda ; et deux personnages masculins désordonnés pour compléter l'équipe. Mais là encore, les clichés sont inversés, puisque c'est l'homme-bête qui est la tête pensante de l'équipe.

Freaks Out
Freaks Out ©Metropolitan FilmExport

Le long-métrage rappelle aussi Captain America, surtout à cause du contexte de la Seconde Guerre mondiale et de la découverte de ces héros qui peuvent changer le cours du conflit. Comme dans le film de Joe Johnston, Gabriele Mainetti se sert de ses personnages fantastiques pour écrire une relecture intéressante de la Seconde Guerre mondiale.

Freaks Out se réfère également à la saga X-Men. Comme dans les comics cultes de Stan Lee, le long-métrage de Gabriele Mainetti aborde le génocide juif. Comme dans les histoires Marvel, l'artiste se concentre sur la Shoah et la déportation des juifs, par le biais des super-héros, mais de manière plus frontale. Ici aussi, ces personnages sont persécutés, pointés du doigt et isolés pour leurs pouvoirs, pour leurs différences, mais aussi parce que certains d'entre eux sont juifs. Une relecture habile du mythe des X-Men.

Terry Gilliam pour inspiration

Mais finalement, les influences les plus marquées ne sont pas du côté des comics et des super-héros. Avec Freaks Out, Gabriele Mainetti se réfère également beaucoup à des artistes confirmés comme Guillermo Del Toro, Terry Gilliam et Jean-Pierre Jeunet. La première partie dans la fête foraine, que ce soit par la mise en scène ou l'écriture presque identique, rappelle évidemment beaucoup le récent Nightmare Alley de Guillermo Del Toro.

Freaks Out
Freaks Out ©Metropolitan FilmExport

L'ambiance, les personnages, l’esthétique poétique et crasseuse mais aussi l'écriture à la fois féerique et dramatique renvoient énormément au cinéma de ces trois auteurs. Les pouvoirs décalés des personnages (magnétisme, contrôle des insectes, etc...) sont également soumis aux inspirations de Terry Gilliam et de ses successeurs. Le ton bizarre et fantastique s'inscrit totalement dans l'héritage de Terry Gilliam, et donc, a fortiori de celui de Guillermo Del Toro. Quant à cet étalonnage jaunâtre, difficile de ne pas faire la comparaison avec certaines des œuvres de Jean-Pierre Jeunet.

Une dernière partie éreintante

Dans toute sa première partie, il n'y aucun faux pas. Si Gabriele Mainetti convoque ses inspirations, il s'en affranchit également, proposant une vision personnelle et singulière qui se démarque de ses prédécesseurs. Freaks Out est un film extrêmement généreux, voir presque trop. Excessif, bruyant, parfois éreintant, Gabriele Mainetti a beaucoup plus de budget que lors de son premier film. Freaks Out est une œuvre plus aboutie que Jeeg Robot, et qui peut compter sur des effets spéciaux plus réussis, mais surtout plus nombreux. Et si, objectivement, Freaks Out est d'une qualité formelle supérieure à Jeeg Robot, c'est un film qui a paradoxalement un rythme moins précis.

Freaks Out
Freaks Out ©Metropolitan FilmExport

Gabriele Mainetti ne parvient pas à totalement doser sa dernière partie. 2h20, c'est un peu long pour Freaks Out, qui s'éternise dans un climax final très porté sur l'action. C'est bruyant, fatigant, et beaucoup trop épais pour ce que ça raconte. Alors oui, cette dernière partie est nécessaire pour l’émancipation de Matilda et l'acceptation de ses pouvoirs et de son statut d'élue, mais Gabriele Mainetti traîne en longueur dans une conclusion qui veut en mettre plein les yeux. Un dénouement qui vient proposer des séquences d'action redondantes, répétitives, qui manquent de créativité. Surtout, il met en scène une confrontation avec le grand méchant inévitable, téléphonée, grandiloquente, qui manque de subtilité et n'est pas forcément nécessaire (surtout que les personnages avaient l'occasion de se débarrasser de lui plus tôt dans le récit...). Cette conclusion, too much, abasourdira les plus spectateurs les plus exigeants.

Freaks Out de Gabriele Mainetti, en salles le 30 mars 2022. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Même si c'est un peu moins réussi qu'"On l'appelle Jeeg Robot", surtout à cause d'une dernière partie interminable et mal dosée, "Freaks Out" demeure une proposition intéressante et aboutie, qui offre une nouvelle dérivation agréable du genre super-héroïque au cinéma.

Note spectateur : Sois le premier