La Terre des hommes : les combats d'une agricultrice

La Terre des hommes : les combats d'une agricultrice

CRITIQUE / AVIS FILM – Dans "La Terre des hommes", Diane Rouxel incarne une agricultrice en difficulté financière, victime de l’emprise d’un grand exploitant. Un personnage complexe, superbement interprété, et dont le combat emporte le spectateur.

La Terre des hommes : un dilemme impossible

Deuxième long-métrage de Naël Marandin après La Marcheuse, La Terre des hommes plonge le spectateur dans l’exploitation de Bernard, un éleveur incarné par Olivier Gourmet. Alors qu’il est au bord de la faillite, sa fille Constance (Diane Rouxel) et son gendre Bruno (Finnegan Oldfield) ambitionnent de reprendre la ferme familiale.

Souhaitant se tourner vers un mode de production plus responsable, le couple monte un plan financier qui lui permettrait de se positionner face aux grands exploitants. Pour construire un dossier solide, Constance demande des conseils à l’un d’entre eux, Sylvain (Jalil Lespert). De passage dans le bureau de ce dernier pour parler des négociations, la jeune femme est victime d’un viol.

La Terre des hommes
La Terre des hommes © Ad Vitam Distribution

Constance se retrouve alors malgré elle face à un dilemme impossible : témoigner et renoncer injustement à son projet, ou garder le silence et continuer de subir l’emprise de Sylvain. Prisonnière de cette situation et confrontée à une violence sourde, elle voit peu à peu les portes se fermer, en plus d’encaisser les jugements des autres agriculteurs.

Seule contre tous

La Terre des hommes débute par un long traveling dans un marché à bestiaux. Un cadre représentatif des rapports de force évoqués tout au long du long-métrage. Au cours de cette introduction, Constance est immédiatement enfermée dans cet univers masculin mais apparaît sereine, malgré la fragilité financière à laquelle sa famille fait face. Depuis le poste de contrôle, Sylvain fait quant à lui valoir son autorité d’emblée, tandis que Bernard est marqué par l’inquiétude.

Naël Marandin construit plusieurs séquences autour de ces ventes durant le film, y compris lors du final. Elles deviennent ainsi des marqueurs de l’évolution des personnages, à mesure que les souffrances et difficultés se renforcent, ou s’inversent.

La Terre des hommes
La Terre des hommes © Ad Vitam Distribution

La caméra adopte dans ces scènes le regard de Constance, protagoniste marquante et superbement interprétée par Diane Rouxel. Totalement isolée après le viol et en proie à une culpabilité qui n’effleure jamais son agresseur, elle ne peut s’en remettre qu’à ses convictions. Seuls sa détermination et son courage lui permettent de s’extirper de moments oppressants. C’est par exemple le cas lorsque des confrères l’enferment dans un enclos alors qu’ils ne prennent pas sa version au sérieux, mais également quand Sylvain fait irruption dans sa vie, l’air de rien. Dans le rôle du coupable persuadé d’être une victime, Jalil Lespert est lui aussi parfait.

Un système écrasant

La Terre des hommes porte donc un regard acerbe sur un secteur ultra concurrentiel, dépeint sans complaisance et sentimentalisme exacerbé. Néanmoins, le long-métrage n’a pas la prétention de faire un état des lieux du secteur agricole français. Il s’attarde avant tout sur la manière dont cette petite exploitante tente de ne pas être noyée par des gros poissons, et ce malgré les sévices qu’elle subit. Ce traitement renforce la puissance émotionnelle du parcours de Constance, qui retrouve progressivement sa combativité sans jamais perdre son intégrité. Pour sortir la tête de l’eau et perdurer, son compagnon et elle n’ont cependant d’autre choix que de renoncer au moindre scrupule.

L’issue du film arrive d’ailleurs comme le dénouement d’un thriller où seule leur ruse compte. La trajectoire de la jeune femme et sa lutte, tout comme ses relations avec ses proches, débouchent sur une conclusion poignante, qui l’impose comme une véritable héroïne, comme l’était le personnage joué par Sally Field dans Les Saisons du cœur. Actuel, touchant et reposant sur une construction narrative solide, La Terre des hommes est une belle réussite.

La Terre des hommes de Naël Marandin, en salle le 25 août 2021. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Porté par la formidable Diane Rouxel, "La Terre des hommes" est un drame réussi qui impose une agricultrice prisonnière de son secteur cruel comme une véritable héroïne de cinéma.

Note spectateur : Sois le premier