Manhattan Stories : regard plein d'énergie sur une ville au charme intemporel

Manhattan Stories : regard plein d'énergie sur une ville au charme intemporel

CRITIQUE FILM - A l’instar des récents films de Noah Baumbach, "Manhattan Stories" dévoile une palette de personnages singuliers et attachants évoluant dans une ville tantôt cruelle, tantôt chaleureuse, dotée d’un charme intemporel.

Avec Manhattan Stories, Dustin Guy Defa parvient à retranscrire l’énergie de New York et ses habitants, sans en oublier leur douceur. Dans ce film choral, les personnages très attachants ne se croisent pas forcément. Ce procédé aurait pu déboucher sur un film à sketches redondants et prévisibles. Bien au contraire, le long-métrage est cohérent de bout en bout grâce aux points communs entre les différentes tranches de vie dévoilées.

Le spectateur fait notamment la connaissance de Claire, chroniqueuse judiciaire débutante qui découvre les méthodes douteuses de son rédacteur en chef. En parallèle, Benny apprend dès le réveil qu’il va enfin pouvoir mettre la main sur un vinyle quasiment introuvable de Charlie Parker. Avant de l’acheter, il doit néanmoins aider son coloc Ray, totalement déprimé après avoir fait un sale coup à son ex. Un peu plus loin se trouve Wendy, une étudiante blasée qui découvre que sa meilleure amie fait tout pour qu’elle ait un petit copain.

Une présentation rafraîchissante de New York

Il semble aujourd’hui difficile de réaliser une comédie new-yorkaise tant la ville ne cesse d’être exploitée au cinéma. Que ce soit dans un Martin Scorsese, un Woody Allen, un film d’action survitaminé comme Une journée en enfervoire même une comédie romantique sirupeuse, New York semble avoir été filmée sous toutes les coutures. Ce serait mal jugé une ville en perpétuel mouvement. Et de jeunes cinéastes l’ont parfaitement prouvé récemment. Julia Solomonoff s'est par exemple intéressée aux déboires d'un comédien argentin venu y tenter sa chance dans Nobody's Watching. Les frères Safdie ont de leur côté livré une vision singulière des bas-fonds new-yorkais avec Good Time. Benny Safdie joue d’ailleurs un petit rôle dans Manhattan Stories, proposition certes moins originale mais extrêmement rafraîchissante sur la manière de présenter la Grosse Pomme au cinéma.

Manhattan Stories : Critique du film de Dustin Guy Defa.
© Magnolia Pictures

Grâce à ses nombreux personnages, Dustin Guy Defa plonge son spectateur dans une multitude de lieux. Il l’emmène par exemple chez un horloger, interprété par le génial Philip Baker Hall, perturbé par une sombre histoire de meurtre. Il lui fait également découvrir les couloirs d’un disquaire dans lesquels les passionnés tentent de dénicher des perles introuvables.

Le cinéaste n’a aucunement besoin des sempiternels plans aériens pour rendre compte de l’énergie de Manhattan. Au contraire, au lieu de mettre en valeur ses gratte-ciels, il reste attaché au sol de la ville et aux innombrables interactions qui y ont lieu. Il filme notamment deux journalistes en quête d’informations croustillantes, une course-poursuite à vélo hilarante ou le rassemblement morbide autour d’un cadavre.

Certaines péripéties ont de quoi faire perdre le sourire dans Manhattan Stories. Pourtant, le spectateur rit souvent grâce à l’absurdité et l’énergie insufflées au récit. Grâce à ses personnages singuliers qui ne se laissent jamais abattre, le film s’avère même particulièrement réjouissant.

Une galerie de personnages attachants

Les plus beaux atouts de Manhattan Stories sont en effet ses protagonistes finement écrits et leurs interprètes. En quête d’une chose particulière, qu’elle soit concrète ou non, ils font tous des efforts pour y accéder. La trouvaille du vinyle tant convoitée représente à merveille cet état esprit.

Détestant fondamentalement l’escroquerie et le manque d’intégrité, Benny réagit avec fureur lorsqu’il réalise qu’il s’est fait arnaquer. Il se lance alors à la poursuite de l’homme qui profite de la candeur de passionnés. Déterminé lorsqu’il passe à l’action, Benny semble pourtant manquer d’assurance durant une bonne partie du film. A chacune de ses rencontres, il demande par exemple si la chemise qu’il porte est réellement appropriée à sa personnalité. Au fil de la journée, il gagne en confiance jusqu’à l’émouvante conclusion qui clôt le long-métrage sur une touche lumineuse.

Manhattan Stories : Critique du film de Dustin Guy Defa.
© Magnolia Pictures

Si Benny s’impose comme l’un des protagonistes les plus attachants de Manhattan Stories, notamment grâce à la performance de Bene Coopersmith, les autres personnages ne déméritent pas. A l'instar du mélomane, ils doivent tous franchir des obstacles plus ou moins ardus au cours de leur journée. Dustin Guy Defa va au bout de chaque histoire sans forcément les croiser.

Il émane cependant de Manhattan Stories une générosité commune à la plupart des protagonistes. Qu’ils soient silencieux, bavards, drôles ou tristes, ils réussissent tous à donner la banane au spectateur. La tendresse dont ils font preuve est parfois désarmante. Leur envie de réconciliation et leur besoin d'exprimer leurs sentiments finissent par l'emporter dans l'élan final très touchant.

Alliés à la mise en valeur d’endroits plus ou moins dissimulés, ces parcours font du film une charmante plongée dans les rues de New York. A la fin de la journée, le plus important reste la fête et le rassemblement. Ce besoin d’être uni, Dustin Guy Defa le transmet avec sobriété et humour, ce qui fait de ce petit film fort sympathique une jolie réussite.

 

Manhattan Stories, en salle le 16 mai 2018. Ci-dessus la bande-annonce.

Conclusion

Note de la rédaction

"Manhattan Stories" révèle tout le charme du New York que le réalisateur Dustin Guy Defa affectionne, et que l’on ne voit que trop peu au cinéma.

Sur la bonne voie

Note spectateur : Sois le premier