Mon chien Stupide : crise familiale sous contrôle

Mon chien Stupide : crise familiale sous contrôle

Avec Charlotte Gainsbourg, leur fils Ben Attal et l'histoire de "Mon chien Stupide" de John Fante, Yvan Attal réalise une comédie dramatique de bonne tenue. Il est très inspiré au moment d'explorer les déboires de la vie familiale et la crise de la cinquantaine, mais l'est moins au moment de donner de l'ambition artistique à son film.

Yvan Attal a cette manière particulière de faire du cinéma, en ce qu'il ne s'avance jamais complètement masqué. Le frontière entre la fiction et la réalité est très fine dans ses films, surtout dans la trilogie qu'il vient de conclure avec Mon chien Stupide, après Ma femme est une actrice et Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants. Avec Charlotte Gainsbourg dans le rôle de son épouse, et leur fils Ben Attal dans le rôle d'un de leurs enfants, le doute n'est pas permis sur le fait que le réalisateur adapte autant Mon chien Stupide de John Fante que sa vie familiale sur grand écran. Exhibitionnisme ? Auto-psychanalyse publique ? Ce qui peut déranger et être perçu comme un caprice bourgeois est aussi ce qui fait tout le sel du film.

Une histoire d'échecs, de famille et d'amour

Mon chien Stupide est l'adaptation du roman éponyme de John Fante, écrivain américain du 20ème siècle et par ailleurs scénariste reconnu du Hollywood des années 50. Une figure artistique torturée, avec une reconnaissance décalée de son oeuvre, et un maître du trouble entre l'auto-fiction et l'autobiographie. Du pain bénit pour Yvan Attal, qui s'est saisi de Mon chien Stupide pour, lui aussi, raconter une crise familiale génératrice d'examen de conscience. L'idée de base est simple : un chien débarque de nulle part dans une famille au bord de la crise de nerfs, et son arrivée va provoquer des événements qui vont matérialiser cette crise.

Mon chien Stupide - critique 

Yvan Attal déplace la maison de la côte pacifique sur la côte du sud-ouest français, et incarne Henri Mohen le père-narrateur plaintif, cynique et dépressif, qui ne fait pas grand chose d'autre que de constater l'échec de sa vie personnelle et familiale. Yvan Attal est parfait dans ce rôle, un écrivain une fois à succès et peu inspiré depuis, et tous les membres de la famille aussi. Sa femme Charlotte Gainsbourg, accro au vin blanc et aux anti-dépresseurs, ses trois enfants, tous enlisés dans leurs propres problèmes, Ben Attal, Panayotis Pascot et Adèle Wismes, font tous parfaitement le job. Le job de poils à gratter, puisque le problème de Henri/Yvan, c'est eux.

Le drame, un décor plus qu'une dynamique

Cette famille ne s'épargne rien, et c'est très drôle. Les repas sont épiques, les sujets sur la sexualité de chacun abordés entre les plats, les piques fusent et chacun y va de sa méchanceté dans un bordel assez plaisant. Trop beau ou trop cru pour être vrai, on se laisse facilement surprendre par cette comédie qui, par séquences, est réellement brillante.

Mais il manque quelque chose. Si la plongée dans l'univers dépressif du narrateur est accomplie, le film semble lui-même s'ennuyer par moments, avec une cinématographie assez pauvre, quand les sentiments et les sensations ne le sont pas. Il y a bien quelques jolis plans sur le visage de Charlotte Gainsbourg, mais par ailleurs la caméra semble s'être posée là sans trop réfléchir, indiquant qu'elle aurait pu être ailleurs pour le même résultat.

À mesure que le drame se joue, que les départs se font un à un, le cadre reste le même, et il aurait été au contraire intéressant d'accompagner formellement l'expérience d'Henri. L'humour noir règne en maître, mais les différentes tristesses du film sont comme superficielles, effleurées et finalement assez vite désamorcées.

Ainsi, Yvan Attal ne rate pas son propos, mais peut-être parce qu'il le joue à l'économie, créant une petite frustration sur les éclats qui n'arrivent jamais. Le même niveau de soin que celui apporté à sa dépression, source des séquences comiques comme dramatiques et élément central du film, aurait aussi été appréciable sur les autres aspects du film.

Mon chien Stupide, d'Yvan Attal. Au cinéma le 30 octobre. La bande-annonce ci-dessus. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Le talent d'Yvan Attal pour sa mise en scène semi-autobiographique fonctionne, avec quelques très jolies scènes. Mon chien Stupide est une comédie dramatique réussie, mais qui ne sort pas assez de son cadre pour retrouver le ton génial du livre dont elle est l'adaptation.

Note spectateur : 2.65 (2 notes)