Pupille : la parcours profondément touchant d’un enfant bien entouré

Pupille : la parcours profondément touchant d’un enfant bien entouré

CRITIQUE FILM - Deuxième film de Jeanne Herry, « Pupille » est l’un des coups de cœur de cette fin d’année. En nous immergeant dans le processus d’adoption d’un enfant né sous X, la réalisatrice présente une galerie d’individus extrêmement bien développés et prodondément attachants. Le film privilégie l’émotion pure et ne tombe à aucun moment dans un didactisme qui aurait plombé la puissance du récit. Il est par ailleurs porté par un formidable casting, à commencer par Sandrine Kiberlain, Élodie Bouchez et Gilles Lellouche.

Après Elle l’adore, Jeanne Herry change radicalement de registre avec Pupille, un drame très réussi et surprenant par de nombreux aspects. L’artiste arrogant et sa fanatique légèrement déséquilibrée du précédent film de la réalisatrice laissent ici place à une galerie de personnages tous plus touchants les uns que les autres.

Pupille est centré autour d’un bébé remis à l’adoption le jour de sa naissance. De l’accouchement à sa prise en charge par Alice, le film révèle tout ce processus et surtout les personnes qui lui permettent de fonctionner malgré les incertitudes, les erreurs et l’inquiétude.

Une histoire collective bouleversante

S’il n’y avait qu’un seul défaut à reprocher à Pupille, ce serait celui de sa mise en place immersive mais légèrement moins puissante émotionnellement que le reste du film. La méticulosité avec laquelle Jeanne Herry décrit les premiers jours du bébé est palpitante mais provoque une certaine distance avec le spectateur. Particulièrement douloureuse, l’épreuve de la séparation que traversent la mère et son enfant ne laisse pas forcément présager toute la luminosité du reste du récit.

De plus, il faut quelques minutes pour comprendre quel est le rôle de chacun des protagonistes, en particulier celui des membres du service d’adoption. Néanmoins, le recul imposé par l’exposition est nécessaire pour détailler de manière précise un processus long et laborieux.

Pupille : Critique du film de Jeanne Herry.

Sans jamais délaisser les démarches administratives et en réussissant même à les développer de façon très claire, Jeanne Herry préfère rapidement se concentrer sur tous ses personnages. Si elle ne met jamais de côté le parcours de Théo, la réalisatrice laisse évoluer les autres protagonistes dans leurs environnements respectifs, ce qui donne d’ailleurs au long-métrage toute sa force.

Les séquences de réunion, captivantes malgré la lourdeur de l’exercice, permettent par exemple de cerner les tempéraments de chacun des membres du service adoption. Les points communs qui les unissent sont la bienveillance envers le nouveau-né et le besoin de le placer dans la famille d’accueil la mieux adaptée à ses besoins. La cinéaste parvient à rendre ces traits de caractère souvent galvaudés totalement perceptibles, sans qu’ils ne résonnent à aucun moment de façon exagérée. Aidée par des comédiens totalement impliqués et tous excellents, la cinéaste révèle également leurs jugements dans ce long-métrage qui ne manque jamais de nuances.

En développant les personnages qui évoluent autour du bébé de manière équitable, Jeanne Herry fait également naître une magnifique énergie collective. Le spectateur aime s’attacher à ces individus et comprend à chaque séquence leur envie noble de mener à bien leur mission. Au plaisir de la découverte d’un sujet pourtant difficile à traiter s’ajoute ainsi une empathie totale aux personnes qui le font et lui permettent d’exister.

Un ton romantique totalement assumé

La grâce de cette énergie collective vient également du fait que Jeanne Herry parvient à rendre les trajectoires personnelles de ses héros passionnantes. Les rapports que Sandrine Kiberlain entretient avec les autres enfants du service adoption, ainsi que la superbe séquence où elle annonce à Théo qu’il a été abandonné, en disent énormément sur la bonté qu’elle dissimule habilement. Cette qualité, toujours mise en valeur avec pudeur, se ressent également à travers son amitié avec Gilles Lellouche, chargé de s’occuper du bébé provisoirement.

Pupille : Critique du film de Jeanne Herry

Ce dernier fait de son côté preuve d’un dévouement profondément touchant tout au long du film, que ce soit envers Théo ou sa future mère Alice, qu’il ne cesse de rassurer dans un dernier acte où tous les personnages rayonnent.

La maladresse d’Alice, chamboulée par les événements et l’adoption imminente, donne par ailleurs lieu à des scènes comiques réjouissantes. Alors qu’elle appuyait fort sur les poncifs de ses protagonistes dans Elle l’adore, Jeanne Herry garde ici une retenue qui fait que les émotions sonnent toujours justes. Ainsi, le spectateur prend un immense plaisir à découvrir la vie de la future maman à travers des flashbacks toujours dévoilés au bon moment. Il ressent pleinement sa fragilité, sa détermination et son besoin de retrouver l’amour, qui confère à Pupille un ton romantique parfaitement assumé.

Au-delà de la volonté de mettre en lumière un processus éminemment complexe, le long-métrage raconte avant tout les histoires de protagonistes auxquels on s’attache, et envers lesquels le processus d’identification est possible. À la fin du film, toute la distance que le spectateur ressentait au début s’est envolée et a laissé place à l’émotion pure, qui n’a cessé de s’accentuer sans que Pupille tombe dans la mièvrerie ou le didactisme. La justesse des tons et la superbe direction d’acteurs de Jeanne Herry impressionne. Avec ce deuxième long-métrage, la réalisatrice signe un drame maîtrisé de bout en bout, de son écriture à sa réalisation, parfaitement accordées pour révéler de très beaux personnages.

Pupille de Jeanne Herry, en salle le 5 décembre 2018. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Grâce à ses protagonistes justes et magnifiques, Pupille provoque l’émotion très rapidement pour ne plus lâcher son spectateur jusqu’à la fin.

Note spectateur : 0.85 (1 notes)