Tori et Lokita : une amitié poignante par les frères Dardenne

Lumineux et tragique

Tori et Lokita : une amitié poignante par les frères Dardenne

CRITIQUE / AVIS FILM – Trois ans après "Le Jeune Ahmed", les frères Dardenne sont de retour avec "Tori et Lokita". Drame qui entend dénoncer les injustices de la politique d’immigration, le long-métrage se focalise avant tout sur l’amitié qui unit deux personnages incroyablement attachants.

Tori et Lokita : un duo bouleversant

Le nouveau film des frères Dardenne débute avec un interrogatoire où, pour obtenir des papiers d’identité, la jeune Lokita (Joely Mbundu) raconte comment elle a rencontré son frère Tori (Pablo Schils), considéré comme un enfant sorcier au Bénin, avant qu’ils ne trouvent refuge dans un foyer en Belgique.

Le long-métrage expose d’emblée l’enfer administratif dans lequel les deux personnages sont enfermés, mais dévoile surtout immédiatement leur complicité et leur soutien mutuel à toute épreuve. Que ce soit face à l’homme qui les charge de vendre sa drogue, à l’individu qui leur a permis de rentrer dans le pays et les dépouille de leur argent ou aux clients qui leur achètent des stupéfiants, Tori et Lokita ne se démontent jamais. Et même s’ils n’ont aucun lien de parenté, les épreuves qu’ils ont traversées ensemble font qu’ils se connaissent par cœur.

Tori et Lokita
Tori et Lokita ©Diaphana Distribution

La mise en scène suggère la puissance de leur relation liée à leur passé commun, qui passe également par les performances incroyables des deux acteurs principaux. Le récit bascule lorsque Tori et Lokita se retrouvent séparés malgré eux. Et s’ils avaient toujours réussi à se tirer d’affaire en duo, leur besoin de se réunir va déclencher un terrible engrenage.

Un dispositif puissant qui s’effondre lors du final

Dans sa première partie, Tori et Lokita comporte à la fois la dureté de Rosetta et la douceur de Le Gamin au vélo. Une douceur qui évite au film de sombrer dans l’apitoiement, au même titre que l’attitude du tandem. S’ils devinent parfaitement les vices des adultes, les deux débrouillards redoublent sans cesse de roublardise et même s’ils subissent des atrocités, leur espoir l’emporte toujours, jusqu’au bout.

Dès lors qu’une tentative de fuite s’amorce, un suspense s’installe. Tori et Lokita vont-ils y arriver ? Haletant, le dernier acte se conclut sur une situation qui accentue la fatalité du récit, fait écho à la première scène et appuie uniquement par la réalisation le propos politique des frères Dardenne.

Tori et Lokita
Tori et Lokita ©Diaphana Distribution

Malheureusement, les cinéastes le plombent avec un épilogue qui n’était absolument pas nécessaire, qui vient fausser l’émotion en ajoutant des mots là où les images suffisaient. Plutôt que de laisser le spectateur abasourdi, les réalisateurs semblent vouloir le tenir par la main pour être sûrs que le message passe. C’était déjà le cas avant cette ultime scène, qui pourra finir de convaincre le public sceptique du caractère misérabiliste du long-métrage. Néanmoins, elle n’efface pas la qualité de tout ce qui précède.

Tori et Lokita de Jean-Pierre et Luc Dardenne, en salles le 5 octobre 2022. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces. Le film était présenté au Festival de Cannes 2022 en compétition officielle.

Conclusion

Note de la rédaction

Bouleversant récit d’amitié dans lequel les deux personnages ne perdent jamais l'espoir de voir leur condition s’améliorer, "Tori et Lokita" prend ensuite la forme d’une fuite haletante. Dommage cependant que la dernière scène vienne freiner la puissance émotionnelle du film…

Note spectateur : 5 (1 notes)