Jett : crimes sous palettes de couleurs

Jett : crimes sous palettes de couleurs

CRITIQUE / AVIS SÉRIE - Cinemax et le réalisateur Sebastian Gutierrez proposent avec "Jett" une relecture habile du polar en format série, tout en apportant au personnage de Carla Gugino le profil parfait de l'anti-héroïne.

Dans la catégorie des séries dont la réelle qualité est à déterminer au fil des saisons, Jett en fait sans doute partie. La nouvelle production de Cinemax - à qui on devait l'excellente série Quarry, malheureusement annulée en 2017 - s'associe à un cinéaste indépendant dont la révélation au grand public tarde : Sebastián Gutiérrez. Pour la première fois derrière la caméra pour un show télévisé (dont il réalise les cinq premiers épisodes), Gutiérrez s'amuse tellement qu'il semble presque dévoué à ce format. De nos jours, la série est plus que jamais un exercice à la mode. Une échappatoire au long format, qui permet l'établissement au long cours de personnages, d'intrigues, de désirs de mise en scène. Pour le coup, Jett en est un digne exemple, une œuvre d'auteur.

Dans la lignée de Ryan Murphy, notamment, Gutiérrez sucre son show d'une esthétique léchée au possible, presque pop. Le cinéaste s'était confié à l'occasion dans une interview pour le New York Post.

Visuellement, ce qui compte vraiment pour moi, c'est que le spectacle ne soit pas trop naturel (...) Le jeu en lui-même est très pragmatique, mais le show est très coloré et élégant. Je veux que mon gâteau soit mangeable, pulpeux, sexy, ludique et violent. Mais la violence a des conséquences.

 

La violence jusqu'au bout des ongles

Tout ce travail autour de la forme ne serait pas grand chose sans un casting de haute volée. Jett est ainsi littéralement incarnée par une Carla Gugino sombre et parfois sans pitié. Au début de cette première saison, Daisy "Jett" Kowalski, voleuse réputée, sort enfin de prison et se retrouve forcée à exercer à nouveau son métier pour des criminels (dont l'excellent Giancarlo Esposito, qui joue une espèce de Gus Fring - l'antagoniste mythique de Breaking Bad - totalement excentrique) qui se dévoileront dangereux pour elle et ses proches.

Tiens, justement, Jett officie dans le même sillon que la série de Vince Gilligan : dans le genre "anti-héro". Puisque Gugino construit peu à peu un personnage ultra contrasté, qu'il est difficile de réellement détester. Entre nostalgie de sa liberté et espionne redoutablement rodée, Daisy "Jett" va surtout à l'encontre des clichés du genre. Fidèle à ses principes, à sa propre méthode d'action, Jett n'est pas assoiffée de vengeance, elle n'a pas de raison particulière d'agir comme tel (si ce n'est enfin se délier de ce boulot, peut-être un jour, et s'occuper de sa petite fille). Ce "dernier coup", elle l'assure d'épisode en épisode, en contournant les retournements de situation et les nombreux coups bas (venant de personnages masculins, qui sont dans cette série tous délicieusement détestables).

Le reste du casting, notamment assuré par Elena Anaya (La Piel Qye Habito), Michael Aronov (The Americans), Gaite Jansen (Supernova), Christopher Backus (Among Friends), Gil Bellows (22.11.63), ou encore Violet McGraw (The Haunting of Hill House), étoffe la série de toutes parts, la rendant parfois même compliquée à suivre. Mais dans ce rôle parfait pour Gugino et cette intrigue dans les grandes lignes audacieuse (ce n'est pas tous les jours qu'une série d'espionnage est largement portée par des personnages féminins), Jett pourrait prendre davantage d'ampleur dans le final de sa saison 1 et, espérons le, dans son second round. À suivre...

Jett, créée par Sebastián Gutiérrez, sur Cinemas (US) et OCS à partir du 14 juin 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Un rôle dédié à Carla Gugino, une intrigue complexe mais passionnante, une réalisation soignée... "Jett" est une série plaisante à suivre, mais à qui il reste à faire ses preuves.

Note spectateur : 3.7 (13 notes)