Marianne : l'horreur à la française sur Netflix

Marianne : l'horreur à la française sur Netflix

CRITIQUE / AVIS SÉRIE - Netflix offre enfin à la France sa première production locale horrifique avec "Marianne". Est-il venu le temps où notre pays aura enfin LA série originale référence sur la plateforme ? On a pu voir une grosse partie des épisodes en avant-première et voici notre verdict.

Netflix aura longtemps gardé secrète l'existence de cette série. Soumise à la presse en avance, sans que le public ne se doute de quoi que ce soit, Marianne a directement été une source de curiosité. Parce que les séries françaises originales sur la plateforme sont rares et le peu à notre disposition est loin d'atteindre le niveau de ce qu'on voit en provenance d'autres nations. Mais également parce que Marianne est frontalement affilié à ce genre si particulier qu'est l'horreur. La France et le genre, l'équation reste éternellement compliquée, quand bien même quelques belles réussites nous font penser que l'existence de cette forme de cinéma est possible. Ce n'est que dernièrement, une poignée de jours avant sa mise en ligne, que Netflix a enfin montré aux abonnés le premier aperçu de cette création signée Samuel Bodin. Une bande-annonce qui misait, à raison, sur les éléments étranges de son récit.

Marianne met en scène Victoire Du Bois dans la peau d'Emma, une jeune romancière qui a accédé à la célébrité grâce à ses bouquins d'horreur. Arrivée au bout d'un processus créatif, elle annonce lors de la sortie de son nouvel ouvrage qu'elle change de direction dans sa carrière et veut explorer d'autres univers. Au même moment, une ancienne connaissance de sa ville natale vient à sa rencontre avec des intentions inquiétantes. Emma va se rendre compte que les événements relatés dans ses romans prennent vie et qu'une étrange histoire de sorcellerie se compose autour de sa personne. Elle va revenir là où tout à commencer et tenter d'endiguer l'émergence d'un mal menaçant.

Une série d'horreur qui fait peur...

Comme souvent lorsqu'on parle d'horreur, il serait dommage de trop s'étendre sur la nature des éléments horrifiques pour ne pas gâcher leur utilisation. La série ne déborde pas d'originalité dans les figures qu'elle convoque mais vise une forme d'efficacité avant tout pour nous placer sous tension. Et sur le terrain de l'horreur, elle réussit admirablement bien à nous procurer quelques sueurs froides. Grâce à une bonne gestion du tempo, du cadrage et grâce à une ambiance de très bonne facture, Marianne veut faire mal à chaque fois qu'elle entreprend de nous faire peur. Quand certaines scènes flirtent simplement avec l'inquiétant, d'autres, souvent de nuit ou dans une atmosphère sombre, ont le pouvoir de nous placer dans l'inconfort.

Il y a celle du cauchemar dans le premier épisode qui, avec peu, joue sur des peurs enfantines. Une porte qui grince, un parquet bruyant, une main capable de vous attraper le pied s'il dépasse du lit. Marianne a cette force, qui rappelle un peu le cinéma de James Wan, pour provoquer des émotions alors qu'on sait à l'avance qu'il va/peut se passer une chose. L'une des parfaites illustrations étant ces scènes dans la maison des parents d'Emma, avec l'assistance. Son passage nocturne aux toilettes a tout du parfait contexte pour que l'horreur s'immisce. Pourtant, quand cela arrive, ça fonctionne.

... gâchée par des soucis d'écriture

Irréprochable dans ses purs moments de tension, la série se traîne quand même des carences lourdes qui viennent fragiliser la barque. L'écriture, précisément, démontre des faiblesses. Le personnage d'Emma reste assez superficiel, à la croisée des chemins entre l'adolescence et le monde des adultes. Son caractère prétendument volcanique n'en fait pas une héroïne que l'on a envie de suivre, et ce même lorsque son passé vient expliquer son trauma. Tout comme son assistante, cliché intégral de la jeune parisienne qui veut réussir dans un milieu où le copinage règne. On ne manquera pas aussi de souligner ce rôle d'inspecteur offert à Alban Lenoir, sorte de geek dépassé par les événements qui s'empiffre de musique celtique. Le moment où il demande à Emma des autographes, et que celle-ci négocie une perquisition en échange, n'est qu'une des nombreuses mauvaises idées du scénario. Aussi minimes peuvent-elles être dans le cadre général de l'intrigue, elles discréditent un ensemble qui se veut sérieux. L'utilisation générale de l'humour ne fonctionne jamais et Marianne aurait gagné à ne pas essayer de se donner des airs cools par ce prisme.

Les acteurs n'ont pas grand chose à se reprocher pour le coup avec la matière à leur disposition. Si on aime bien des gens comme Victoire du Bois ou Alban Lenoir, les contours de leurs rôles respectifs ne rendent pas justice à leurs capacités. Celle qui s'en sort le mieux dans Marianne est sans conteste Mireille Herbstmeyer, dérangeante en vieille femme démoniaque. Chacune de ses apparitions fait mouche, instaurant le malaise. Probablement parce que son jeu n'est pas parasitée par du comique inutile et qu'elle a cette folie à défendre.

Une demi-réussite

Marianne assume avec les honneurs son appartenance au genre, sur des terres où l'horreur a plus souvent déçu que comblé nos attentes. La sincérité de la série aurait mérité une meilleure armature narrative pour que ses belles qualités soient sublimées. Il manque à Marianne cet impact viscéral dans le pur drame, à la manière de The Haunting of Hill House, pour que l'horreur épouse l'émotion, renforçant conjointement ces deux strates. La peur se met ici au service du divertissement plus que de thèmes forts, nous faisant suivre la série sans s'impliquer personnellement dans les événements sous nos yeux. Avec une telle force de frappe, on ose imaginer, par peur de ressentir de lourds regrets, à côté de quelle merveille nous sommes passés, si un scénario plus robuste avait maintenu l'édifice.

Marianne créée par Samuel Bodin, sur Netflix à partir du 13 septembre 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Efficace dans ses scènes d'horreur, Marianne présente trop de manques dans l'écritures pour impliquer le public comme il se doit. Une déception.

Note spectateur : 2.53 (58 notes)