De Gaulle : quand le cinéma raconte la plus belle histoire d'amour du général de Gaulle

« Que la famille »

De Gaulle : quand le cinéma raconte la plus belle histoire d'amour du général de Gaulle

En 2020, Lambert Wilson incarne Charles de Gaulle dans "De Gaulle" de Gabriel Le Bomin, film historique et biopic qui prend le parti de montrer l'homme plutôt que le mythe, l'amoureux et père de famille avant l'homme d'État. Et à cette fin, il montre avec brio et une grande douceur la relation entre Charles et sa fille trisomique Anne.

De Gaulle, l'humain avant l'homme d'État

L'histoire de la France au XXe siècle est indissociable de la grande figure du général de Gaulle. Il peut paraître étrange qu'il ait été si peu représenté et exploré au cinéma, mais c'est qu'il serait très complexe de le réduire à une de ses différentes dimensions. Militaire, résistant, premier président de la Ve République, écrivain, Charles de Gaulle existe surtout dans l'association permanente de ces identités, qui en font le modèle exemplaire de l'homme d'État français.

De Gaulle
Charles de Gaulle (Lambert Wilson) - De Gaulle ©SND

Mais raconter l'homme d'État n'est pas l'objectif de Gabriel Le Bomin et de Lambert Wilson, le réalisateur et l'acteur principal de De Gaulle, qui entreprennent dans ce biopic et film historique sorti en mars 2020 de montrer le général de Gaulle dans sa dimension la plus intime : celle de l'amoureux d'Yvonne (Isabelle Carré), du père de famille, de l'homme empli de doutes et de faiblesses, dans la période qui précède son entrée en résistance et le célèbre appel du 18 juin 1940 (notre critique ici, notre interview des comédiens ).

Et sans voyeurisme, sans indiscrétion, avec une grande pudeur, De Gaulle fait une place importante à la relation qu'avait Charles de Gaulle avec sa fille trisomique, Anne.

Quand Yvonne et Charles de Gaulle refusaient la séparation

Les auteurs du film auraient pu faire l'impasse sur ce sujet. Mais ils ont pris au contraire la décision d'explorer la personnalité de leur personnage principal par le prisme de son rapport à Anne, née en janvier 1928 et décédée en  à Colombey-les-Deux-Églises.

Atteinte de trisomie 21 - anomalie chromosomique à l'époque encore méconnue -, on voit ainsi dans un des flashbacks de De Gaulle que ses parents ont immédiatement refusé le placement dans un centre, pour rester vivre en famille, avec les deux autres enfants, Philippe et Elisabeth.

De Gaulle
De Gaulle ©SND

Une décision audacieuse à l'époque, où cette maladie était tue, mal perçue, dissimulée, honteuse. Comme un fil rouge, De Gaulle montre ainsi l'amour et la pureté de la relation entre le père et sa fille. Les proches de Charles de Gaulle et les membres de sa famille ont ainsi toujours raconté que celui-ci, sobre et retenu dans ses relations, se montrait à l'inverse tendre et extraverti avec Anne, ce que suggèrent aussi les flashbacks du film.

Des difficultés mais des "moments de vérité exceptionnels"

Dans le film, on voit Anne à trois âges différents, entre 6 mois et douze ans. Pour l'interpréter à douze ans, c'est avec la jeune Clémence Hittin que l'équipe du film a travaillé. Peu avant la sortie du film, Isabelle Carré nous avait raconté la particularité de cette collaboration et les difficultés rencontrées durant le tournage.

Pour travailler avec Clémence, il fallait tout le temps s’adapter, parce qu’elle n’apprenait pas le texte et ne pouvait pas facilement rester à la même place. Parfois elle voulait, puis elle ne voulait plus, il fallait alors improviser. Elle savait qu’elle avait une scène de révolte, où elle devait dire « non, non, non ». Sa maman lui avait raconté l’histoire, et elle avait retenu cette scène, les autres beaucoup moins. Donc elle voulait toujours jouer cette scène. Alors, on commençait toujours par la rejouer, puis on parvenait à la faire changer d’avis et l'emmener vers une autre scène.

Pour les enfants trisomiques, la notion du temps est compliquée, comme l'est la notion de mensonge. Si elle se jette dans les bras de Lambert, c’est vraiment qu’elle s’y jette, avec une affection authentique. C’est compliqué à organiser sur le tournage, mais ça donne des moments de vérité exceptionnels.

La reprise d'un cliché célèbre

Contraints de composer avec cette part de non-jeu, les comédiens et le réalisateur parviennent à sublimer cette contrainte et livrer ainsi une authenticité qui fait la chair de l'incarnation de Lambert Wilson. Un autre flashback du film montre d'ailleurs dans une séquence la prise d'une célèbre photographie (en tête d'article).

Charles et Anne de Gaulle en 1933
Charles et Anne de Gaulle en 1933 ©Wikipedia

Une photographie sur laquelle le film prend une liberté, puisqu'il imagine que c'est Yvonne qui la prend, alors que son auteur est inconnu. Un pas de côté dans la fiction mais qui sert le projet du film, celui de montrer l'amour indéfectible qui unissait la famille de Gaulle.

De Gaulle se conclut lorsqu'enfin Yvonne et les enfants de Gaulle rallient Londres, le 19 juin 1940. En février 1948, Anne décède et ses parents fondent la Fondation Anne-de-Gaulle, destinée à accueillir de jeunes femmes handicapées mentales. Selon le diplomate et écrivain Pierre de Boisdeffre, auteur de De Gaulle malgré lui, à la mort d'Anne, Charles de Gaulle aurait saisi le bras de sa femme et murmuré : "Maintenant, elle est comme les autres."

Décédé le 9 novembre 1970, Charles de Gaulle est enterré aux côtés de sa fille à Colombey-les-Deux-Églises.