Inside Man : Notre interview de Spike Lee, le rebelle d'Hollywood !

Inside Man : Notre interview de Spike Lee, le rebelle d'Hollywood !

Après avoir analysé les relations entre communautés aux Etats-Unis, non sans soulever des polémiques, le « rebelle d'Hollywood » tel qu'il se surnomme revient avec un film d'action : Inside Man. Pour la promotion, le réalisateur américain s'est rendu à Paris. Il répond à nos questions de commeaucinéphiles, sans s'encombrer de réponses fleuves, mais sans perdre son sens de l'humour…

Quelques mots sur le scénario et le tournage…
« Ce qui m'a plu dans le script ? J'ai aimé les personnages, l'intelligence de l'écriture et les bons dialogues. J'ai su aussi qu'avec la qualité du scénario, je pouvais avoir le casting que je souhaitais : Denzel, Jodie, Clive, Christopher Plummer… »
Pourquoi avoir choisi une nouvelle fois Denzel Washington, après Mo'better blues, Malcom X et He got Game ?
« Parce que c'est actuellement le meilleur acteur du monde ! C'est toujours une joie de travailler avec lui, il continue de me surprendre. Je partage beaucoup de choses avec lui. Nous avons le même âge, nous avons grandi tous les deux à New York, nous savons ce que c'est d'être un Afro-Américain à Hollywood. Et nous aimons tous les deux ce que nous faisons ! »
Et pourquoi Jodie Foster ? »

« Elle était l'actrice idéale. On souhaite toujours la personne parfaite pour un rôle, voilà pourquoi je l'ai choisie. »
Elle est aussi réalisatrice, cela a-t-il eu une influence dans vos rapports ?
« Non, c'est la même chose que Denzel qui est également réalisateur. Je ne me suis jamais posé la question durant le tournage. »

New York New York...
New York est omniprésent dans votre filmographie…
« Je suis un New-Yorkais ! Je n'ai pas envie de tourner ailleurs. J'ai envie de parler de cet endroit où je suis né, où j'ai grandi. »
Quel genre d'enfant étiez-vous ? Vous vous imaginiez déjà réalisateur ?
« Non, j'ai voulu être cinéaste au collège. »
Quelles répercussions ont eu les attentats du World Trade Center sur la ville ?
« Elle ne pourra jamais oublier ce qui s'est passé. Tout le monde craint que cela puisse se reproduire. Et ce n'est pas improbable. Mais sous quelles formes ? Des armes chimiques ? Personne ne sait. »
Vous dénoncez dans le film le racisme contre les musulmans d'après le 11 septembre…
« Oui, beaucoup d'Américains ne font pas la différence entre un Sikh ou un Arabe. Toute personne qui porte un turban est un terroriste potentiel. Vous, vous êtes une kamikaze ! De quelle origine êtes-vous ? »
Indienne…
« Ah ah ! (rires) Vous avez le profil parfait ! Savez-vous que la chanson du générique du film est extraite de Dil Se »

Spike Lee face à la violence
Que pensez-vous du milieu du gangsta-rap ?
« Je n'aime pas la violence du gangsta-rap. Je la dénonce dans le film d'ailleurs. Mais je reste mesuré quant à l'influence du cinéma pour faire changer les mentalités. J'étais convaincu par exemple que Bush, après le 11 septembre, la guerre en Iraq et les campagnes contre lui, ne pouvait être réélu. J'étais persuadé qu'il perdrait. Mais j'ai eu tort. »
Vous avez suivi l'actualité en France lors des émeutes en banlieues ?
« Bien sûr, le monde entier en a entendu parler. C'est amusant car quand je venais à Paris, les journalistes français m'interrogeaient sur les relations entre les différentes communautés, tout en se disant : « Nous ici, nous n'avons pas de tel conflit. » Donc quand tout ceci est arrivé, j'ai pensé à ces journalistes ! Et maintenant, ce sont vos étudiants… »

Hollywood et Spike Lee
The Inside Manest un film de major. Avez-vous pu tourner comme vous le souhaitiez?
« Oui, ce n'est pas ma première expérience à Hollywood ! C'est ma sixième réalisation pour Universal Pictures. Mon film n'a pas coûté très cher. Ils laissent généralement faire ce que l'on veut si on ne dépasse pas le budget et celui-ci n'en a pas demandé beaucoup. J'ai été très économique ! »
Comment êtes-vous perçu à Hollywood ?
« Comme le rebelle d'Hollywood ! Le fauteur de trouble…Est-ce que c'est vrai ? Je ne sais pas ! »
Mais ne pensez-vous pas qu'avec The Inside man, vous avez fait un film moins politiquement incorrect que les précédents, plus calibré ?
« Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Selon moi, les films politiquement corrects ne font pas la différence entre des Russes et des Albanais, ne dénoncent pas le racisme de cette façon. J'ai d'ailleurs ajouté la scène entre le Sikh et les policiers. »

Effectivement, quand on le titille, Spike Lee n'a pas perdu de sa verve. Les Grands Studios n'auront pas assagi le fauteur de trouble de l'industrie du cinéma américain et c'est tant mieux.

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Propos recueillis par Samya Yakoubaly - (Paris, mars 2006)