Trois ans après être devenu une star grâce à "La Grande évasion", Steve McQueen porte un autre film de guerre, "La Canonnière du Yang-Tsé". Une expérience éprouvante pour l'acteur, ainsi que pour le réalisateur Robert Wise et toute l'équipe du long-métrage...
La Canonnière du Yang-Tsé : un navire pris dans la guerre civile
Réalisateur à l'aise dans le drame (Nous avons gagné ce soir, Marqué par la haine), la comédie musicale (West Side Story, La Mélodie du bonheur), la science-fiction (Le Jour où la Terre s'arrêta), le film noir (Le Coup de l'escalier) ou encore l'épouvante (La Maison du diable), Robert Wise signe un long-métrage extrêmement ambitieux avec La Canonnière du Yang-Tsé. Sorti en 1967 en France, le film de guerre se déroule plus de quarante ans plus tôt, en 1926. Alors qu'il remonte le fleuve Yang-Tsé, le San Pablo se retrouve pris au coeur de la guerre civile chinoise opposant nationalistes et communistes.
Un conflit dans lequel se retrouve impliqué l'équipage de la canonnière américaine, composé notamment du mécanicien rebelle Jake Holman (Steve McQueen), du capitaine Collins (Richard Crenna) ou encore du marin Frenchy Burgoyne (Richard Attenborough). Candice Bergen, Emmanuelle Arsan, Mako et Larry Gates complètent la distribution de La Canonnière du Yang-Tsé, récit épique sublimé par des plans larges somptueux, des histoires d'amour tragiques et des scènes violentes particulièrement marquantes.
S'il repart bredouille de la cérémonie des Oscars en 1967, le long-métrage est nommé dans huit catégories, dont celles de Meilleur film et Meilleur acteur pour Steve McQueen. Le personnage de Jake Holman est d'ailleurs l'unique rôle pour lequel la star de La Grande évasion et Bullitt est nommé. Une reconnaissance qui survient à la suite d'un tournage épuisant, pour le comédien ainsi que pour toute l'équipe.
Une expérience éprouvante pour Steve McQueen
Organisée à Taïwan et à Hong Kong, la production de La Canonnière du Yang-Tsé implique plus de cent personnes et la construction de décors imposants. Alors que les prises de vues sont censées se dérouler sur 80 jours, elles s'étalent finalement sur sept mois, d'après l'ouvrage Steve McQueen - Portrait of an American Rebel de Marshall Terrill. Le tournage prend du retard dans un contexte particulièrement tendu entre Taïwan et la Chine.
Robert Wise doit notamment attendre plusieurs semaines la marée haute pour faire accoster le San Pablo sur la rivière Keelung. Une fois que cette situation est réglée, la saison des pluies commence. Figurant sur le film, Steve Ferry se souvient :
Pendant trois semaines, la pluie nous a mis à l'arrêt, mais nous avons tout de même été payés.
Pour tromper l'ennui, il s'amuse comme il peut avec Steve McQueen :
Nous avons passé beaucoup de temps ensemble. Nous étions tous coincés sur un petit bateau et nous nous amusions comme nous pouvions : jouer, plonger, nager...
L'interprète de Jake Holman observe par ailleurs les habitants de Taïwan, un endroit où "tout est différent" selon lui. L'acteur a un véritable choc culturel et est impressionné par les méthodes de travail locales. Avec son épouse Neile Adams, il se rend par ailleurs dans un orphelinat pour jeunes filles, qui sont pour la plupart des prostituées. Bouleversé, Steve McQueen aurait fait un don de 25 000 dollars à l'établissement et aurait continué à lui faire parvenir de l'argent et des biens après être rentré aux États-Unis. N'étant pas habitué à manquer une journée de tournage, les choses se compliquent davantage lorsqu'il doit s'absenter plusieurs jours à cause d'une grippe sévère.
"Tout ce que j'ai pu faire de mal, je l'ai payé à Taïwan
Une fois le tournage bouclé avec trois mois de retard, Robert Wise assure que La Canonnière du Yang-Tsé a été le projet le plus difficile à mener de sa carrière. Steve McQueen déclare quant à lui :
Tout ce que j'ai pu faire de mal, je l'ai payé à Taïwan. J'espère juste que quelque chose de bien en sortira.
Neile Adams affirme à propos de l'expérience vécue par le comédien :
Je ne l'ai jamais vu travailler aussi dur ou s'ennuyer autant que pendant ces six mois à Taïwan. Au moment où nous sommes arrivés à Taïwan, il n'en pouvait plus. Il avait hâte de rentrer à la maison.
Au point que Steve McQueen aurait embrassé le sol américain à son arrivée.