Terrence Malick a coupé de nombreuses scènes au montage de "La Ligne rouge", dont celles centrées sur Adrien Brody. Pensant être le personnage central, l'acteur a très mal vécu sa découverte du film.
La Ligne rouge : les anges et les diables de Guadalcanal
Vingt longues années séparent les sublimes Les Moissons du ciel et La Ligne rouge, deux sommets du trop rare et très précieux Terrence Malick. Après s'être interrogé sur la notion de libre arbitre en se focalisant sur un couple de tueurs dans La Balade sauvage, puis sur les frustrations liées à la pauvreté et l'ascension sociale avec Les Moissons du ciel, le cinéaste poursuit son cheminement spirituel avec son film de guerre.
Sorti en 1999, La Ligne rouge se déroule en 1942, pendant la bataille de Guadalcanal. Le long-métrage dresse le portrait de plusieurs militaires américains. Parmi eux, le lieutenant-colonel Gordon Tall (Nick Nolte) n'hésite pas à envoyer ses hommes à la mort, ce qui contraint le capitaine James Staros (Elias Koteas) à refuser certains de ses ordres. Le soldat pacifiste James Witt (Jim Caviezel) est quant à lui réprimandé pour avoir déserté par le sergent Edward Welsh (Sean Penn), héros de guerre complètement résigné qui refuse le statut que ses frères d'armes lui attribuent.
Différents destins embarqués dans le même enfer, partageant leur vision de la mort, du devoir, de la douleur, de la peine et de la peur. Leurs voix se succèdent dans des monologues bouleversants et finissent par ne former qu'une "âme commune". Grâce à de magnifiques plans de la nature foisonnante, ou encore d'une rencontre entre le militaire joué par John C. Reilly et un Mélanésien, le film rappelle surtout que l'homme appartient au monde, et non l'inverse.
Plusieurs comédiens coupés au montage
Ben Chaplin, Woody Harrelson, John Cusack, Jared Leto, John Travolta, George Clooney, Miranda Otto ou encore Nick Stahl complètent la distribution phénoménale de La Ligne rouge. Certains des acteurs comme Adrien Brody voient leur temps de présence à l'écran être minime par rapport à leurs attentes. D'autres sont complètement coupés au montage, comme Mickey Rourke, Bill Pullman et Lukas Haas.
En 2005, Mickey Rourke assure qu'il estime avoir livré l'une de ses meilleures performances dans le long-métrage. Le comédien déclare (via contactmusic.com) :
Ça fait partie des meilleures choses que j'aie jamais faites. J'ai été coupé du film pour des raisons politiques. Ça m'a vraiment bouleversé. Je traversais une très mauvaise période et Terry le savait donc il a incorporé ça dans mon personnage. Ça fonctionnait vraiment bien. Mais à cause de mes rapports avec l'industrie, mes scènes ont été coupées.
Adrien Brody amer
Pour Adrien Brody, c'est également la désillusion. Jusqu'au moment de découvrir le résultat final, l'acteur est persuadé d'être le personnage central. Mais à la table de montage, Terrence Malick lui préfère celui incarné par Jim Caviezel. Avant la consécration grâce à son interprétation dans Le Pianiste, l'acteur espère pouvoir se faire une place dans l'industrie grâce à La Ligne rouge et s'implique énormément, ce qui explique sa profonde déception.
En 2001, Adrien Brody se souvient (via IndieWire) :
La pression sur ce film était que je devais le porter avec un casting de stars que j'admirais vraiment, Nick Nolte et Sean Penn en particulier. Vous pouvez entendre des histoires horribles sur Sean Penn, qu'il peut être un véritable enfoiré s'il n'admire pas votre travail. (...) J'étais tellement concentré et professionnel, j'ai tout donné pour ne rien recevoir. (...) C'était extrêmement désagréable parce que j'avais déjà commencé la promotion d'un film dans lequel je n'étais pas vraiment. Terry a changé tout le concept du film. Je n'avais jamais rien vécu de tel...