Dans "La Ruse", des officiers du service de renseignement britannique tendent un piège aux forces allemandes pour que des Alliés puissent débarquer en Sicile. Un épisode longtemps oublié mais important de la Seconde Guerre mondiale, qui a permis de sauver de nombreuses vies.
La Ruse : de la désinformation en pleine Seconde Guerre mondiale
Réalisateur de L'Affaire Rachel Singer, John Madden revient au thriller d'espionnage en 2022 avec La Ruse. Le cinéaste réunit un casting prestigieux pour ce long-métrage se déroulant en 1943. Dans le film, Colin Firth, Kelly Macdonald, Matthew Macfadyen, Penelope Wilton et Jason Isaacs mettent en place une opération de désinformation pendant la Seconde Guerre mondiale.
Plusieurs membres du service de renseignement de la marine britannique, sous les ordres de l'amiral John Henry Godfrey (Jason Isaacs), effectuent un stratagème pour duper les forces allemandes. Leur plan est parfaitement pensé mais de nombreux imprévus viennent le perturber et mettent en péril des milliers de vies.
Une mission extrêmement périlleuse à laquelle participe notamment Ian Fleming, le créateur de James Bond incarné par Johnny Flynn. Le long-métrage débute au moment où l'équipe menée par les officiers Ewen Montagu (Colin Firth) et Charles Cholmondeley (Matthew Macfadyen) attendent impatiemment de savoir si leur subterfuge a fonctionné.
Détourner l'attention de l'ennemi
Restée méconnue pendant de nombreuses années et baptisée Mincemeat, que l'on peut traduire par "chair à pâté", l'opération a été un succès et a joué un rôle dans la victoire par étapes des Alliés. Pour tromper les Allemands, le service de renseignement de la marine britannique se sert du cadavre d'un Gallois, volontairement lâché en pleine mer non loin des côtes espagnoles. L'objectif de cette manoeuvre est de détourner le regard de l'ennemi de la Sicile. L'île représente alors un moyen d'imposer en Méditerranée les forces alliées se trouvant en Afrique du Nord, ainsi qu'une porte d'entrée vers l'Europe.
De faux documents confidentiels sont dissimulés dans les vêtements du défunt et annoncent une invasion prochaine de la Grèce. Décédé à cause d'un empoisonnement à la mort aux rats, l'individu mort est renommé William Martin par l'équipe de Montagu et Chomondeley. Il devient major des Royal Marines et dévoile un peu trop d'informations dans ses courriers à sa fiancée Pam. Il faut attendre 1996 pour que sa véritable identité, Glyndwr Michael, soit dévoilée.
L'idée de larguer un corps en pleine mer près de l'ennemi provient d'un roman policier de Basil Thomson, que Ian Fleming avait lu. Assistant de l'amiral Godfrey, le futur inventeur du plus célèbre espion au service de Sa Majesté soumet cette idée ingénieuse retenue par Ewen Montagu et Charles Cholmondeley.
"L'opération Mincemeat a fait une énorme différence"
Les Allemands tombent dans le piège mais les officiers britanniques n'ont d'autre choix que d'attendre le 9 juillet 1943 pour le vérifier. Lorsque les Alliés débarquent sur les côtes siciliennes, les forces ennemies sont peu nombreuses, ce qui prouve que la fameuse ruse a bien marché. Des milliers de soldats canadiens, britanniques et américains peuvent ensuite continuer à investir l'île pendant un mois.
Interrogé par le Los Angeles Times en mai 2022, Ben Macintyre, auteur de l'ouvrage Operation Mincemeat - L'histoire qui changea le cours de la Seconde Guerre mondiale sur lequel le film se base, explique :
Il est très rare que l'espionnage fasse une grande différence mais l'opération Mincemeat a fait une énorme différence. Et sans elle - impossible de calculer - mais de nombreuses vies auraient été perdues sur les plages siciliennes, y compris des vies américaines.
Un premier film sorti en 1956
En 1953, Ewen Montagu consacre l'ouvrage The Man Who Never Was. Trois ans plus tard, Ronald Neame (L'Ombre du passé, L'Aventure du Poséidon) adapte son récit à l'écran avec L'Homme qui n'a jamais existé. Porté par Clifton Webb, qui prête ses traits à l'officier, le long-métrage est présenté au Festival de Cannes et remporte le BAFTA du Meilleur scénario.
Ce film s'écarte de La Ruse en adoptant également le point de vue de l'ennemi. Après avoir découvert le corps de William Martin, les Allemands chargent un de leurs espions, Patrick O'Reilly (Stephen Boyd), de vérifier l'authenticité de son identité, ce qui n'arrive pas dans le long-métrage de John Madden. O'Reilly tente par la suite de tendre un piège aux Britanniques, dans lequel Montagu parvient à ne pas tomber grâce à son instinct.