Laure Calamy (Les Cyclades) : "Magalie c'est la Salsa, Blandine le Requiem de Mozart"

Laure Calamy (Les Cyclades) : "Magalie c'est la Salsa, Blandine le Requiem de Mozart"

Dans la comédie "Les Cyclades", Laure Calamy et Olivia Côte interprètent deux meilleures amies d'enfance aux caractères bien opposés, qui se retrouvent trente ans plus tard. Rencontre avec deux actrices aussi surprenantes et drôles que leurs personnages.

L'amitié folle de Magalie et Blandine

La comédie Les Cyclades de Marc Fitoussi est l'occasion pour Laure Calamy et Olivia Côte, meilleures amies à l'écran comme à la ville, de s'éclater dans un buddy movie solaire. À voir Magalie (Laure Calamy) et Blandine (Olivia Côte) renouer leur amitié d'enfance, on rit beaucoup et on s'émeut aussi, de cette histoire dont la légèreté cache ça et là des gravités touchantes. On les a rencontrées pour parler de cette comédie, et elles ont vite pris le contrôle de l'entretien. Enfin, le contrôle... Retranscription d'une rencontre unique avec deux actrices en forme.

Votre alchimie dans Les Cyclades est lumineuse. Vous semblez, en tant que comédiennes, vous connaître par coeur...

Olivia Côte : Oui, ça fait maintenant 20 ans qu’on se connaît...

Laure Calamy : À chaque fois tu rajoutes cinq ans ! (rires)

O. C. : Désolé mais on avait 28 ans et là on a… 48. On est obligées d’y arriver mais ce sont de beaux âges, Laure.

L. C. : Oui mais bon on n’est pas obligées de le dire, c’est bien de laisser les gens se projeter…

O. C. : On se voit grandir, vieillir, mûrir, s’embellir, s’améliorer, et c’est un spectacle enthousiasmant !

Magalie (Laure Calamy) - Les Cyclades
Magalie (Laure Calamy) - Les Cyclades ©Memento Distribution

L. C. : On partage l’excès, l’envie de se vautrer dans le ridicule, le grotesque. C'est notre passion partagée. Aller trop loin, jusqu’au malaise.

O.C. : C’est vrai qu’on a ça, et ce n’est qu’à nous, on adore nos autres amis mais ça c’est vraiment notre truc. On s’aime évidemment pour d’autres raisons, on se trouve intellectuellement extrêmement brillantes et très agréables à regarder (rires). En réalité, on s’hystérise un peu toutes les deux, quand on est ensemble. On nous dit souvent : « calmez-vous ».

Donc, à vous entendre Olivia, c'est vous qui avez eu le plus de travail pour votre personnage de Blandine dans Les Cyclades.

O. C. : Je ressentais comme une camisole de force, pour neutraliser le « volcan » (rires). Blandine dans Les Cyclades une femme dans la retenue, timide et introvertie, et elle retrouve sa meilleure amie d’enfance qui est elle extravagante et extravertie. Mais dans la vie je suis comme Laure et, comme son personnage dans Les Cyclades, très extravertie… Il y a en fait deux Magalie, mais une qui se retient, et c’est Blandine. Je me sentais donc comme un petit chien fou enfermé dans une cage, la truffe écrasée aux barreaux, qui observe son copain chien fou gambader partout, sauter dans les vagues, se rouler dans l’herbe. Mais comme ce chien fou a beaucoup d’amour pour le chien en cage et vient le rassurer…

Les Cyclades
Les Cyclades ©Memento Distribution

L. C. : Il y a quelque chose de très drôle dans ce personnage de râlerie, qui bougonne, avec cette tête de nana coincée dont on sent qu’elle voudrait faire pareil que sa copine. C’est aussi la différence entre le héron cendré et le rat crevé qui se balade...

On nous dit : « c’est drôle ce duo, Laure vraiment pulpeuse et désirable, vous très grande et atrocement dégueulasse de maigreur » (rires)

L. C. : Il faut plutôt dire Giacometti et Botero, là c’est pas mal ! Ou alors une c’est la Salsa, et l’autre c’est le Requiem de Mozart. Mais tu as aussi les instruments pour jouer de la salsa ! Pardon, on s’égare… J’ai déjà eu la même expérience de jouer "rentrée".

O. C. : Sur le Mouret...

L. C. : Mais oui, le Mouret, on dirait que j’ai une méduse morte sur la gueule (rires) ! Et même pour Annie Colère, c’est très rentré, c’est ténu, alors au début tu arrives et tu regardes les autres qui font des trucs, et toi tu te demandes si ça suffit d’être là à écouter. Mais bon, tu as quand même des petites jouissances dans ces rôles.

O. C. : On en a dans ces personnages-là. Dans ces personnages de stupeur, qui sont dans le jugement…

La société est faite ainsi, avec ses conventions, ses marginaux, ceux qu’on regarde de travers. Mais la plupart des gens sont quand même surtout dans la retenue, ont peur de la fantaisie, de se faire remarquer. Si on rit trop fort, si on bouge trop fort... Dans notre société, il faut bien se tenir. Pas trop crier, pas trop gigoter…

L. C. : Surtout si on est du sexe féminin ! C’est charmant pour un homme, et repoussant pour une femme.

O. C. : C’est ça, et c’est pour ça que je suis épatée que Laure soit aujourd’hui une des patronnes du cinéma français. C’est qu’elle a réussi, bravo, à faire aimer cette figure de femme. Une figure qui n’est pas un joli objet doux rose pâle, qui ne fait pas trop de bruit. Mon personnage Blandine représente cette personne qui est à la fois attirée mais aussi dérangée par cette fille-là.

L. C. : Aussi parce qu’elle est dans ce truc, qu’on nous fait intérioriser, qu’une femme à 45 ans c’est terminé pour elle, plus de sexualité…

O. C. : Que c’est pas poli de se montrer…

L. C. : Greta Garbo, Ingrid Bergman, on leur a toutes dit de se cacher à la première ride. C’est fou. Nous, on est un peu des vieilles premières !