Le cinéma français pas assez rentable ? Ce rapport qui inquiète

Le cinéma français pas assez rentable ? Ce rapport qui inquiète

Dans un récent rapport de la Cour des comptes, le CNC est directement visé pour la complexité et le trop-plein d'aides versés par rapport à ce que les films rapportent au cinéma. Un rapport qui fait évidemment beaucoup débat au sein de l'industrie.

Cinéma français : vers une diminution des aides publiques ?

Serait-ce la fin de l'abondance pour le cinéma français ? Dans un rapport de la Cour des comptes, consultable en ligne, le Centre national du cinéma et de l'image animée (plus connu sous le nom de CNC) est épinglé pour sa gestion financière, qui lui ferait défaut aujourd'hui. Ainsi, la plus haute juridiction financière a analysé la gestion du CNC sur une période allant de 2011 à 2022, et elle estime qu'il ne dispose pas d'une gouvernance financière suffisamment solide et qu'il devrait engager une profonde réforme.

Bien que le CNC ait été salué pour son soutien pendant la crise sanitaire et pour ses missions essentielles dans un secteur en mutation rapide avec notamment l'émergence des plateformes de streaming, il est désormais pointé du doigt pour la complexité de ses mécanismes d'aide, et son défaut de transparence.

Le soutien public au cinéma en France s'articule autour de divers leviers, particulièrement les obligations d'investissement et de diffusion des chaînes de télévision, les crédits d'impôt cinéma et audiovisuel, les dispositifs Sofica, et les aides des collectivités territoriales. Chaque année, les aides apportées par le CNC totalisent près de 700 millions d'euros pour l'industrie cinématographique, couvrant tous les aspects de la filière, de la production à la diffusion.

Cependant, la complexité des dispositifs d'aide et leur multiplicité compliquent l'évaluation de leur efficacité. La Cour des comptes souligne que cette complexité nuit à la transparence et à la visibilité de l'impact de ces aides sur le secteur.

De plus, le rapport pose la question de la pertinence d'une augmentation constante du nombre de films produits en France, malgré une évolution relativement stable de la fréquentation des films français. En effet, entre 2001 et 2019, le nombre de films d'initiative française a augmenté d'environ 40 %, alors que certains films peinent à trouver leur public en salles.

La Cour des comptes suggère que cette politique de soutien excessif pourrait être réexaminée pour garantir une meilleure allocation des ressources publiques. Cependant, les professionnels de l'industrie cinématographique défendent la diversité des dispositifs d'aide en arguant de leur adaptation aux besoins. On se rappelle du discours de la réalisatrice Justine Triet, tout juste auréolée de la Palme d'Or pour son film Anatomie d'une chute, au dernier festival de Cannes, qui s'en était prise au gouvernement, qu'elle accusait de vouloir casser l'exception culturelle française au nom de la rentabilité :

Trop de films, pas assez de spectateurs ? L'épineux débat

Pierre Moscovici, le Premier président de la Cour des comptes, ne suggère pas nécessairement de réduire la production de films, mais souligne qu'une grande partie d'entre eux ne parvient pas à attirer un public suffisant. En d'autres termes, le désintérêt du public s'accroît alors que les subventions au cinéma français continuent de croître : près d'un tiers des films français rencontrent actuellement moins de 20 000 spectateurs, une proportion en hausse par rapport à la précédente décennie. Le constat est encore plus criant lorsque l'on considère que seulement 2 % des productions soutenues par l'avance sur recettes réussissent à être rentabilisées en salle.

Cependant, Dominique Boutonnat, le président du CNC, adopte une perspective plus nuancée. Selon lui, il est essentiel de ne pas juger le succès d'un film uniquement en fonction de ses résultats en salle. Il met en avant l'importance de l'ensemble du travail qui gravite autour d'un film, notamment l'éducation à l'image, le soutien aux festivals, et l'aide aux salles d'art et essai. Pour Boutonnat, le cinéma français ne peut être évalué exclusivement par les chiffres de fréquentation en salles.

Cette confrontation d'opinions met en lumière les défis auxquels est confronté le cinéma français, à savoir la nécessité de trouver un équilibre entre la quantité et la qualité des films produits, tout en maintenant un écosystème cinématographique solide pour nourrir la créativité et l'expression artistique. La résolution de cette équation délicate pourrait façonner l'avenir de l'industrie cinématographique française.