Le Goût des autres : le film de Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui devait être un polar

Un genre bien différent

Le Goût des autres : le film de Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui devait être un polar

Après plusieurs succès au cinéma et au théâtre, Agnès Jaoui s'attaque à sa première réalisation avec "Le Goût" des autres. Ce film, qu'elle co-écrit avec Jean-Pierre Bacri, devait être un polar.

Le plus gros succès des "Jabac"

Véritable succès commercial et critique lors de sa sortie en salles en mars 2000, Le Goût des autres est la première réalisation d'Agnès Jaoui. Co-écrit par les "Jabac" (nom donné par Alain Resnais au duo Agnès Jaoui / Jean-Pierre Bacri), cette comédie dramatique raconte l'histoire de Castella, un chef d'entreprise nouveau riche peu porté sur la culture. Tombant en adoration pour une actrice de théâtre et le texte qu'elle interprète (Bérénice de Racine), Castella va tenter de s'intégrer à ce milieu artistique dont il ne maitrise pas tous les codes.

Après s'être rencontrés en 1986 sur l'adaptation de la pièce L'Anniversaire d'Harold Pinter mis en scène par Jean-Michel Ribes, le couple Jaoui-Bacri enchaîne les succès au théâtre avec l'écriture de Cuisine et Dépendances en 1991 et Un air de famille en 1994, puis au cinéma avec les adaptations de ces pièces mais aussi les scénarios de Smoking / No Smoking et d'On connaît la chanson réalisés par Alain Resnais respectivement en 1993 et 1997.

Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui
Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui au César 1994 ©AGENCE / BESTIMAGE

Le Goût des autres reste le plus gros succès au box-office de Jaoui-Bacri avec plus de 3 800 000 entrées au box-office et une critique dithyrambique. Aux critiques élogieuses s'ajoutent quatre Césars en 2001, dont celui du meilleur film et du meilleur scénario, ainsi qu'une nomination pour l'Oscar du meilleur film en langue étrangère.

Le film devait être un polar

Tout au long de leur collaboration, les "Jabac" ont toujours aimé s'imposer des cadres pour raconter leurs histoires comme l'explique Agnès Jaoui pour L'Express en 2013 :

Lorsque nous commençons à écrire un scénario, le choix d'un genre peut nous aider. Je me souviens, par exemple, que pour "On connaît la chanson", le fait d'avoir cette forme chantée, proposée par Alain Resnais, a été très inspirante. C'est d'ailleurs le scénario que nous avons écrit avec le plus de facilité. De la même façon, les contraintes qu'impliquaient l'adaptation d'une pièce de théâtre comme "Smoking/No smoking", unité de lieu, de temps et d'action, ont généré de la créativité.

Le Goût des autres
Le Goût des autres ©Pathé

Ainsi, pour Le Goût des autres, Jaoui et Bacri voulaient s'attaquer au polar. Même si le travail est commun, elle s'occupe plus particulièrement de la narration tandis qu'il se consacre aux dialogues. Mais très vite ils constatent qu'ils n'arrivent pas à s'approprier le genre, en ayant le sentiment d'écrire "des clichés" et rien de "très personnel et intéressant". Ne pas connaître de personnes issus du milieu policier ne les aide pas :

Quand on écrit, on pense à des gens. Je n'arrive pas à écrire sur quelqu'un que je ne connais pas.

déclare Jaoui dans le making-of du Goût des autres présent sur le DVD.

En gardant trois personnages issus de la première mouture du film (Castella, le garde du corps et la serveuse), le duo écrit finalement un nouveau film choral et revient à leurs sujets de prédilection : la lutte des classes, le culte de la réussite et la loi du plus fort. L'aspect sociologique des personnages a toujours été important dans leur travail. Pour On connaît la chanson, ils rédigeaient des fiches biographiques pour chaque personnage, y compris les plus petits rôles. Le milieu d'origine ou le métier ont ainsi un impact sur chacun des personnages.
Jean-Pierre Bacri s'octroie alors le rôle principal de Castella, le chef d'entreprise et Agnès Jaoui, qui doit se concentrer sur son travail de réalisatrice, joue un rôle plus secondaire, celui de Manie la serveuse.