Martin Scorsese raconte comment les studios Warner Bros. ont voulu changer radicalement la fin de son film "Les Infiltrés". Une confrontation qui a signé la fin de leur collaboration, après plusieurs films produits ensemble.
Martin Scorsese règle ses comptes
Alors que son nouveau film Killers of The Flower Moon arrive au cinéma à la mi-octobre, Martin Scorsese en assure la promotion dans de nombreux médias. Pour parler de Killers of The Flower Moon, évidemment, mais aussi pour aborder plus largement sa filmographie, ses inspirations, sa carrière, sa situation aujourd'hui. À bientôt 81 ans, solidement installé au panthéon du 7e art, combien de projets peut-il encore développer ? Peut-il encore travailler avec l'industrie cinématographique actuelle, à qui il adresse des reproches très concrets ?
Dans un long portrait que lui consacre GQ, le réalisateur de Taxi Driver et Les Affranchis se livre avec générosité, et règle même quelques comptes. C'est ainsi le cas pour les studios Warner Bros., avec qui Martin Scorsese a collaboré en production et distribution à plusieurs reprises, avant de mettre un terme à ce partenariat après la sortie de son film Les Infiltrés en 2006. Se sont-ils quittés en bons termes ? Pas vraiment, et il explique pourquoi.

Warner Bros. voulait une franchise
Dans ce portrait, Martin Scorsese revient notamment sur ses films réalisés depuis les années 2000, listant beaucoup des problèmes qu'il a rencontrés. Harvey Weinstein, contre lequel il a dû intensément lutter concernant la durée et le budget de Gangs of New York. Puis il y a eu Aviator, pour lequel Miramax et Warner Bros. ont coupé les fonds en pleine post-production, contraignant Martin Scorsese à sortir 500 000 dollars de sa poche pour terminer le film. Deux productions au terme desquelles il a décidé, comme il l'explique, "d'arrêter de faire des films".
Mais chassez le naturel et il revient au galop, Martin Scorsese est un obsédé et un génie du cinéma, il y reviendrait donc toujours. C'est ainsi qu'en 2006 il réalise Les Infiltrés, avec Warner Bros.. Tout se déroule bien, jusqu'à une projection-test où les cadres de Warner Bros. ont mis une fois de trop les pieds dans le plat. Le réalisateur se remémore cette projection d'où tout le public est sorti ravi. À l'exception des cadres de Warner Bros....
Les gars des studios sont sortis et ils étaient très tristes, simplement parce qu'ils ne voulaient pas ce film. Ils voulaient une franchise. Ce qui voulait dire : je ne peux plus travailler avec eux.
Concrètement, dans ce remake américain du thriller hong-kongais Infernal Affairs, Warner Bros. souhaitait qu'un des deux personnages principaux, William Costigan Jr. (Leonardo DiCaprio) ou Colin Sullivan (Matt Damon) survive. Afin d'ouvrir vers une suite, ce qui de fait établirait une franchise.
Ce qu'ils voulaient, c'était une franchise. Ce n'était pas une réflexion morale sur la survie ou la mort d'un personnage.
Heureusement, Martin Scorsese n'a pas cédé aux désirs de Warner Bros., tuant comme il l'est prévu dans ce thriller ses deux personnages. L'histoire lui a donné raison, puisque Les Infiltrés a été distingué par quatre Oscars en 2007 : Meilleur film, Meilleur réalisateur, Meilleur montage et Meilleur scénario adapté.