Les masques du maître de l'horreur : réjouissant livre sur John Carpenter

Les masques du maître de l'horreur : réjouissant livre sur John Carpenter

"Assaut", "The Thing", "Invasion Los Angeles" ... Autant de titre de films devenus cultes, qui ont tous été des échecs lors de leur sortie. Tandis que revenir derrière la caméra ne semble plus trop intéresser John Carpenter, un ouvrage fleuve revient sur les nombreux aspects de sa filmographie.

Une oeuvre gravée dans le marbre

Depuis 2016, Super Ciné Battle est un des podcasts sur le cinéma les plus réjouissants. Daniel Andreyev et Stéphane Bouley (l'auteur de ce livre) y classent par décennies des films suggérés par leurs auditeurs. Après un livre tiré de l'émission publié l'année dernière, le deuxième compère sort un ouvrage dédié à un cinéaste cher à son cœur - John Carpenter, donc.

Malgré son statut désormais incontesté de réalisateur culte, on trouve assez peu de livres consacrés exclusivement à la filmographie de "Big John". Le seul ouvrage similaire qui semble lui être dédié est sorti il y a plus de vingt ans, et reprenait déjà l'idée de masques pour l'évoquer (Mythes et masques : les fantômes de John Carpenter, par Luc Lagier et Jean-Baptiste Thoret). C'est donc avec plaisir qu'on se replonge dans l'oeuvre du cinéaste, qui est abordée ici par divers grands aspects : l'horreur, la musique, la composition de l'image, ou encore la caractérisation des personnages.

On ressort de cette lecture de près de 350 pages avec le sentiment d'avoir mieux compris l'oeuvre de John Carpenter. Exhaustif, l'auteur n'oublie ainsi pas d'aborder quelques œuvres mises en scène pour la télévision, qu'on oublie souvent :  Meurtre au 43e étage, ou deux épisodes de l'anthologie Masters of horror.

Au-delà des films à proprement parler, l'ouvrage est très agréable à lire car il se permet de prendre le temps d'expliquer tout un tas de notions techniques propres au cinéma. De la définition claire de ce qu'est un plan à des mises au point sur l'anamorphique et la demi-bonnette (ou double-focale), le livre s'avère accessible à tout type de lecteur.

11 films Halloween plus tard ...

Quant au portrait de Carpenter en tant qu'être humain, il est amusant de voir à quel point le cynisme de ses films est lié à sa personnalité. Il n'a pas peur d'avouer accepter des œuvres commandes uniquement pour l'argent, tout en étant très intègre dans ses valeurs politiques. Il est d'ailleurs fier de sa nationalité, ce qui ne l'empêche pas d'être extrêmement critique sur tous les excès qui peuvent se produire dans son pays ...

Dire que Carpenter est un cinéaste américain n’est pas une simple constatation de son état civil, c’est surtout un moyen de définir son champ d’action. Il ne fait pas partie de ces auteurs humanistes qui transcendent un contexte pour offrir une fable universelle : Carpenter nous parle constamment et spécifiquement des Etats-Unis.

On apprend que Carpenter voulait, dans Halloween III, faire du masque de Myers un totem qui se transfère de personne en personne, tel un artefact magique. Dans le très bon chapitre consacré aux héritiers, on finit par se dire que le cinéaste est un « monstre » originel, sans héritier direct, mais dont le masque (les thèmes, l’aspect visuel) a contaminé de nombreux réalisateurs suivants.

Il demeure ainsi impressionnant de se rendre compte à quel point il est devenu un cinéaste culte tout en étant resté, dans un sens, un marginal. Mais Carpenter n'est pas à un paradoxe près, et c'est sûrement ce qui fait une partie de son charme !

L'oeuvre de John Carpenter. Les Masques du maître de l'horreur, de Stéphane Bouley. Third Editions, septembe 2018, 29€.