On l'avait croisé il y a seulement quelques mois devant un décor bonbon et sucreries pour Charlie et la Chocolaterie, aujourd'hui Tim Burton occupait l'une des salles du sous-sol du Ritz Club pour célèbrer Les Noces Funèbres. Et alors qu'il n'était accompagné "que" du producteur Richard D. Zanuck pour Charlie…, le voilà ici attablé à la place du chef, aux côtés de sa belle - et voix de la Mariée Morte- Helena Bonham Carter, du co-réalisateur du film Michael Johnson, et de la productrice Allison Abbate. Une ambiance totalement différente donc, et si le génial Tim avait ouvert son cœur lors de la précédente entrevue, il a surtout montré sa bonne humeur et son amour pour sa dulcinée lors d'une conférence drôle, fraîche, mais sans grandes surprises.
« Ca a toujours été difficile pour moi de communiquer avec mes parents… et avec mon fils, c'est pareil » « C'est normal, il ne parle pas encore ! » rétorque Madame à Monsieur Burton. Le ton est donné, et le couple illumine la salle de leur sourire : l'un est lunaire, l'autre a les pieds sur Terre, mais les deux multiplient les regards amoureux. « Tim est sombre, c'est vrai, mais il est « normal » je vous assure, il n'est pas tordu, c'est un homme au grand cœur... » continue la belle - et le voilà détachant une rose du bouquet de fleur posé devant lui pour l'offrir à sa (presque ?) mariée bien vivante.
Quoi de plus naturel pour les deux concubins que de plonger dans le romantisme ? « Les Noces Funèbres, c'est une histoire d'amour avec des squelettes. » explique Tim Burton. « C'est vrai qu'il y a toujours beaucoup de joie lorsque je parle de la mort dans mes films. Mais ce n'est pas un sujet tabou pour moi, peut-être parce qu'à Los Angeles, j'ai baigné dans la culture espagnole, où la mort est célébrée comme une fête parce qu'elle fait partie de la vie. » Comme il l'avait déjà précisé lors de la promo de Charlie et la chocolaterie, Tim Burton ne fait pas de films en pensant à un public déjà défini : « C'est un film pour les enfants, pour les adultes, pour les animaux… Pendant le tournage, je n'essaye jamais - mieux je ne pense même pas à cibler mon film, à le destiner plus aux enfants ou aux adultes. J'espère seulement pouvoir les toucher et les émouvoir un peu. » Jeune maman de leur petit garçon, Helena Bonham Carter en profite pour compléter : « Les enfants aiment avoir peur, les cauchemars, les histoires d'épouvante… Sans parler des contes de fées, qui sont parfois très cruels ! Mais il faut leur parler de la mort, ce ne doit pas être un sujet tabou. Alors autant la rendre joyeuse ! » Et la productrice de conclure : « Si on s'aime dans la vie, pourquoi pas dans la mort… ? »
« Si on faisait six secondes en une semaine, on était ravi ! » explique Michael Johnson, en riant après coup. Travail de longue haleine, Les Noces Funèbres, qui fait parfois songer à Vincent, le premier court métrage de Tim Burton, est presque exclusivement raconté en Stop-Motion : « Il y a effectivement quelques touches d'infographies, dans le voile de la Mariée ou l'envol des papillons notamment, mais la quasi intégralité est en stop motion… Car ce projet ne pouvait être raconté que par ce médium-là. C'est ce qui lui donne toute sa force, toute sa puissance, sa poésie aussi. » continue Michael Johnson… « Et puis ça aurait été plus difficile de trouver de vrais zombies… ! » conclue Tim Burton avec un clin d'oeil.
Si Helena Bonham Carter a prêté sa voix à deux films d'animation ces temps-ci (elle est également à l'affiche de Wallace et Gromit : le mystère du lapin-garou), c'est aussi parce qu'elle ne pouvait pas jouer : « j'étais enceinte lors de ces deux tournages ! Il m'était donc très facile de donner de la voix, et j'adore ça ! Il n'y a pas besoin de composer un personnage, d'utiliser d'expressions visuelles… et surtout on ne passe pas ses journées à attendre après le soleil ou les nuages pour mettre en boite une scène ! »
Quant à Johnny Depp, il tournait en même temps Les Noces Funèbres et Charlie et la Chocolaterie ! « C'était parfois difficile pour lui, raconte le cinéaste. « Il arrivait le matin et me disait : "Qu'est-ce que je fais aujourd'hui ?" ! »
Tim Burton le bout-en-train aime donc nous faire rire et sourire avec ces histoires de mort et de squelettes, mais pour l'instant, il ne pense plus qu'à une chose : faire une pause ! Déjà extenué après Charlie et la chocolaterie, le réalisateur est aujourd'hui très content de pouvoir s'arrêter un peu : « Ce que je ferais après, j'y penserais plus tard, quand je serais dans mon lit ! »
Espérons seulement qu'il ne dorme pas trop longtemps !
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Propos recueillis par Aurélie Maulard (Paris, Octobre 2005)