En 2006, Matt Damon porte la deuxième réalisation de Robert De Niro, le film d'espionnage "Raisons d'État". Alors qu'il connaît un grand succès avec la saga "Jason Bourne", le comédien craint qu'un choix aussi risqué commercialement puisse lui coûter sa carrière.
Raisons d'État : aux origines de la CIA
Treize ans après Il était une fois le Bronx, Robert De Niro revient à la réalisation en 2006 avec Raisons d'État. Un long-métrage centré sur Edward Wilson, personnage inspiré de l'officier de renseignement américain James Jesus Angleton. Incarné par Matt Damon, cet homme profondément marqué par le suicide de son père duquel il a été témoin se distingue lors de ses études à Yale par l'importance qu'il accorde à la discrétion et à l'honneur.
Des valeurs qui poussent Bill Sullivan (Robert De Niro), futur directeur de l'OSS - démantelée en 1945 et remplacée par la CIA - à le recruter. Edward Wilson participe à la création d'un service de contre-espionnage en lien avec la guerre que les États-Unis préparent contre l'Allemagne. Enquêtant pendant de longues années en Europe, il assiste sans s'en rendre compte à l'effondrement de son mariage avec Margaret (Angelina Jolie), découvre les trahisons et sombre dans la paranoïa, sacrifiant peu à peu sa vie pour son métier.
Billy Crudup, Michael Gambon, Alec Baldwin, William Hurt, John Turturro, Joe Pesci ou encore Eddie Redmayne complètent la distribution de cette fresque ambitieuse sur laquelle Robert De Niro travaille pendant une dizaine d'années. Fasciné par l'univers de l'espionnage, le réalisateur et comédien cherche à mettre en scène un film différent sur le sujet, et reçoit ensuite le scénario d'Eric Roth (Forrest Gump, L'Étrange histoire de Benjamin Button). En résulte une oeuvre précise, froide, anti-spectaculaire et surtout passionnante de bout en bout.
Un projet risqué pour Matt Damon
Raisons d'État est une prise de risque pour Matt Damon. À l'époque, la star compte plusieurs succès à sa filmographie, parmi lesquels Il faut sauver le soldat Ryan, les deux premiers volets de la saga Ocean's ainsi que les deux premiers de la franchise sur Jason Bourne. Mais en dehors La Mémoire dans la peau et La Mort dans la peau, l'acteur n'est pas la tête d'affiche de ces projets. Lorsqu'il tourne dans Syriana, Raisons d'État et Les Infiltrés, le comédien est conscient qu'ils risquent de ne pas fonctionner au box-office. Il estime donc que sa place à Hollywood est particulièrement fragile.
Interrogé par MovieWeb, Matt Damon explique en 2006 :
Entre les deux films Bourne, j'ai fait Syriana, Les Infiltrés et Raisons d'État. Au moment où j'ai signé pour Les Infiltrés, je me disais que ça n'allait pas cartonner parce que les films de Marty (Scorsese) ne rapportent généralement pas beaucoup d'argent. Je me suis senti bloqué par les films Bourne. J'ai eu la chance de faire les films que je voulais vraiment faire, peut-être un peu plus difficiles. J'ai une chance très limitée de pouvoir choisir certains films et je suis satisfait jusqu'à présent. Cela ne dure pas éternellement. On voit tout le monde aller et venir. Je sais comment ça marche.
Une crainte qui n'est pas devenue réalité. Les Infiltrés est à la fois un succès commercial et critique, qui totalise plus de 291 millions de dollars de recettes mondiales et remporte 4 Oscars. S'ils ne cartonnent pas autant, Raisons d'État et Syriana sont eux aussi plébiscités par la presse. Quant à Matt Damon, il a pu continuer à faire des choix très intéressants, tournant notamment pour Clint Eastwood, Neill Blomkamp, Ridley Scott encore Christopher Nolan.