Ready Player One : le chef opérateur fétiche de Steven Spielberg s'inquiète pour son métier

Ready Player One : le chef opérateur fétiche de Steven Spielberg s'inquiète pour son métier

Directeur de la photographie doublement oscarisé, Janusz Kamiński dresse un constat alarmant sur son métier à l'heure du numérique.

Il faut sauver le soldat Ryan et La Liste de Schindler ont fait du chef opérateur fétiche de Steven Spielberg, Janusz Kamiński, un artiste récompensé lors des Oscars. Et si l'homme a consacré une grande partie de sa carrière aux œuvres du cinéaste américain, collaborant plus de dix-huit fois (dont Ready Player One) avec ce dernier, il n'en est pas moins qu'il reste très inquiet pour sa profession.

Les années 2000 ont marqué un tournant dans l'histoire du cinéma avec l'arrivée du numérique. Si son utilisation fut de plus en plus récurrente au début, elle commença à largement s'imposer, multipliant les avancées comme la 3D pour écraser totalement la pellicule il y a bien deux décennies. Plus chère à produire, plus difficile à maîtriser et plus longue à dompter, la pellicule reste cependant une technique adulée pour beaucoup de réalisateurs et de spectateurs.

Ls débats cinématographiques autour du cinéma pré-numérique peuvent paraître stériles. Pourtant la réalité pose bel et bien question, à une époque où certains métiers sont menacés par l'apparition de nouvelles technologies, plus rapides et moins coûteuses. Parmi ces derniers, se trouve un métier indispensable : directeur de la photographie.

Contre la non-créativité et non contre le numérique

Lors d'une masterclass organisée par l'International Cinematographers Guild (comprendre « la communauté internationale des directeurs de la photographie»), Janusz Kamiński, qui vient de collaborer une nouvelle fois avec Steven Spielberg sur Ready Player One, a révélé ses craintes et ses doutes face à un cinéma numérique de plus en plus dénué d'identité visuelle.

L'identité visuelle d'un film est d'une importance sans égal et le directeur de la photographie a la lourde tâche de donner à chaque long-métrage cette essence. À travers les lumières, les ombres, l'éclairage et parfois même le cadrage, le chef-opérateur sublime l'image. Ce que déplore Janusz Kamiński ce n'est pas tant le numérique puisque bon nombre de chefs opérateur ont continué brillamment leur métier post-pelliculaire (comme c'est le cas, par exemple, pour Vittorio Storaro, principalement connu pour son travail colossal sur Apocalypse Now) mais plutôt ce que les nouveaux artistes et techniciens en font.

Parmi l'étendue de possibilités que permettent les effets spéciaux, celle de retoucher des images en post-production en fait partie. Ainsi, l'éclairage peut être retouché, les lumières peuvent être ajustées et le cadrage peut être changé. Tout cela peut totalement nuire à la vision du directeur de la photographie comme le souligne Kamiński :

Avec les nouveaux logiciels et les techniciens spécialisés dans l'imagerie numérique, l'image peut être manipulée sans limites.

Bien que le chef-opérateur de 58 ans dresse un constat plutôt négatif, il reste ravi de sa nouvelle collaboration avec Spielberg, admettant que le film est une véritable réussite malgré le fait que son travail fut plus restreint. Et c'est en terminant sur une note plus nuancée, comme le relève le site américain The Hollywood Reporter, que Kamiński lance un appel aux jeunes directeurs de la photographie en leur demandant d'utiliser leur créativité par le biais des images pour s'exprimer.