Sous surveillance : quel mouvement révolutionnaire américain a inspiré le film ?

Quand Robert Redford revient au thriller d’investigation

Sous surveillance : quel mouvement révolutionnaire américain a inspiré le film ?

Avec "Sous surveillance", Robert Redford fait son retour au thriller d’investigation, un genre qu’il maîtrise parfaitement. Le film est centré sur la traque d’anciens membres des Weather Underground, un mouvement radical né à la fin des années 60 pour protester contre la guerre du Vietnam, le racisme et l'impérialisme américain.

Sous surveillance : Robert Redford ravive l’ambiance des seventies

Avec Sous surveillance, Robert Redford revient à un genre auquel il a énormément apporté dans les années 70 : le thriller d’investigation empreint de paranoïa. Dans la lignée de certaines œuvres de Sidney Pollack et Alan J. Pakula, Les Trois jours du Condor et Les Hommes du président en tête, cette adaptation du roman Le Dernier d’entre nous de Neil Gordon sortie en 2013 réunit une distribution prestigieuse menée par le cinéaste et comédien.

L’acteur et réalisateur de L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux incarne ici Jim Grant, un avocat qui vit seul avec sa fille depuis le décès de son épouse. Après l’arrestation de Sharon Solarz (Susan Sarandon), une ancienne activiste accusée d’un meurtre commis lors d’un braquage effectué pour protester contre la guerre du Vietnam, le magistrat attire l’attention du journaliste Ben Shepard (Shia LaBeouf), qui enquête sur l’affaire.

Sous surveillance
Sous surveillance ©SND

Ce dernier découvre que Jim Grant est en réalité Nick Sloan, un ex-militant qui aurait lui aussi participé à ce casse revendiqué par les Weather Underground. Grant passe alors du statut de père de famille rangé à celui de suspect activement recherché par le FBI et évanoui dans la nature…

Julie Christie, Brendan Gleeson, Anna Kendrick ou encore Nick Nolte complètent le casting de cette traque haletante, où Robert Redford s’intéresse à ce que sont devenus les anciens membres d’un collectif révolutionnaire, aux regrets de certains convaincus de devoir payer le prix fort pour leurs actions et aux convictions inébranlables de certains autres.

Qui étaient les Weather Underground ?

Selon le Time, l’organisation Weather Underground était "le plus célèbre groupe radical américain engagé dans la violence politique" à la fin des années 60 et au début de la décennie suivante. Le mouvement co-fondé par Bill Ayers regroupait notamment de nombreux étudiants luttant contre la guerre du Vietnam, le racisme et l’impérialisme des États-Unis. Leur première manifestation eut lieu en octobre 1969 durant les "Days of Rage", organisés en réaction au procès des Sept de Chicago et qui terminèrent en émeutes, comme le rappelle Aaron Sorkin dans son excellent long-métrage consacré au sujet (Les Sept de Chicago disponible sur Netflix).

Estimant que les protestations pacifistes étaient insuffisantes et ne conduisaient à aucun changement, les Weathermen (qui se faisaient appeler ainsi avant de basculer dans la clandestinité) ont pratiqué la "guérilla urbaine". Ils ont revendiqué une vingtaine d’attentats à la bombe durant leurs sept années d’existence. Ils visaient exclusivement des bâtiments officiels - dont le Capitole en mars 1971 - ainsi que des sièges sociaux d’entreprises, et ne faisaient pas de victime. Dans le making-of de Sous surveillance, Julie Christie explique à propos de leurs engagements :

Ils s’attaquaient à des institutions précises pour mettre en lumière ce qui se déroulait mais également parce que les actions non-violentes auxquelles ils participaient n’aboutissaient à rien. Ils ont donc essayé d’agir pour atteindre leurs objectifs. Manifester au sens classique du terme n’aboutissait pas. Ils ont décidé de faire évoluer leur mouvement en protestations violentes. Ils devaient se faire entendre.

Sous surveillance
Sous surveillance ©SND

Pendant des années, le FBI rechercha activement les membres de la Weather Underground Organization, y compris après sa dissolution. Il s’agit de l’un des points centraux du film de Robert Redford, qui révèle d’ailleurs avoir soutenu les militants dans leur combat :

Ils ne voulaient pas de cette guerre et se sont donc révoltés. J’étais de leur côté, à l’époque.  J’avais ma famille, ma carrière… Je n’étais pas engagé, à l’époque. Mes opinions politiques se concentraient sur l’environnement. Mais beaucoup de mes amis étaient engagés. J’étais à la frontière. J’assistais à ce qui se passait. Il y avait un côté positif : cet élan contre le service militaire obligatoire. S’il existait toujours, ça se reproduirait.

En 2016, le Time assure que le FBI n’est jamais parvenu à arrêter un seul membre éminent des Weather Underground. Et ce malgré les millions de dollars dépensés pour éradiquer le groupe, dont il surestimait l’ampleur de la menace. Outre Sous surveillance, le sublime À bout de course de Sidney Lumet se penche lui aussi sur d’anciens membres du collectif qui éduquent leurs enfants en marge de la société.