Ce soir à la TV : la fin de ce film a retourné le cerveau de millions de spectateurs

Ce soir à la TV : la fin de ce film a retourné le cerveau de millions de spectateurs

En 1995, le réalisateur Bryan Singer, le scénariste Christopher McQuarrie et l'acteur Kevin Spacey frappent un grand coup avec "Usual Suspects", diffusé ce soir sur Arte. Considéré comme un des meilleurs films à suspense de tous les temps, sa fin a marqué des millions des spectateurs et est une des séquences les plus cultes de l'histoire du cinéma.

Usual Suspects, le grand film policier (et mensonger) des années 90

Tourné en un petit mois et avec 6 millions de budgets, le jeune réalisateur Bryan Singer n'imaginait vraisemblablement pas que son deuxième long-métrage, Usual Suspects, serait un tel succès. Sorti en 1995, ce film policier débute avec un massacre commis sur un cargo dans le port de San Pedro. Il y a deux survivants à ce qui semble être un terrible règlement de comptes ou deal qui aurait mal tourné, dont le petit escroc infirme Verbal Kint (Kevin Spacey). Celui-ci, interrogé par l'agent Dave Kujan (Chazz Palminteri), va alors raconter la suite d'événements complexes qui ont mené à cette situation.

Usual Suspects
Usual Suspects ©Pan Européenne

Usual Suspects est un film culte, à la popularité mondiale, parce qu'il a poussé à son extrême et popularisé au cinéma le principe narratif du retournement de situation final, le "twist" renversant dont la révélation scotche le spectateur à son piège et lui retourne le cerveau. Dans ce film, scénarisé par Christopher McQuarrie, un grand méchant apparaît rapidement : Keyser Söze. Un criminel sanguinaire mythique, insaisissable, une légende urbaine pour certains, mais un individu bien réel pour d'autres, et qui serait aux manettes de toute cette affaire.

Ce Keyser Söze existe-t-il vraiment ? Serait-il un des quatre hommes avec lesquels Verbal Kint s'est associé ? Serait-il, surtout, son ami Dean Keaton (Gabriel Byrne) ? C'est ce que finit par croire, au vu du récit et des aveux de Verbal Kint, l'agent Dave Kujan, qui relâche ainsi l'infirme. Avant que la révélation n'intervienne, dans une prise de conscience vertigineuse : tout l'histoire que vient d'entendre l'enquêteur n'est qu'un mensonge...

Un scénario et un acteur oscarisés

Présenté hors compétition au Festival de Cannes 1995, Usual Suspects reçoit un très bon accueil et déjà son scénario et les performances du casting sont acclamés. Aux Oscars 1996, Christopher McQuarrie reçoit ainsi l'Oscar du Meilleur scénario original et Kevin Spacey l'Oscar du Meilleur acteur dans un second rôle. Pour ce dernier, sa performance délicieusement ambigüe et vicieuse va établir le registre psychologique dans lequel l'acteur va ensuite s'épanouir. Il est d'ailleurs à noter que Kevin Spacey est aussi au casting de Seven, autre grand film à "twist" sorti aussi en 1995.

Roger Verbal Kint (Kevin Spacey) - Usual Suspects
Roger Verbal Kint (Kevin Spacey) - Usual Suspects ©Pan Européenne

Si Usual Suspects réussit particulièrement bien son dévoilement de la vérité, c'est au mérite de Christopher McQuarrie et de Bryan Singer qui entretiennent la confusion du spectateur grâce à une narration non-linéaire et non-fiable, dans la mesure où la caméra comme le narrateur - Verbal Kint - mentent. En effet, tout récit passe tacitement le contrat avec son lecteur ou spectateur que ce qui lui est présenté est la réalité, que les événements déroulés sont vrais, ou tout du moins doivent être pensés comme tels. Dans ce cas, c'est précisément de cette règle de fiabilité qu'Usual Suspects s'affranchit, pour construire un suspense haletant et une révélation finale dont la sensation n'a que très rarement été égalée.

Un sommet de manipulation

Appliquant au cinéma un principe de narration développé jusque-là surtout dans la littérature - Rashōmon d'Akira Kurosawa en jouait déjà à l'écran en 1952 -, le scénariste et réalisateur confient donc le point de vue narratif de leur film et donc sa véracité à l'antagoniste et menteur de leur histoire. L'exercice est une réussite, facilité par le fait que Kevin Spacey incarne un personnage qui n'a rien d'attractif : infirme, faible mentalement, humilié, jouant avec Dave Kujan comme le réalisateur joue avec le spectateur, le regard se porte naturellement plus vers le charismatique Dean Keaton ou le chien fou Michael McManus (Stephen Baldwin). La fin d'Usual Suspects (ci-dessous) est ainsi une des séquences les plus renversantes et satisfaisantes du cinéma.

Avec un box-office mondial qui s'établit à 67 millions de dollars de recettes, des nominations et de récompenses en cascade, Usual Suspects est aujourd'hui considéré comme un des plus grands films policiers, et a été classé en 2008 par l'American Film Institute 10e meilleur "mystery film" de l'histoire du cinéma.