Deutsch-les-landes : entretien avec les actrices de la série Amazon

Deutsch-les-landes : entretien avec les actrices de la série Amazon

"Deutsch-les-Landes", la série d'Amazon sur une improbable délocalisation d'une entreprise allemande dans une station balnéaire française, rassemble un casting français féminin de premier plan. Avec une icône du Splendid et l'interprète de Françoise Sagan au cinéma, ainsi que la jeune Roxane Duran, révélée par Michael Haneke, il était écrit que la série ne laisserait pas indifférent. Cinéséries a pu rencontrer ces trois comédiennes à l'occasion de la diffusion de la série.

C’est un trio a priori dépareillé qui anime la série Deutsch-les-landes. Marie-Anne Chazel, Sylvie Testud et Roxane Duran font en effet partie du casting franco-allemand de la première série française d’Amazon. Respectivement Martine, Odile et Chloé, elles sont à elles trois pour beaucoup de ce qui va bouleverser la vie de Jiscalosse. Leur participation à la série est marquée d’une grande liberté de ton, la même qu’on a pu apprécier au moment de les rencontrer pour parler ensemble de leur expérience.

Comment arrive-t-on sur un projet comme Deutsch-les-landes ?

Marie-Anne Chazel : ce qui m’a plu, c’est le sujet, l’idée de parler de la relation franco-allemande, qui est très présente dans notre histoire. Cette sorte de village d’irréductibles, « envahis » par des Allemands aujourd’hui. C’est l’occasion de voir des relations possibles, d’autres impossibles, et de s’amuser avec les préjugés. C’était drôle, et d’autant plus parce que les acteurs allemands se moquaient de nous !

Roxane Duran : Non Marie-Anne il ne faut pas le prendre comme ça, c’était très affectif. D’ailleurs Christoph Maria Herbst t’appelait mademoiselle Chanel ! (rires)

M.A.C.: J’ai bien aimé le choix de l’image de Kohl et Mitterrand comme repère historique et culturel. Je veux dire qu’on était tous là où on s’attendait, avec nos clichés. Pour faire une comédie il faut des personnages avec des défauts, sinon des gens bien qui s’adorent ça fait chier tout le monde !

Sylvie Testud : c’est savoureux de parler des clichés, on a tous envie de dégager nos préjugés, de se les sortir de la tête : la saucisse, l’Oktoberfest, et de l’autre côté les clichés français, on serait des femmes faciles et des manifestants. Ça fait du bien de rentrer tout droit dedans, sans éluder, pour voir si tout ça est avéré ou pas.

S.T. : on veut croire aujourd’hui que tout est bien mixé, mais on la trimbale quand même cette culture. On évoque toujours l’hyper discipline des Allemands, et pour nous le fait qu’on ne se remettrait pas vraiment des guerres successives.

R.D. : on ne se jugeait pas entre comédiens français et allemands, c’était vraiment une composition d’ensemble, où on laissait de la liberté à l’autre pour essayer ensuite de se mettre dans cette vague. Et on a vraiment travaillé main dans la main avec les réalisateurs et les scénaristes. C’est une approche très chorale, chacun a pu y trouver sa place, son mot à dire et sa personnalité.

Est-ce qu’on se pose les questions des limites, d'une censure ?

M.A.C. : Iil y a eu par exemple une de mes répliques, devant les bunkers où je devais dire « vous allez vous sentir chez vous ». Quand je l’ai lue j’ai pensé « je ne vais pas la dire ». Je trouvais que ça pouvait être humiliant, mais en réalité ils ne le perçoivent pas comme ça. Il y avait quand même des choses intéressantes à faire passer entre nous, on pouvait se dire plein de choses. C’était rafraîchissant de pouvoir rire ainsi, sans se soucier du politiquement correct.

S.T. : on se moque tellement des deux côtés ! Il y a le côté naïf qui espère tout, avec l’arrivée des Allemands et de leur savoir-faire, que tout va bien se passer. Pour ça, mon personnage est exemplaire. Elle croit que tous les Allemands sont fans de Goethe et connaissent toutes les symphonies. En réalité elle se retrouve devant un mec éreinté par son boulot qui veut juste se mettre à poil chez lui.

R.D. : il y a des choses qui parlent beaucoup plus au public allemand, qu’on ne perçoit pas dans la version française. On a eu beaucoup de chance, Christoph Maria Herbst et Sebastian Schwarz ont apporté leur dynamique, c’était deux mondes distincts qui ont bien fusionné, et ont finalement amené de vrais rapports affectifs. La façon dont les Allemands rient d’eux-mêmes va beaucoup plus loin qu’on ne le pense. Ils proposaient des blagues que nous-mêmes n’osions pas faire. Ça a vraiment été un beau travail collectif.

S.T. : On avait une partition quand même très écrite, et on a évolué suivant les envies des réalisateurs, d’abord Denis Dercourt puis Annette Ernst. C’était différent, par exemple Denis laissait plus de place à l’improvisation. Et le mérite revient au scénariste principal, qui est allemand, et qui a accepté a posteriori des improvisations parfois très osées. Cela donne ce côté cool, feel good, où on a le droit de poser quelque chose sur la table et de laisser le spectateur décider, sans lui dire quoi penser.

Partantes pour une saison 2 ?

S.T. : On a rien contre ! Ils en parlent, et je crois que c’est en projet. Maintenant (…)

M.A.C. : (…) il faut nous séduire ! Pour la comédie, il faut avoir quelque chose à manger, c’est-à-dire quelque chose de nouveau à jouer, pour ne pas répéter ce qu’on a déjà fait. Là, il y a beaucoup de potentiel, de personnages, le côté choral laisse plein de possibilités. Si les auteurs sont bons, ils trouveront des choses.

Deutsch-les-Landes est disponible en intégralité sur Amazon depuis le 30 novembre 2018. Ci-dessous la bande-annonce :