Le Bureau des Légendes : rencontre avec le casting

Le Bureau des Légendes : rencontre avec le casting

Ils sont les agents secrets les plus connus de France. Dans la nouvelle saison de la série-phare de Canal + "Le Bureau des légendes", ils jouent à des jeux dangereux mêlant géopolitique et affects, brouillant les lignes entre la raison d'Etat et l'intérêt personnel, le sacrifice et la trahison. Plus que jamais, Malotru, Marie-Jeanne et les autres sont sur des fronts brûlants, d'autant plus qu'un "ennemi" interne fait son entrée dans la partie. A l'occasion de la diffusion imminente de la saison 4, nous avons rencontré les principaux interprètes de la série.

On les connaît sous leurs noms, ou alors leurs légendes, mais peut-on en être vraiment sûr ? Malotru, Marina Loiseau, Marie-Jeanne et Sisteron ... Le noyau dur de la série Le Bureau des légendes s'élargit à ses risques et périls dans la saison 4, en accueillant notamment le personnage de JJA. Leurs interprètes Sara Giraudeau, Florence Loiret-Caille, Mathieu Amalric, Jonathan Zaccaï et Mathieu Kassovitz ont répondu à nos questions.

Mathieu Amalric, vous intégrez le Bureau des légendes dans le rôle de JJA, un directeur bien décidé à faire la lumière sur les agissements de Malotru et de ses collègues. Racontez-nous.

Mathieu Amalric : J’ai l’impression d’être un petit nouveau, et c’est assez merveilleux. Vous entrez dans un monde où ils sont tous amoureux de la série, de son écriture, et il faut être à la hauteur. J’ai essayé d’être le plus présent possible pendant tout le travail de lecture, puis j’ai appris mon texte. La star, c’est toujours l’écriture, il faut savoir de quoi on parle. C’est un monde particulier, avec son aspect très quotidien, et en même temps les questions sont très importantes. Eric Rochant disait souvent «  c’est comme dans la vie, pensez à des médecins qui sauvent des vies tous les jours mais qui n’en font pas forcément tout un fromage. Ne pensez pas que vous faites des choses exceptionnelles. »

Mathieu Amalric : Et puis, si vraiment je suis le « méchant », c’est que vous avez vous aussi attrapé le virus, vous aimez Malotru, et il y a donc un souci, ça se confirme ! (rires)

Sara Giraudeau : Avec l’arrivée de JJA, il y a vraiment une nouveauté pour le spectateur, puisqu’on est convaincus parce qu’il dit. C’est la recherche de la vérité, celle de JJA, et il y a aussi la nécessité de continuer ce qui a été mis en place autour de Malotru par Marie-Jeanne.

M.A. : Et puis JJA a formé Malotru, il a fait naître le monstre, donc imaginez ! C’est presque shakespearien.

Sara Giraudeau, comment évolue Marina Loiseau, votre personnage, dans cette saison ?

S.G. : Marina atteint l’état adulte, elle a fini son initiation. Elle découvre pleinement la notion de sacrifice dans cette saison. En tant que comédien, il y a un parallèle avec le métier, celui de devoir avancer, évoluer dans son quotidien, se réinventer, c’est donc très intéressant. Avec Malotru, Marina reste le personnage le plus fictionnel, parce que si on accumule tout ce qui se passe depuis le début, la réalité fait que tout explose !

Mon personnage vit une solitude extrême, elle a une dimension tragique. Ce sont, d’une manière générale, des personnages dont la solitude me peine beaucoup ! Ils sont tenus en vie par quelque chose de complètement extérieur, et leur être, leur moi intérieur, est écrasé. C’est à la fois tragique et surréaliste de voir ces personnages se construire une vie où ils doivent pouvoir disparaître en quelques minutes.

Fiction, réalité, manipulation, est-ce que la fréquentation de vos personnages vous change dans votre vie « civile » ?

M.A. : En tant que citoyen, ce qui a peut-être changé, c’est le rapport à l’information. Maintenant, quand on sait quelque chose, c’est qu’on a voulu que ça se sache. Voilà comment je vois aujourd’hui l’information, malgré le fait que mes parents sont journalistes, et que j’ai grandi dans ce milieu. Même si c’est sous couvert de révélation, il y a cette réalité à prendre compte.

Mais Le Bureau des légendes, c’est aussi l’amour de la fiction, du cinéma, du théâtre, de l’opéra même ! Il y a de l’amplitude, j’avais l’impression que les réalisatrices et Eric Rochant nous mettaient dans du Feydeau, du Shakespeare, avec des portes cachées. Ce n’est pas du tout un documentaire, mais au final on a cette grande sensation de réalisme.

Jonathan Zaccaï : Lors d’une projection, j’ai demandé à un général ce qu’il pensait de la scène dans la saison 3 où je sauve une combattante du PKK d’un sniper. Je voulais un peu frimer, alors j’ai dit « c’est pas mal quand même non ? », et il m’a répondu, très sérieusement : « vous avez mis beaucoup de temps à sortir de la voiture. » Mais moi, je ne serais jamais sorti de la voiture !

Comment les « anciens » perçoivent l’arrivée des « nouveaux » dans cette nouvelle saison ?

Mathieu Kassovitz : Ils viennent nous remplacer (rires) ! C’est une série qui a des jambes, et qui peut courir pendant des années. Je l’ai tout de suite dit à Eric, s’ils veulent continuer pendant vingt ans ils peuvent. Les gens vont changer, comme dans la vraie vie, mais ce dont traite la série sera toujours d’actualité. Comme au vrai bureau des légendes, il y a des changements de personnel, des drames, donc la série a des bases solides pour accueillir de nouveaux personnages, et en faire partir d’autres.

En ce qui concerne mon personnage, ils peuvent le tuer, ils peuvent le garder pendant des années, je suis partant. Je sais que ce sera pour le bien de la série, au bon moment. C’est tellement rare d’être sur un bon projet, mais tellement rare ! Et ça reprend tous les ans, donc si pour moi ça continuait encore dix ans, c’est un grand oui et un grand merci.

Les créateurs ont été malins sur deux choses : coller à l’actualité, et ne pas baser la série sur des explosions. Cela permet de ne pas être dans la surenchère tous les ans. C'est le cas des séries d’abord magnifiques mais finalement bidon, comme Homeland, où le héros survit à cinquante tentatives de meurtre et d’attentats. Tout ça n’existe pas. Ici, le personnage central, c’est le Bureau.

Comment est le travail de comédien sur une production comme Le Bureau des légendes ?

Florence Loiret-Caille : C’est comme un film qui fait des dizaines d’heures, on en a pas encore fait le tour, et nos personnages se développent constamment. Jamais je n’aurais cru par exemple que Marie-Jeanne passerait directrice.

Cette série permet d’explorer à fond le métier, avec différents acteurs, différents réalisateurs et réalisatrices, de faire des trucs qu’on n’a jamais faits. Pour moi, c’est toujours un challenge, je n’arrive pas forcément en confiance. J’ai plutôt une appréhension, vais-je y arriver ? Cette saison le personnage de Marie-Jeanne a la pression, il faut que j’arrive à gérer ces deux pressions, la mienne et celle de mon personnage ! Après, c’est quand même un super luxe de faire partie de cette troupe.

Marie-Jeanne - le bureau des légendes

Jonathan Zaccaï : c’est aussi rare d’avoir un créateur, au-dessus, qui connaisse autant son sujet, à un point où il n’y a quasiment pas de failles. On est comme sur-nourris, très encadrés. C’en serait presque frustrant parfois, et c’est en même temps génial parce que le chemin est strictement balisé.

M.K. : Le Bureau des légendes est constitué de plein de petits moments qui vont construire une tension très forte. En tant que comédien, tu n’as pas les moyens d’exprimer en une fois quelque chose de très fort. C’est parfois humiliant pour l’ego d’un acteur, on vient, on travaille, on pourrait peut-être faire mieux mais on n’a pas toujours le temps. On fait entièrement confiance à ce qui est écrit, tu n’es pas le centre, ni le sujet. Le sujet c’est le scénario, l’écriture. Et cette écriture plante des graines pour la saison suivante, donc les personnages et nous-mêmes sommes toujours en tension. Chaque saison, c’est un cran au-dessus, et il faut que les comédiens se sentent monter au fur et à mesure pour réussir. Là on est tous en montée, donc c’est tout bon.

Le Bureau des légendes saison 4, à partir du 22 octobre 2018 sur Canal+. Ci-dessous la bande-annonce :

Propos recueillis par Marc-Aurèle Garreau