Dans une tribune au "New York Times", l’actrice Salma Hayek accuse le producteur Harvey Weinstein de menaces et harcèlement sexuel et moral. Un récit particulièrement édifiant.
Dans une tribune au New York Times, l’actrice Salma Hayek lève le voile.
Harvey Weinstein était un cinéphile passionné, une tête brûlée, un producteur de talent, un père affectueux et un monstre. Pendant des années, il a été mon monstre.
Comme tant d’autres actrices (une centaine, dont Gwyneth Paltrow, Asia Argento ou Rose McGowan), la comédienne d’origine mexicaine confie à son tour avoir été la victime des sévices du puissant magnat désormais en disgrâce.
Des méthodes bien rodées
Le récit, édifiant, concorde avec la pléthore de témoignages de ses autres victimes présumées. Aussi, l’épouse de François-Henri Pinault évoque un homme manipulateur, à la fois délicat et agressif aux méthodes de séduction bien rodées. L’homme lui aurait demandé, à maintes occasions, de prendre une douche avec lui, d’avoir des rapports buccaux ou de se mettre nue devant lui avec une autre femme.
L’essentiel des faits rapportés auraient eu lieu durant la production du film Frida (sorti en 2002), biopic consacré à l’illustre peintre mexicaine Frida Kahlo, dont Salma Hayek est une grande admiratrice.
À l'âge d'or du mouvement muraliste, elle peignait de petits tableaux que tout le monde avait remarqués. Elle avait le courage de s'exprimer et d'affronter le scepticisme ambiant. Ma grande ambition était de raconter son histoire.
L’actrice était co-productrice et propriétaire des droits du script. L’autre partie de la production revenait à Miramax, soit la société de Harvey Weinstein.
Sabotage et harcèlement moral
Refuser les avances du producteur libidineux a bien failli lui coûter le rôle (l’un de ses meilleurs, soit dit en passant), et pourtant. Salma Hayek a tout fait pour rester maîtresse du projet, saisissant ses avocats pour récupérer le contrôle de la production. En vain, même si elle a su conserver le premier rôle, alors que Jennifer Lopez, alors au sommet, était vivement pressentie pour la remplacer au pied levé.
Il a alors prétendu que mon nom en tant qu'actrice n'était pas assez célèbre et que j'étais une productrice incompétente.
Si, au commencement du tournage, le harcèlement frontal semble s’arrêter, la fureur de Harvey Weinstein prend tout son sens. Et débute une autre forme de harcèlement, plus psychologique. Où le producteur, excédé qu’on puisse lui résister, fait ce qu’il peut pour saboter le film ou réaliser ses fantasmes par procuration (d’où les scènes saphiques, qui ont désormais comme un goût amer). Dès lors, on ne peut que saluer le courage de Salma Hayek, dont le témoignage, particulièrement inspirant, s’avère aujourd’hui plus que nécessaire – hélas.