Netflix a provoqué une levée de boucliers en lançant en test un outil permettant d'accélérer jusqu'à 1,5x la vitesse de lecture d'un programme. Un usage courant dans le podcasting, puisqu'il a été prouvé que l'oreille humaine pouvait s'accommoder d'une accélération. Mais concernant les images ? Plusieurs réalisateurs condamnent cette initiative de la plateforme de streaming.
Le temps est aux débats et aux oppositions. Après les critiques de Martin Scorsese et consorts concernant les films Marvel, c'est au tour d'une innovation concernant le streaming de faire l'actualité, et de diviser au sein de l'industrie hollywoodienne. Le test lancé par Netflix, sur les appareils sous Android, pour étudier l'opportunité d'accélérer la vitesse de lecture, ne fait pas que des adeptes, très loin de là. Certains réalisateurs de premier plan, dont certains ont des films sur la plateforme de streaming, ont très rapidement réagi pour condamner l'initiative.
Judd Apatow n'est pas du tout d'accord
Si l'ajustement de la vitesse de lecture n'est pas un outil nouveau, c'est son utilisation par Netflix qui pose problème. En effet, la plateforme Youtube et le logiciel VLC propose cet outil depuis longtemps. Elle peut être utile sur Youtube, qui propose tout type de contenus, et libre à chacun de faire ce qu'il entend de son logiciel VLC. Mais dans la mesure où Netflix offre des films et des séries, donc des propositions artistiques, cet outil peut potentiellement dénaturer l'expérience proposée par les créateurs de ces programmes. Déjà accusée de détourner le public du "vrai" cinéma, le service Netflix aurait selon certains franchi une limite de trop.
Judd Apatow, figure majeure de la comédie américaine, s'est ainsi rapidement posé en leader de la fronde.
Non Netflix. Non. ne m'obligez pas à appeler chaque réalisateur et créateur sur Terre pour vous combattre là-dessus. Gagnons du temps. Je gagnerai mais ça prendra énormément de temps. Ne jouez pas avec nos durées. Nous vous donnons de belles choses. Laissez-les être regardées comme elles ont été conçues.
Il poursuit le lendemain dans deux autres tweets :
Le public devrait être autorisé à le faire, si l'artiste ou le créateur est ok avec le principe. Si vous voulez regarder Le Parrain en 90mn, alors inventez votre propre procédé. Les services de streaming ne devraient pas proposer une manière de visionner un contenu différente de celle des créateurs sans leur autorisation Croyez-moi, les auteurs de The Office ou Friends ou The Irishman ne vont pas être ok avec un bouton de visionnage rapide. À ce compte-là, on peut même enlever le son et laisser les gens enregistrer leur propre son...
Il est notamment soutenu par Brad Bird, à qui l'on doit notamment Les Indestructibles et Mission : Impossible - Protocole Fantôme.
Une autre très mauvaise idée, et un autre coup porté à l'expérience cinématographique déjà au plus mal. Pourquoi d'un côté soutenir et financer la vision des réalisateurs, et de l'autre détruire la présentation de ces films ???
Ils ont été aussi rejoints dans leurs reproches par Peyton Reed, le réalisateur d'Ant-Man, qui a lâché quelques mots lapidaires : "C'est une très mauvaise idée, et moi-même ainsi que chaque réalisateur que je connais allons nous battre contre ça."
Netflix tente de rassurer
Devant la levée de boucliers, Netflix a réagi via un porte-parole, qui a tenté de calmer les choses.
Nous sommes toujours en train d'expérimenter des manières d'aider les abonnés à utiliser Netflix. Ce test permet la possibilité de varier la vitesse à laquelle les gens regardent les contenus sur leur mobile. Comme pour n'importe quel test, cela ne signifie pas que ce sera permanent.
Il est important de noter que Netflix teste l'outil pour les appareils mobiles, et qu'à l'heure actuelle seuls les appareils sous Android sont concernés par ce test. On peut aussi noter que ce test arrive peu avant la diffusion de The Irishman, qui avec une durée de 3h30 est à ce jour leur programme original le plus long.
Et d'une certaine manière, leur problématique est semblable à celle que les exploitants de salles de cinéma peuvent rencontrer : un film d'une durée très longue réduit logiquement le nombre de projections dans une journée. Pour Netflix, si on accélère le visionnage des programmes, alors on pourra logiquement en regarder plus...