Du rififi chez les hommes : ce casse ingénieux duquel le film s’inspire

Un célèbre braquage du XXe siècle

Du rififi chez les hommes : ce casse ingénieux duquel le film s’inspire

Référence du film noir signée Jules Dassin, "Du rififi chez les hommes" est une immersion dans le petit monde du crime organisé parisien des années 50. L’acte majeur du long-métrage est le casse orchestré par quatre malfrats, inspiré d’un célèbre fait divers du début du XXe siècle.

Du rififi chez les hommes : braquage à l’ancienne

Victime du maccarthysme après avoir tourné Les Forbans de la nuit, l’un de ses autres chefs-d’œuvre, Jules Dassin est blacklisté à Hollywood et fauché lorsqu’il accepte de mettre en scène Du rififi chez les hommes. Cette adaptation éponyme de l’ouvrage d’Auguste Le Breton sort en 1955. Le réalisateur américain décide de se concentrer sur une partie minime du roman : le casse d’une bijouterie parisienne.

Après cinq ans d’incarcération et une tuberculose, Tony le Stéphanois (Jean Servais) ressort affaibli de prison. Sur la paille, le criminel se voit proposer un coup par son ami Jo le Suédois (Carl Möhner) et leur partenaire Mario (Robert Manuel) : le braquage de Mappin & Webb. Pour réussir à percer le coffre rempli de diamants de la prestigieuse enseigne, les trois gangsters font appel à César le Milanais (Jules Dassin), un spécialiste venu d’Italie. Leur plan attire néanmoins les convoitises du milieu. Une bande rivale à laquelle est rattachée Mado (Marie Sabouret), l’ex-compagne de Tony, se met à les traquer.

Du rififi chez les hommes
Du rififi chez les hommes © Gaumont

Présentant des archétypes du genre et dressant un suspense à l'issue tragique inéluctable, Du rififi chez les hommes est un modèle du film noir. Le long-métrage est bercé par un argot formidablement manié par ses interprètes. Néanmoins, la séquence majeure parvient à se passer de tout dialogue. Sommet de tension et de précision duquel Michael Mann s’inspirera pour Le Solitaire, le braquage demeure l’un des plus impressionnants du septième art. Pendant plus de trente minutes, le quatuor de malfrats et le spectateur retiennent leur souffle, plongés dans l’obscurité d’un établissement de la rue de la Paix autour duquel rôdent les policiers.

Un célèbre fait divers parisien

Pour ce long moment dénué de musique, où le moindre son et le moindre éclairage mal orienté deviennent un danger, Jules Dassin s’inspire d’un fait divers survenu à Paris au début du XXe siècle. Et plus précisément dans la rue Quincampoix située dans le IIIe arrondissement.

Publié en 2004 aux éditions du Cherche Midi et cité par Le Parisien, le Guide du Paris des faits divers du Moyen-Âge à nos jours revient sur le casse orchestré par Marius Jacob et ses deux partenaires le 5 octobre 1901. Surnommés les "Travailleurs de la nuit", les voleurs cambriolent le bijoutier Bourdin. Pour cela, ils pénètrent dans l’appartement au-dessus de la boutique, et creusent un trou dans le parquet. Ils glissent un parapluie dans le trou et l’ouvrent. L’objet peut ainsi recueillir les gravats les plus imposants. Une percée qui leur permet d’accéder au magasin et de rafler les sept kilos d’or du coffre. Ils repartent aussi avec des bijoux, des titres négociables et 8000 francs en espèces.

Du rififi chez les hommes
Du rififi chez les hommes © Gaumont

Un anarchiste dans la Résistance

Marius Jacob aurait effectué une centaine de larcins en l’espace de cinq ans. Des crimes qui s’avèrent payants, du moins pendant un temps, puisqu'il aurait empoché cinq millions de francs. Condamné à la perpétuité, le voleur subit l'enfermement sur la redoutable île du Diable jusqu’en 1925. Ce pénitencier de Guyane a accueilli d’autres détenus célèbres. Henri Charrière a notamment raconté son évasion de cette prison dans son autobiographie Papillon, transposée à l’écran par Franklin J. Schaffner.

L’auteur anarchiste du "coup du parapluie" s’engage ensuite dans les Brigades internationales, puis dans la Résistance. Marius Jacob se suicide en 1953 à 64 ans, refusant la vieillesse et la déchéance qui l’accompagne. Deux ans plus tard sort Du rififi chez les hommes. Son coup le plus flamboyant permet - en plus de l’incroyable équilibre du film - à Jules Dassin de remporter un prix pour sa réalisation au Festival de Cannes.