La Belle et la Bête : la frustration de Christophe Gans comme point de départ du film

L'origine du projet

La Belle et la Bête : la frustration de Christophe Gans comme point de départ du film

En 2014, Christophe Gans dévoile sa version de "La Belle et la Bête". Une adaptation d’un conte incontournable née d’une frustration de spectateur qui remonte à très, très loin pour le réalisateur…

La Belle et la Bête : Christophe Gans s’approprie un conte emblématique

Après plusieurs projets avortés, parmi lesquels Fantomas, Rahan ou Bob Morane, Christophe Gans fait son retour au cinéma en 2014 avec La Belle et la Bête. Une adaptation du conte de Madame de Villeneuve qui permet au réalisateur de Crying Freeman et Le Pacte des loups de s’adresser à tous les publics, et de concevoir un film ayant "un pied dans le primitif et un pied dans la modernité", comme il le confie à Première.

Tourné dans les mythiques studios allemands de Babelsberg, où Metropolis a notamment vu le jour, le long-métrage repose sur des technologies comme la performance capture, qui donne vie à la Bête incarnée par Vincent Cassel. Une Bête isolée dans son château, au sein duquel un marchand ruiné (André Dussollier) vient se réfugier alors qu’une tempête de neige fait rage. Après avoir cueilli une rose rouge pour sa fille Belle (Léa Seydoux) dans cet endroit magique, il se voit condamné à mort par le propriétaire maudit des lieux.

La Belle et la Bête
Belle (Léa Seydoux) - La Belle et la Bête ©Pathé

Se sentant coupable du sort réservé à son père, Belle décide de se sacrifier pour lui. Après son arrivée dans le château, la Bête décide de la laisser en vie. Libre d’arpenter les couloirs et jardins du domaine féérique, l’héroïne a cependant l’interdiction de s’en échapper. Chaque soir, elle retrouve la créature pour le dîner et apprend à la connaître. Intriguée, la jeune femme va tenter de découvrir le terrible secret derrière l’apparence de son hôte, alors qu’ils s’éprennent l’un de l’autre.

Eduardo Noriega, Audrey Lamy et Sara Giraudeau complètent la distribution de ce film à l’esthétique chatoyante, inspirée en partie par la peinture du XIXe siècle, à commencer par celle du Premier et du Second Empire.

Dans l’ombre de Cocteau ?

Cette version diffère en de nombreux points avec celle de Jean Cocteau sortie en 1946, pour laquelle Christophe Gans voue une admiration sans borne. Lors d’un entretien accordé à Première, le cinéaste s’exprime sur le fait de succéder à l’auteur de La Machine infernale et déclare :

L’idée de me mesurer à La Belle et la Bête de Cocteau ne m’a jamais semblé folle ou blasphématoire. Non pas que je prenne ce film de 1946 à la légère - il compte parmi mes favoris et c’est une œuvre que je ne me lasse pas d’admirer - néanmoins Cocteau adapte un court texte de dix pages qui n’est que le "digest" d’un livre beaucoup plus long et infiniment plus riche. De la même façon, il a écarté de son film des aspects de l’histoire qui ne l’intéressaient pas : le déclassement social du marchand, la personnalité des sœurs de Belle, entre autres. Et puis le film reste avant tout un film de Jean Cocteau. La Belle et la Bête lui sert de prétexte à faire une œuvre aussi personnelle que son Orphée quelques années plus tard.

Considérant La Belle et la Bête avec Jean Marais et Josette Day comme un long-métrage éminemment personnel, Christophe Gans ne s’est pas senti écrasé par l’ombre de Cocteau. En plus de jouer avec plusieurs technologies et de tourner dans des studios légendaires pour un cinéphile de la trempe du réalisateur de Silent Hill, le projet lui permet d’explorer certains thèmes auparavant mis de côté.

Une frustration de jeune cinéphile en devenir

C’est par exemple le cas de la ruine du marchand, qui a une importance majeure dans la tournure des événements, mais aussi de l’origine de la Bête. Frustré de ne pas avoir pu en savoir plus sur les raisons de sa transformation en regardant le film de 1946, Christophe Gans a souhaité consacrer plusieurs séquences au passé du Prince maudit. Interrogé par Allociné, le cinéaste affirme :

Ce qui manquait au Cocteau et que nous nous pouvions développer, c’est évidemment l’histoire de la malédiction qui a transformé le Prince en Bête. Dans le Cocteau, il y a une ligne de dialogue pour expliquer. A un moment donné, Jean Marais dit : 'Mes parents ne croyaient pas aux fées. Elles les ont punis'. Même quand j’ai vu le film quand j’avais 5 ans, cette phrase a été une source de frustration pour moi. C’est-à-dire que j’avais envie de savoir comment la Bête était devenue la Bête. C’est exactement comme si vous voyez un film des X-Men et qu’on ne vous explique pas comment ils sont devenus des mutants. C’est pas possible.

Un constat et une envie d’aller au-delà du mystère qui marquent donc le point de départ de son adaptation de La Belle et la Bête.