Les Proies : découvrez pourquoi le film de Sofia Coppola a été accusé de racisme

Un féminisme jugé trop « blanc »

Les Proies : découvrez pourquoi le film de Sofia Coppola a été accusé de racisme

Une histoire qui se déroule dans un pensionnat pour jeunes filles ? Il n'en fallait pas plus pour que Sofia Coppola décide d'adapter pour la seconde fois le roman "Les Proies", écrit par Thomas P. Cullinan. Sauf que la réalisatrice a été la cible de nombreuses critiques, à l'époque. En cause : un casting entièrement blanc alors que le livre contenait des personnages noirs.

La difficile comparaison avec Les Proies de Don Siegel

La première difficulté du film de Coppola est de passer après Les Proies de 1971. En effet, le film réalisé par Don Siegel est la première adaptation du livre éponyme. Bien que le long-métrage ait reçu un accueil mitigé à sa sortie, il a été réhabilité avec le temps. Il faut dire que la performance de Clint Eastwood dans ce film est exceptionnelle. Alors que l'acteur était plus connu pour ses rôles dans des westerns, il impressionne de manière inédite dans ce drame historique. 

Pour rappel, Les Proies prend place en pleine Guerre de Sécession. Ainsi, on s'intéresse aux pensionnaires d'un internat de jeunes filles tenu par Martha Farnsworth. Un beau jour, elles recueillent un soldat gravement blessé. Alors qu'elles lui offrent gîte et soin, l'ambiance devient plus délétère dans le pensionnat. Tensions, jalousies et rivalités vont survenir. 

Bien qu'il ait obtenu le prix de la mise en scène au Festival de Cannes, la nouvelle adaptation réalisée par Sofia Coppola a obtenu des critiques froides de la part de la presse. Une surprise pour une réalisatrice acclamée par le passé grâce à des films tels que Virgin Suicides, Lost in Translation ou bien encore Marie-Antoinette. Surtout, le film s'est accompagné d'une controverse dont il se serait bien passé.

Un film féministe... blanc

La polémique vient du fait que les personnages noirs présents dans le roman ainsi que dans le film de 1971 ont été, soit évincés (Mattie), soit remplacés par des actrices blanches (Edwina, jouée par Kirsten Dunst dans Les Proies). Cette décision fait notamment réagir Seren Sensei, une écrivaine militante qui tacle vivement le film dans une tribune.

Surtout, selon Seren Sensei, Sofia Coppola avait répondu maladroitement aux accusations de whitewashing et de manque de diversité culturelle dont faisait preuve son film. Ainsi, la réalisatrice se justifia en précisant sa difficulté de représenter un personnage noir à l'écran, avec toute la responsabilité qui en découlait.

Les Proies
Les Proies ©Universal Pictures

Seren Sensei épingle donc Coppola, l'accusant de ne véhiculer qu'un seul type de féminisme : le féminisme blanc :

L’idée selon laquelle un casting entièrement blanc élimine tout contexte racial se repose sur l’assomption selon laquelle la blancheur elle-même n’est pas une race mais est invisible. Elle est la norme, le standard.

En outre, l'écrivaine rappelle que la filmographie de Sofia Coppola n'est basée que sur l'omniprésence d'un féminisme blanc, qui exclut toutes les autres races. Par le passé, la réalisatrice avait d'ailleurs été critiquée pour avoir "blanchi" un personnage originellement latina dans The Bling Ring.

Sofia Coppola défendue... ou pas

A ces lourdes accusations, Ira Madison III du Daily Beast décide de livrer à son tour une tribune pour répondre notamment à Seren Sensei. Ainsi, la journaliste affirme tout d'abord que les accusations de l'écrivaine sont tout bonnement hors-sujet. Elle explique ensuite qu'à une époque où des réalisateurs afro tels que Steve McQueen (12 Years A Slave), Ava Duvernay (Selma) ou Barry Jenkins (Moonlight) savent parfaitement répondre à ces questions raciales, Sofia Coppola est la dernière personne dont on voudrait qu'elle s'intéresse à ces problématiques :

Exiger qu'une femme blanche qui n'a jamais écrit un seul bon personnage de couleur de toute sa vie, plonge dans le monde de l'esclavage, me semble inutile. C'est semblable au fait qu'on demande aux frères Coen pourquoi leurs films ne contiennent que des Blancs.

Si l'auteure n'excuse ni le film ni les justifications de Sofia Coppola, elle exige donc plus de cohérence de la part de ceux qui tirent à boulets rouges sur la réalisatrice.