The Endless : échappez à la boucle en Blu-ray

Le nom « The Endless » ne vous dit rien ? C’est normal puisque ce long-métrage n’a pas bénéficié d’une sortie nationale dans les cinémas français. Pourtant, ce DTV mérite la curiosité autant qu’il divise les opinions tandis qu’il emprunte des codes à la science-fiction et l’horreur sur un fond de secte. Envie de le découvrir ? Rendez-vous le 24 avril 2019 dans les rayons DVD et Blu-ray si vous ne craignez pas les événements inexpliqués !

Troisième collaboration remarquée entre les réalisateurs, scénaristes et acteurs Justin Benson et Aaron Moorhead. Après avoir séduit spectateurs et critiques à travers le monde dans des festivals avec les indépendants Resolution (2012) et Spring (2014), le tandem revient avec The Endless sans jamais céder aux sirènes des blockbusters. Avec un petit budget mais de grandes ambitions, le duo a monté de toute pièce une œuvre réflexive qui a raflé plusieurs prix aux États-Unis et en Espagne. En France, il s’est fait une place dans la compétition durant le Paris International Fantastic Film Festival en 2017.

The Endless : présentation et critique

Le passé de deux frères (portant le même prénom que leurs interprètes) resurgit lorsqu’ils réceptionnent une lettre mystérieuse qui leur est destinée. À l’intérieur de celle-ci se trouve une cassette vidéo enregistrée au sein du Camp Arcadia où ils ont passé plusieurs de leurs jeunes années. Saisi par la nostalgie et l’envie de s’éloigner d’une routine qui le mine, Aaron n’a plus qu’une idée en tête : y retourner ne serait-ce qu’une journée. Cette idée n’est pas pour plaire à l’aîné pour qui les résidents ne sont autres que des membres d’une secte dont l’ambition se résume à un suicide collectif qu’ils surnomment « l’Ascension ». S’il finit par céder, Justin ne tarde pas à le regretter en s’apercevant qu’aucun d’entre eux n’a vieilli d’un iota en une décennie. À croire que le temps s’est arrêté.

Le concept des boucles temporelles n’a rien de très innovant que ce soit à la télévision ou au cinéma avec par exemple la référence Un Jour sans fin (1993) et plus récemment Miss Peregrine et les enfants particuliers (2016) de Tim Burton. Pourtant, l’équipe parvient à s’investir suffisamment dans l’écriture pour mêler à du vieux une sensation de fraîcheur insufflée par une utilisation de plusieurs genres entremêlés auxquels s’ajoute une quête identitaire. C’est d’ailleurs presque exclusivement sur les deux frères que repose The Endless en dépit de tous les personnages gravitant autour d’eux. Leur relation, leurs aspirations et leurs divergences d’opinions sont ce qui prime finalement. Malgré leur lien du sang, tout les oppose jusqu’aux dernières scènes où Aaron finit enfin par s’affirmer et Justin à lâcher du lest après avoir fait figure d’autorité depuis toujours. Cette évolution est intéressante tant cela semblait impossible en l’absence du phénomène surnaturel. Quoi de mieux que de crever l’abcès alors que tout semble perdu ?

Perdus dans un quotidien où tous deux sont inaptes à se trouver un travail digne de ce nom et à se constituer un groupe d’amis, les hommes sont confrontés à un choix existentiel difficile. Auprès de leurs anciens compagnons, ils seront constamment entourés au cours d’une vie certes immobile mais stable. Inutile d’angoisser à l’idée de devoir payer un loyer, de suivre les normes sociales pour survivre, etc. Mourir n’a rien de définitif. Cependant, ils seront pris au piège et seront incapables d’avancer, condamnés à un surplace éternel. Est-ce pire que l’incertitude, la douleur de l’insécurité et une fin de route inévitable ? En soi, n’est-ce pas aussi une répétition (presque) ininterrompue que d’intégrer la société synonyme de plannings et de règles à n’en plus finir ? Cruel dilemme qui ne fait pas forcément l’unanimité entre les protagonistes. À croire qu’il leur faut choisir entre la peste et le choléra. Ce qui n’est pas totalement faux vu sous cet angle.

Oui, le budget est mince. Oui, cela se ressent notamment à travers les effets visuels. Mais ce n’est pas tellement dérangeant. Cela donne d’autant plus de mérite aux cinéastes. En près de deux heures, si l’intrigue s’était éloignée du tandem, sans nul doute que du temps aurait dû être consacré à la fondation du Camp Arcadia et de ses occupants. D’autant plus que le public se retrouve dans un huis-clôt. De quand date-t-il exactement ? Pourquoi les boucles temporelles y sont localisées ? D’où viennent-ils tous ? Qu’est-ce qui les a poussés à se rendre dans cet endroit initialement ? En outre, on en sait très peu sur le « monstre » à la Lovecraft qui hante les lieux. Beaucoup de questions sont ainsi laissées en suspens, espérons par volonté plus que par manque d’inspiration.

Les éditions commercialisées

Tandis que de nombreux films sortis dans les salles obscures sur le sol français ne sont pas édités en Blu-ray, ce direct-to-video a bel et bien droit à sa galette bleue ! Initiative appréciée de la part de Koba Film qui permet donc une découverte dans des conditions de visionnage optimales. Difficile de reprocher l’absence d’une édition à part avec un packaging élaboré (steelbook, digipack…) ou de suppléments exclusifs à un marchand dans de telles conditions. Petit plus : l’utilisation d’un boîtier plastique noir bien plus accordé à la jaquette que ne l’aurait été un traditionnel du format.

De gauche à droite : DVD, Blu-ray

Test Vidéo/Audio

Le film a été tourné à l’aide d’une caméra Red Dragon et probablement finalisé en 2K. Le directeur de la photographie (Moorhead, encore lui) a opté pour un look très hétérogène à mille lieux de la netteté chirurgicale de la HD habituelle. The Endless joue énormément avec ses visuels que les passionnés prendront soin d’analyser à la lumière du scénario. La partie précédant le retour des protagonistes au Camp est d’apparence la plus floue, presque « out of focus », comme si le spectateur était aussi distancé des personnages qu’eux de leur propre existence qu’ils jugent sans intérêt. Ils sont confus, tout leur échappe, ce qui est également représenté par l’usage occasionnel de distorsions.

Dans sa majorité, le film a de faibles contrastes et donne parfois l’impression de se noyer dans un tremplin de lumière comme lors de la traversée en voiture jusqu’à Arcadia. Ce parti-pris rend d’autant plus difficiles les passages dans les extérieurs poussiéreux ensoleillés. En outre, cela aplatit l’image dont les ombres sont moins percutantes et où la délinéation est affaiblie. On repassera pour une vidéo aux sensations 3D étourdissantes ! En dépit de cette caractéristique, de nombreux plans offrent une définition riche rappelant la nécessité du Blu-ray. Notamment les gros plans. Quant aux couleurs, elles sont tout aussi variables que le reste avec des températures et des saturations variables, du désaturé à l’irréel, en passant par le (presque) naturel. Un festin pour les yeux en somme !

Que l’on opte pour le doublage français ou la version originale, le format DTS-HD 5.1 l’emporte dans les deux cas. Les dialogues ne sont pas rares avec The Endless, bien à l’opposé même ! Les voix sont claires sans soucis de compréhension et sont jointes par des bruits environnementaux (chant des oiseaux, vent…) facilitant l’immersion en particulier lors des scènes en extérieur. Les jump scare se comptent quant à eux sur les doigts de la main mais ils permettent à la piste des moments énergiques exploitant davantage les basses dans un soubresaut. Une réussite toute en subtilité.

Test Bonus

Du côté des compléments, le making of remporte la palme avec ses 30 minutes aussi informatives que visuellement riches. Là où le bât blesse est la perte de multiples bonus fournis dans l’édition américaine dont plusieurs minutes de scènes coupées et un commentaire audio des cinéastes.

  • Making of (31:35 min) : large tour d’horizon avec Justin Benson et Aaron Moorhead s’exprimant face à la caméra pour aborder les sujets classiques relatant de la mise en place et de la production du film (naissance de l’idée, développement…) jusqu’aux effets spéciaux, la bande originale composée par Jimmy LaValle (Grey’s Anatomy) et le mixage. D’autres témoignages y sont greffés au fil des minutes comme ceux des décoratrices. Le supplément est aussi ponctué d’images capturées durant le tournage permettant au spectateur de s’y émerger et de rythmer la demi-heure.
  • La conception des effets spéciaux (2:34 min) : featurette balayant rapidement le processus de création des effets spéciaux. Aucune information n’est donnée, il s’agit de plans avant/après étape par étape.
  • Espace découverte : ici sont présentées les bandes-annonces de I Origins (2:20 min), La Jeune fille et la brume (1:39 min), Lucky Man – saison 1 (1:29 min) et SS-GB (2:49 min).

The Endless est disponible ici en DVD et Blu-Ray.

Note de la rédaction

Film

Vidéo

Audio

Bonus

« The Endless » est inventif, mystérieux, intriguant et relativement subtil dans son intégration du fantastique. Il pose aussi beaucoup de questions sans forcément y répondre et met en avant des acteurs appliqués ainsi qu’une mise en scène soignée avec les moyens du bord. Sa photographie complexe donne du fil à retordre pour le Blu-ray qui s’en sort avec les hommages, avec en bonus des suppléments acceptables.

Note spectateur : Sois le premier