Affamés : Scott Cooper et Guillermo del Toro convoquent un monstre légendaire

Affamés : Scott Cooper et Guillermo del Toro convoquent un monstre légendaire

CRITIQUE / AVIS FILM – Produit par Guillermo del Toro et réalisé par Scott Cooper, "Affamés" est un film d’horreur qui reprend une célèbre légende. Un voyage au cœur d’une petite ville américaine isolée, marquée par une terrible tragédie familiale et l'apparition d'une créature terrifiante…

Affamés : de belles promesses

Sur le papier, l’association entre le réalisateur Scott Cooper et le producteur Guillermo del Toro pour Affamés intrigue. D’un côté, le premier a signé plusieurs drames particulièrement touchants, emprunts de désespoir et de beauté dans leur manière de s’attarder sur des personnages désabusés, avec Crazy Heart et surtout Les Brasiers de la colère.

Après Strictly Criminal, anecdotique film de gangsters sur "Whitey" Bulger, le cinéaste réalise son œuvre la plus aboutie à ce jour avec Hostiles. Dans ce western sorti en 2018, un capitaine de l’armée américaine doit escorter un chef indien au cours d’un voyage où resurgissent les tensions et la violence.

Affamés
Affamés © Walt Disney Studios Motion Pictures

Quant à Guillermo del Toro, ses apports au genre horrifique ne sont plus à présenter, qu’il s’agisse de L’Échine du diable, Blade II ou encore Crimson Peak. Et si ses projets en tant que producteur n’ont pas toujours été à la hauteur (Don’t Be Afraid of the Dark), de belles surprises sont parfois sorties du lot, comme L'Orphelinat ou Mama. S’il n’égale pas les meilleurs longs-métrages respectifs du tandem, Affamés se classe dans cette deuxième catégorie.

Une famille rongée par le mal

Le film se déroule dans une petite ville de l’Oregon. Alors qu’ils fabriquent de la "meth" dans un laboratoire situé dans une mine abandonnée, deux hommes sont violemment attaqués par une créature invisible, qui s’en prend aussi au fils de l’un d’eux. Trois semaines plus tard, Julia Meadows (Keri Russell) s’inquiète que l’un de ses élèves, le jeune Lucas (Jeremy T. Thomas), soit victime d’abus. Elle est loin d’imaginer que le garçon s’occupe secrètement de son petit frère Aiden et de son père Frank (Scott Haze), victimes d’une transformation inquiétante depuis l’incident de la mine. En parallèle, le shérif Paul Meadows (Jesse Plemons), frère de l’enseignante, retrouve un corps déchiqueté dans la forêt.

Affamés
Affamés ©Walt Disney Studios Motion Pictures

Comme pour Les Brasiers de la colère (ainsi que celle de Rosamund Pike dans Hostiles), Scott Cooper se penche sur une famille détruite dans Affamés - voire deux étant donné que les personnages incarnés par Keri Russell et Jesse Plemons souffrent également d’un lourd passé. S’il n’offre jamais de moments aussi poignants que ceux de ses prédécesseurs, le film d’horreur vaut avant tout pour l’histoire de Lucas (basée sur la nouvelle The Quiet Boy de Nick Antosca), qui s’entête à vouloir préserver les siens alors que tout semble d’emblée perdu pour eux. Leurs scènes de confrontation sont à la fois les plus glaçantes et les plus touchantes, au point que les Meadows apparaissent vite comme des personnages accessoires utiles pour faire avancer le récit, moins pour amplifier les ressorts dramatiques.

Une terre meurtrie

Inspirée d’une célèbre légende amérindienne qu’il vaut mieux ne pas divulguer pour ne pas gâcher les quelques surprises du long-métrage, la malédiction des Weaver engendre une ambiance sombre et lourde dans ces grands espaces grisailleux, qui accentuent eux-mêmes l’inéluctable fatalité d’Affamés. Dans sa façon d’investir un territoire rural souillé et populaire pour y développer une intrigue autour de créatures mythiques, le film fait le pont entre certaines œuvres de Scott Cooper (Les Brasiers de la colère, Hostiles) et Guillermo del Toro (L’Échine du diable, Le Labyrinthe de Pan).

Affamés
Affamés © Walt Disney Studios Motion Pictures

Malgré des scènes brutales et glauques ainsi que les apparitions d’une créature imposante et terrifiante au design très réussi, Affamés peine malheureusement à surprendre. Une fois que le folklore est abordé par un personnage interprété par Graham Greene, le long-métrage trouve ses limites et enchaîne les passages attendus. Il ne renonce cependant pas à sa noirceur jusque dans sa fin pessimiste.

Si elle n’atteint pas l’inquiétante mise en place, cette conclusion empêche la deuxième partie de rester cloisonnée dans un terrain prévisible et balisé, en annihilant tout espoir de reconstruction. Si elle parvenait à irriguer Hostiles, la lumière n'a ici tout simplement pas sa place, ce que retranscrit d'ailleurs l'esthétique lugubre d'Affamés. Cette fois-ci pour Scott Cooper, les cauchemars du passé ont tout englouti.

Affamés de Scott Cooper, en salle le 17 novembre 2021. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

S’il peine à surprendre, "Affamés" vaut néanmoins pour l’histoire familiale tragique qu’il raconte, ainsi que pour son atmosphère lugubre inspirée par le folklore amérindien.

Note spectateur : 2 (1 notes)