Flo : la réalisatrice revient sur les polémiques autour de son film

Flo : la réalisatrice revient sur les polémiques autour de son film

Rencontrée avec son équipe au Festival du Film Francophone d’Angoulême, la réalisatrice Géraldine Danon revient sur la polémique autour de son film "Flo", consacré à la célèbre navigatrice Florence Arthaud.

Flo : Géraldine Danon répond aux critiques

Nous avons rencontré lors du Festival du Film Francophone d’Angoulême l’équipe de Flo (long-métrage consacré à la vie de la navigatrice Florence Arthaud). Sa réalisatrice Géraldine Danon est revenue sur  sa vision fictionnelle et les polémiques autour du film. L'actrice Stéphane Caillard (Florence Arthaud) et les acteurs Alexis Michalik (Olivier de Kersauson) et Samuel Jouy (Jean-Claude Parisis) ont de leur côté abordé la préparation au tournage et la responsabilité de leurs incarnations.

Comment est venue l'idée du film ?

Géraldine Danon : Le livre de Yann Quéffelec La Mer et au-delà a été le déclencheur. Dans le livre, j’ai retrouvé un parfum très fort de Florence et je me suis dit qu’il fallait lui rendre un hommage pour que les générations à venir découvrent cette femme extraordinaire et ce marin d’exception, qui a fait de sa vie un rêve et s’est battue pour ça. De plus, Florence travaillait à un projet de film sur sa vie de son vivant et y tenait beaucoup. J’avais envie de continuer son travail. Je me suis très librement inspirée du livre, mais Yann Quéffelec est venu travailler avec moi sur le scénario que j’ai essayé de construire comme une partition avec des hauts, des bas et un cœur qui bat. Je ne me suis rien interdit, j’ai essayé d’aller chercher l’âme de Florence, de mon point de vue personnel et subjectif.

Stéphane Caillard - Flo ©Metropolitan FilmExport
Stéphane Caillard - Flo ©Metropolitan FilmExport

Que répondez-vous à propos des polémiques ? (Hubert Arthaud, frère de Florence Arthaud, a notamment grandement critiqué le projet, ndlr)

G.D : Je réponds : allez-voir le film ! Tout le monde voit bien que je me suis attachée à la lumière, et pas à autre chose. Je ne connais rien d’autre de Florence que la lumière. Florence était comme un funambule qui marchait sur un fil, toujours prête à tomber d’un côté ou de l’autre. Les marins ont cette conscience de la mort, ils sont extrêmement vivants. Tout le monde savait qu’elle jonglait avec la vie, et la mort finit par la faucher à un moment où on s’y attend le moins.

Stéphane Caillard : C’est un film sur Florence Arthaud avec le point de vue offert par Géraldine Danon et qui passe par moi comme vecteur. C’est un mélange de nous trois. Le scénario et le rôle tels quels permettent de ne pas se faire de nœuds au cerveau par rapport au fait qu’elle ait existé.

Incarner Florence Arthaud

De quelle manière avez-vous géré la pression liée à l’incarnation du personnage de Florence Arthaud ?

S.C : Si pression il y a eu, Géraldine était de fait très bien placée pour m’y accompagner. J’ai aussi été entourée par les navigateurs Philippe Poupon et Philippe Monnet et tous les gens qui ont partagé un moment de leur vie avec Florence Arthaud. Il y avait beaucoup d’énergie positive et de savoir-faire très généreux qui s’est mis à mon service. La pression s’apparente à une exigence envers moi-même, que ce soit sur ce film ou dans ma manière d’aborder mon travail, le scénario et le rôle. Plus on s’engouffre dans le travail, moins on a peur d’affronter le fait qu’elle a été un personnage public avec une forte notoriété, une icône qui habite l’imaginaire collectif.

G.D : Il y avait surtout une grande comédienne, avec une intelligence et une subtilité de jeu. Elle est habitée par le rôle : c’est mon Stradivarius étanche !

Stéphane Caillard et Géraldine Danon ©Sylvie-Noëlle pour CinéSérie
Stéphane Caillard et Géraldine Danon ©Sylvie-Noëlle pour CinéSérie

Samuel Jouy est Jean-Claude Parisis, Alexis Michalik en Olivier de Kersauson

Quelle était votre vision à propos de l'incarnation des deux marins avec lesquels Florence Arthaud a eu des relations amoureuses ?

Samuel Jouy : Au début j’ai passé des essais pour interpréter Olivier de Kersauson, mais la lecture du scénario m’a plus donné envie de jouer Jean-Claude Parisis. Je me trouvais plus de points communs avec lui, ce que je cherche toujours avec les personnages. J’ai lu son livre, c’est un paysan d’Auvergne qui rêve d’accéder à un milieu qui n’est absolument pas le sien, puisque la classe sociale de la bourgeoisie était ultra-dominante à l’époque dans la voile. Il rêvait de mer en regardant une flaque d’eau dans une grotte.

Contrairement à Philippe Poupon, qui est le Zidane ou le Federer de la voile, mon personnage est un outsider, respecté par les marins, laborieux avec aucune qualité innée pour la voile si ce n’est son courage et son utopie. Je trouvais ce personnage épique, romantique et flamboyant et son côté d’affronter le péril, la mer et la mort me parlait beaucoup. Je me suis senti une responsabilité de ne pas trahir l’esprit de Parisis et la réalisatrice m’a laissé libre de faire mes propositions. Plutôt que de le singer comme un imitateur le ferait, je préfère toujours évoquer l’esprit du personnage qui a existé, à la manière de Michel Bouquet avec Mitterrand ou de Vincent Cassel avec Mesrine.

Stéphane Caillard et Alexis Michalik - Flo ©Metropolitan FilmExport
Stéphane Caillard et Alexis Michalik - Flo ©Metropolitan FilmExport

Alexis Michalik : Même si je connaissais le personnage, j’ai découvert dans le scénario comment Géraldine avait écrit leur relation, avec des dialogues truculents. De tous les marins, ce n’est pas celui qui a gagné le plus de courses, mais c’est le plus connu. On a en tête qu’il faut que le personnage de fiction ressemble au personnage existant, et on a un truc de mimétisme à aller chercher, une rencontre à faire. C’était un challenge de trouver le bon timbre de voix, le bon phrasé et on a fait le choix de ne pas lui mettre le petit cheveu qu’il avait sur la langue. J’aime profondément Kersau parce que la verve, le charisme, la répartie de la culture, la figure du marin lettré capable de parler aussi de la mer, le côté un peu Cyrano.

Un tournage difficile

Pouvez-vous nous parler de la préparation et des difficultés du tournage sur l’eau ?

G.D : J’avais un conseiller voile en la personne de Philippe Monnet à qui j’expliquais ce que je voulais et qui transmettait à Stéphane le bon geste. Le geste est beau dans la voile, c’est un art de vivre très élégant.

S.C : Je n’avais aucune expérience de la voile, mais on s’est amariné sur un beau monocoque avec Samuel Jouy aux Glénans pendant un stage de 10 jours. Le tournage a duré 60 jours mais a été très diffus sur une année entre la préparation et les multiples destinations et la partie en mer. Par chance, l’arrivée de la route du Rhum a été tournée à la fin du film, et mon état de fatigue rejoignait très bien l’espèce d’usure joyeuse de fin de course.

Flo ©Metropolitan FilmExport
Flo ©Metropolitan FilmExport

S.J : Je n’avais jamais fait de voile et j’ai appris pour le film. Autant apprendre la technique et les nœuds me soulait, autant j’ai aimé barrer et attraper le vent. J’ai eu beaucoup de mal avec la houle et ça m’a confirmé que je viens de la terre et que je n’ai pas le pied marin !

Samuel Jouy et Alexi Michalik, vous êtes souvent nus dans Flo. Etait-ce facile ?

S.J : C’est la première fois que je suis nu à l’écran et ça sera la dernière ! Je l’ai fait parce que ça le racontait. C’est un sauvage rugueux et solitaire qui se fiche de tout et de tout le monde, il prend sa douche en public car il n’a aucune convenance sociale. Et la réalisatrice voulait que, pour une fois, on puisse voir le cul des mecs.

A.M : Ils sont toujours tous à poil sur les bateaux, ils vont au bout de l’effort et ont besoin de lâcher la pression après ces mois en solitaire. Donc c'est cohérent.

Flo de Géraldine Danon, en salles le 1er novembre 2023.