Le réalisateur Hou Hsiao-hsien doit arrêter sa carrière en raison de sa santé. Son dernier film restera "The Assassin" (2015), un sublime film de sabres porté par Shu Qi, sa muse depuis "Millennium Mambo (2001). Retour sur la carrière de ce grand cinéaste taïwanais.
Hou Hsiao-hsien met un terme à sa carrière
Ce 24 octobre 2024, on apprenait que la santé d'Hou Hsiao-hsien était plus que préoccupante. En effet, le réalisateur serait atteint de démence, au même titre que l'acteur Bruce Willis. L'information a été confirmée par la famille du réalisateur taïwanais dans un communiqué (traduit par The Film Stage) dans lequel on apprend que le réalisateur est atteint d'Alzheimer. Si dans un premier temps la maladie n'aurait pas eu d'impact sur son travail, les séquelles d'un long Covid auraient fait changer la donne. Bien que sa famille affirme qu'il est aujourd'hui "en bonne santé", il ne devrait plus pouvoir reprendre la production de son dernier film en développement, Shulan River, comme l'annonce IndieWire.
Le cinéma magnifique de Taïwan
Hou Hsiao-hsien laisse donc derrière lui une filmographie importante, composée de films variés. Car s'il débute dans les années 1980 par des divertissements, il perfectionne ensuite un style singulier avec des films où le temps semble arrêté. Une caméra quasiment immobile, un cadre, et des acteurs qui évoluent devant avec naturel dans de longues séquences. Citons ainsi le très beau Les Fleurs de Shanghai (1998) dans lequel le cinéaste réunissait Tony Leung Chiu-wai, Carina Lau et Michele Reis.
Mais avant cela, Hou Hsiao-hsien s'intéresse à Taïwan, à son histoire, aux personnes qui y vivent, allant jusqu'à proposer des œuvres autobiographiques. Des drames minimalistes avec toujours ce temps suspendu. Si Les Garçons de Fengkuei (1993) est son premier film important, Un temps pour vivre, un temps pour mourir (1985) et La Cité des douleurs (1989, Lion d'or à la Mostra de Venise) viennent rapidement après.
Shu Qi, de Millennium Mambo à The Assassin
Mais pour l'auteur de ces lignes, c'est davantage son film suivant qui sera retenu : Millennium Mambo (2001). Dedans, Hou Hsiao-hsien film une jeunesse perdue à l'aube du nouveau millénaire. Une jeunesse déshumanisée et dont le quotidien se résume aux sorties en boîtes, à la prise de drogues, à l'alcool et aux cigarettes.
Pour incarner cette génération, le réalisateur choisit Shu Qi, jamais aussi magnifiée que sous la direction d'Hou Hsiao-hsien. Elle y joue Vicky, enfermée dans une relation toxique et qui devra tout quitter pour enfin vivre. Dans Millennium Mambo, chaque plan est d'une beauté rare. Et derrière l'apparente simplicité du long-métrage, se cache un regard profond sur le monde. Et ce, dès son premier plan où tout se joue.
Après cette première collaboration avec Shu Qi, Hou Hsiao-hisen retrouve sa muse avec Three Times (2005), sur trois histoires d'amour à trois périodes différentes. Face à la comédienne, c'est cette fois Chang Chen qui éblouit, que ce soit en 1911, en 1966 ou en 2005. Le duo se retrouve dix ans plus tard, et après Le Voyage du ballon rouge (2007), dans The Assassin (2015), qui permet à Hou Hsiao-hisen d'aborder le wu xia pian (film de sabres) à sa manière. Shu Qi y est quasiment mutique et superbe en tueuse trahie par un ancien amour.
Après avoir été récompensé du prix du jury au Festival de Cannes en 1993 pour Le Maître de marionnettes, et en 2001 pour Millennium Mambo, Hou Hsiao-hsien obtient donc une dernière récompense lors du 68e Festival avec le prix de la mise en scène décerné à The Assassin. Un dernier film qui conclut brillamment une grande carrière.