Une Île : entretien avec Laetitia Casta et l'équipe de la série d'Arte

Une Île : entretien avec Laetitia Casta et l'équipe de la série d'Arte

L’équipe de « Une île » était venue en nombre à Séries Mania pour présenter la série fantastique d’Arte qui modernise le mythe des sirènes. À l’occasion d’une table ronde, nous avons pu rencontrer Laetitia Casta, l’interprète de la sirène Théa, le réalisateur Julien Trousselier et la productrice Nicole Collet pour discuter de la série.

Des morts suspectes bouleversent le quotidien des habitants d’une île. Ces événements coïncident étrangement avec l’arrivée d’une inconnue, Théa (Laetitia Casta), trouvée dans le bateau d’un pécheur. Cette dernière va bouleverser la vie de la jeune Chloé (Noée Abita).

L'équipe de Une île, et notamment Laetitia Casta, le réalisateur Julien Trousselier et la productrice Nicole Collet, étaient présents à Séries Mania pour parler de la série fantastique d’Arte qui propose une relecture moderne du mythe des sirènes. Voilà ce qu'ils nous ont dit.

Sur le mythe de la sirène comme moteur de Une île.

Nicole Collet : Je trouve que le mythe de la sirène est intéressant parce que ça parle du pouvoir des femmes, de sexualité, de la nature et de la manière dont on peut la préserver ou pas. Toutes ces thématiques me plaisent personnellement. De plus, ça permet de ne pas être dans un genre très atypique, mais dans un genre hybride, entre polar et fantastique.

Julien Trousselier : Aussi on avait l’envie de sortir des pamphlets du mythe de la sirène, d’être dans quelque chose de plus ambigu, âpre, et d’appuyer sur la dualité entre l’humanité et l’animalité.

Sur la présence de Laetitia Casta sur le projet.

Laetitia Casta : Quand on m’a parlé de ce projet autour d’une sirène dans une île en Corse, ma première réaction ça a été : « mouais » (rire). Puis on a vraiment insisté pour que je lise le script et que je rencontre le metteur en scène, Julien Trousselier. En voyant le travail qu’il avait déjà fait j’ai trouvé sa manière de filmer, de regarder les personnages, très intéressante. Ça a commencé à me convaincre, puis à la lecture du scénario j’ai retrouvé ce que dit Nicole sur l’aspect écologique, sur l’animalité, l’instinct féminin. Il y avait quelque chose de très fort, mais également une puissance du personnage qui me plaisait.

Sur son personnage, Théa, la sirène.

L.C : Théa c’est un personnage qui vient remettre de l’ordre, venger la nature et surtout transmettre. Elle est en train de vivre la fin de son monde donc elle veut récupérer la dernière sirène, la faire se révéler pour perpétuer l’espèce et la protection de la nature. C’est quelque chose de très actuel. À la fois écologiste, et féministe par cette thématique de l’éveil des femmes. On parle d’une prise de conscience ce qui rend le discours profond, sensible et émotionnel.

De plus, elle se rebelle, mais comme la nature peut se rebeller. C’est un peu comme les animaux, lorsqu’ils se défendent s’ils sont attaqués, ce n’est pas qu’ils sont méchants, c’est la conséquence de quelque chose. Donc c’était intéressant justement de ne pas interpréter un personnage dit « méchant », mais de voir qu’elle a des convictions.

J.T : En fait elle incarne la lutte perpétuelle entre l’homme et la nature. Elle est dans une défense naturelle. C’est ce qui est beau.

Sur l’utilisation de décors naturels en Corse.

J.T : C’était important pour moi de donner le sentiment qu’on puisse se trouver n’importe où. Cela permettait de perdre autant les personnages que les spectateurs. Également, je voulais créer un univers fort pour pouvoir amener de manière discrète et subtile le fantastique. Créer un univers qui soit hors de toutes les cartes. Mais pour en venir à l’île, c’est un lieu qui représente bien la jeunesse qui s’ennuie et cherche à tuer le temps et a une envie de départ qui est fondamentale dans la construction de l’adolescent. J’aime beaucoup Larry Clark qui travaille sur cette jeunesse désœuvrée qui n’a que le sexe et la défonce pour s’échapper. Je pense qu’Une île parle un peu de ça également, avec les jeunes cantonnés à travailler dans l’usine de poisson. Ils ne veulent plus faire ça, ils veulent s’enfuir vers le continent qui, lui, est la promesse d’un avenir meilleur.

Sur l’intrigue qui tourne autour des secrets de famille.

L.C : Dans une île comme la Corse, d’où je viens, il y a quelque chose avec les histoires de famille en famille, de villages en villages. Il y a beaucoup de secrets, de silences, de choses qui pèsent. On sent cette ambiance lourde dans la série qui vient toucher les personnages.

J.T : Oui on s’est beaucoup servi de ce principe de la rumeur qu’on peut retrouver sur une île, qui nous permet de dévoiler une intrigue autour d’un secret de famille qui va être révélé. C’est ce qui va permettre de faire basculer le destin des protagonistes, et notamment des jeunes, les précipiter dans le mur même. Laetitia est en fait le révélateur, celle qui permet de faire resurgir un secret profond.

Sur le tournage en milieu aquatique.

J.T : L’idée c’était d’être le moins possible dans des piscines mais en milieu naturel. C’était un vrai défi logistique et de sécurité de tourner comme cela. Il y a eu un vrai danger pour elles. Mais on avait quand même quatre plongeurs autour de chaque fille, une caméra spécifique… Si on a opté pour cette logistique c’est parce que je pense que la nature, et donc la mer, est un très bon directeur de comédiens. La contrainte de l’élément influe sur la mise en scène, il y a une forme de réalisme qui se crée tout de suite. Mais donc c’était une grosse préparation, il faut beaucoup de confiance aussi avec les comédiennes. C’est difficile mais c’est aussi pour ça qu’on fait ce travail. C’est des moments où rien ne se passe comme prévu, où il faut se servir de l’instant.

Une île sera diffusée prochainement sur Arte. Retrouvez nos impressions sur les deux premiers épisodes.