Simetierre : adaptation réussie du roman de Stephen King

Simetierre : adaptation réussie du roman de Stephen King

CRITIQUE FILM - 20 ans après sa première adaptation, « Simetierre », l’ouvrage culte de Stephen King, a droit à une nouvelle version au cinéma. Plus soigné que son prédécesseur, ce film d’une noirceur absolue réussit à garder l’esprit de l’œuvre d’origine tout en s'offrant plusieurs écarts intéressants.

Paru en 1983, Simetierre est probablement l’une des œuvres les plus noires de Stephen King. Avant qu'il ne s'impose comme un bestseller, l’auteur ne voulait d’ailleurs pas publier le roman, le jugeant trop personnel et trop effrayant. L’écrivain est finalement revenu sur sa décision, pour le plus grand bonheur de ses fans, et de l’industrie cinématographique.

Après une première adaptation réalisée par Mary Lambert - et scénarisée par King lui-même - sortie en 1990 en France, Simetierre est de nouveau transposé au cinéma par Kevin Kölsch et Dennis Widmyer, le duo derrière Starry Eyes. Si leur long-métrage n’est pas foncièrement nécessaire, il parvient tout de même à distiller une ambiance macabre à souhait. Le film a par ailleurs le mérite de surprendre les connaisseurs de ce drame familial grâce à quelques changements efficaces apportés à l’intrigue.

Un drame familial lugubre

Simetierre raconte l’installation des Creed à Ludlow, une petite ville du Maine, État que Stephen King affectionne particulièrement. Au premier abord, leur humble demeure et ses environs ont tout de la propriété familiale idyllique, si l’on exclut la route régulièrement empruntée par des camions fonçant à toute allure, située à proximité de la maison. Néanmoins, Louis Creed comprend rapidement grâce à son énigmatique voisin Jud Crandall qu’une présence malfaisante repose sous ses terres. Lorsque la famille affronte un terrible drame, le docteur réalise peu à peu qu’il est sur le point de réveiller ce mal.

S’il ne propose rien d’original dans le paysage du film d’horreur, Simetierre n’en demeure pas moins un long-métrage captivant, notamment grâce à son ambiance inquiétante et morbide. Le film bénéficie tout d’abord de la photographie léchée de Laurie Rose, qui a travaillé sur la série Peaky Blinders ainsi que sur le terrifiant Kill List. La teinte bleutée des séquences nocturnes se déroulant dans les bois renforce par exemple habilement la sensation d’osciller entre rêve et réalité. Les séquences cauchemardesques font d’ailleurs partie des passages les plus réussis du film, que ce soit celles impliquant Louis Creed ou celles vécues par sa compagne Rachel.

Critique Simetierre : adaptation réussie du roman noir de Stephen King

Alors qu’ils tentent dès le début de rassurer leur fille sur sa peur de la mort, les parents sont progressivement rattrapés par leurs propres craintes et leurs douloureux souvenirs. Ne multipliant pas les jump-scares et autres effets faciles à outrance, les réalisateurs parviennent à susciter l’effroi en évoquant les angoisses de Louis et Rachel Creed, ainsi que leur imaginaire chamboulé par des visions horrifiques. Certains choix de mise en scène fonctionnent parfaitement pour donner l’impression que les ténèbres engloutissent la famille Creed. C’est le cas lorsque Louis Creed ouvre sa porte en pleine nuit et se retrouve directement dans la forêt où se situe le fameux cimetière pour animaux.

Long-métrage efficace et sans prétention, Simetierre témoigne par ailleurs de l’amour que les réalisateurs portent au travail de Stephen King, qui a toujours autant le vent en poupe au cinéma. Tout en gardant les thématiques fondamentales du roman, Kevin Kölsch et Dennis Widmyer s’octroient quelques libertés avec le récit, proposant ainsi une relecture intéressante à défaut d’être passionnante de cette histoire profondément cruelle.

Des changements intéressants vis-à-vis du roman de Stephen King

L’une des réussites du film est de n’avoir pas trop joué sur le folklore autour du cimetière indien situé derrière le « simetierre » pour animaux, autour de la résurrection et du terrifiant, bien qu’invisible, Wendigo. Sans totalement délaisser l’ambiance surnaturelle du récit (du moins dans la première partie), les scénaristes Matt Greenberg et Jeff Buhler préfèrent se focaliser sur les relations familiales, à commencer par celle entre Louis Creed et sa fille Ellie, brillamment interprétée par Jeté Laurence. Pivot de l’intrigue, c’est elle qui découvre le cimetière pour animaux domestiques construit par les enfants de Ludlow, et qui tisse immédiatement des liens avec Jud Crandall, auquel l’excellent John Lithgow apporte toute l’ambivalence nécessaire.

L’attachement que le voisin et les parents portent à la petite fille est toujours palpable, ce qui rend le drame que vivent les Creed plus touchant que dans le Simetierre de Mary Lambert. L’un des défauts de ce dernier était de suivre la trame du roman en faisant du benjamin de la famille, le petit Gage, la principale présence maléfique du long-métrage - si l’on met de côté celle du terrifiant et vicieux Church, le chat d’Ellie. Étant donné que le film est ici centré autour d’un personnage plus âgé, les réalisateurs ont la possibilité de développer des rapports plus complexes, et les notions de perte et de deuil ressortent beaucoup mieux grâce à cet écart au roman.

Critique Simetierre : adaptation réussie du roman noir de Stephen King

La folie dans laquelle bascule Louis, retranscrite sans difficulté par Jason Clarke, apparaît ainsi de façon plus cohérente dans l’esprit du spectateur. Alerté par un fantôme bienveillant sur le drame en train de se jouer, Louis Creed ne prête aucune attention à ces mises en garde et plonge aveuglément vers le Wendigo et la terrible malédiction. En résulte un final extrêmement cruel annoncé dès la première scène, mais qui parvient tout de même à surprendre en raison des changements malins apportés au récit.

Il ne manque à Simetierre qu’une topographie plus détaillée des lieux dans lesquels se joue l’action, ce qui était d’ailleurs le cas dans le film de Mary Lambert. En effet, si ce dernier ne parvenait pas à donner une impression de grandeur de la forêt comme dans cette nouvelle version, le spectateur se repérait et percevait sa distance par rapport à la maison. L’étonnante proximité rendait donc les bois encore plus menaçants. Quoi qu’il en soit, ce nouveau Simetierre s’impose comme un film d’horreur efficace qui, s’il ne révolutionne en rien le genre, a le mérite d’éviter le mysticisme de pacotille pour se concentrer sur la folie grandissante de ses personnages attachants et en perdition.

 

Simetierre de Kevin Kölsch et Dennis Widmyer, en salle le 10 avril 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

S’il ne révolutionne en rien le genre, « Simetierre » est un film d’horreur efficace axé sur les pertes familiales qui n’hésite pas à pousser sa noirceur jusqu’au bout.

Note spectateur : 0.35 (1 notes)