Christopher Nolan : les dessous fous du deal pour son nouveau film

Le transfert de l'année

Christopher Nolan : les dessous fous du deal pour son nouveau film

L'annonce de son départ de Warner pour les studios Universal Pictures a fait l'effet d'une bombe. Quelques détails du deal ont été dévoilés, qui donnent une idée des ambitions de Christopher Nolan pour son prochain film et en disent long sur la situation actuelle des grands studios d'Hollywood.

Christopher Nolan > Messi

Ceux qui suivent le football n'ont pas manqué l'arrivée de Messi à Paris, immense star du ballon rond qui vient de quitter le FC Barcelone pour le PSG après presque vingt ans de très bons et loyaux services. Pour les amateurs de cinéma, un événement comparable a eu lieu avec le départ de Christopher Nolan de Warner pour rejoindre les studios d'Universal. Universal Pictures, en répondant seul aux exigences du cinéaste pour son prochain film, a de fait recruté un réalisateur historique de Warner, et c'est un tremblement de terre. The Hollywood Reporter a rapporté dans un récit les conditions de négociation et les détails du deal.

Un nouveau chapitre s'ouvre

On ne verra sûrement jamais un film de Christopher Nolan sortir simultanément au cinéma et sur une plateforme de streaming et c'est un point fondamental pour le réalisateur. Embarqué dans une distribution hybride entre les salles et HBO Max, son service de streaming au succès mitigé, Warner labourait un terrain conflictuel depuis l'épisode Tenet, renforcé par les mêmes reproches et déceptions portés par Denis Villeneuve concernant la sortie simultanée de Dune.

Il est donc logique que Christopher Nolan se retrouve chez celui de l'industrie qui parmi les grands studios et dirigeants hollywoodiens propose à l'heure actuelle  l'offre de streaming stratégiquement la plus "faible". Pourtant, même si Netflix n'apparaît pas dans les négociations finales,  le géant rouge avait bien tendu des perches, et pour ceux qui étaient là, Apple a présenté des arguments forts, Sony le voulait vraiment, et Paramount n'a pas fait long feu. On ne sait pas à quel moment exact Warner a jeté l'éponge.

Universal
Universal ©Universal Pictures

On imagine bien la scène, façon 007, des négociations qui ont pris place sur la vaste propriété de Nolan dans les collines d'Hollywood. Avec son statut de réalisateur au-dessus du milliard de recettes au box-office, les enjeux financiers et d'images sont très importants, et les prétendants ont donc été éconduits jusqu'à ce que Universal réponde simplement "oui" à ses demandes.

Des demandes en forme de saut de la foi

Si le nouveau film de Christopher Nolan est annoncé comme d'un plus petit calibre que ses précédents, ses demandes étaient pour la plupart à peu près les mêmes que du temps de Warner, et elles restent très élevées. On parle ainsi d'un budget de production de 100 millions de dollars, auquel il faut ajouter 100 millions pour le marketing. Pour l'indépendance artistique, elle est non négociable puisque le réalisateur exige le contrôle créatif total.

Nolan Interstellar
Sur le tournage d'Interstellar ©Warner

Là où le deal devient intéressant, c'est que Nolan, sûr de sa force, demande aux studios de faire place nette autour de son film. Concrètement, la compagnie ne devra pas sortir d'autre film durant les trois semaines qui précèdent et les trois semaines qui suivent la sortie du sien. Enfin, il aurait demandé une diffusion au cinéma d'au moins 100 jours, des rumeurs disent même de 110 à 130.

Christopher Nolan cristallise les enjeux cinéma vs. streaming

Apple a étonné par sa présence à la table finale, mais elle y était avec son répertoire ronflant de collaborateurs comme notamment Martin Scorsese avec Killers of the Flower Moon, Scarlett Johansson, Leonardo DiCaprio, ce qui a pesé en sa faveur. Prêt aussi à offrir une sortie en salles, mais loin des conditions de Nolan, son offre n'a cependant pas suffi. La Paramount, qui a récemment changé de gouvernance et assume maintenant une stratégie pro-streaming, a vite été éliminée. Sony, qui peut se vanter d'une très belle réussite avec le dernier film de Quentin Tarantino, a été considérée jusqu'au bout.

Universal a emporté la décision en répondant simplement et positivement aux demandes du réalisateur de Tenet. Autre élément à prendre en compte, sa présidente Donna Langley entretient depuis plusieurs années une relation amicale avec Christopher Nolan, et a déjà pris par le passé quelques talents et franchises à Warner. La route est encore longue avant de pouvoir découvrir son nouveau film, et le paysage cinématographique est en pleine restructuration. Mais dans tous les cas de figure, ce passage d'un des plus grands auteurs de cinéma de sa génération d'un grand studio à un autre va au-delà de son seul futur cinématographique, il trace aussi une ligne entre les pro-salles et les pro-streaming, et il semble définitif que pour le court et le moyen terme Christopher Nolan et Universal ont bien choisi leur camp.