Quatre ans après "Alita : Battle Angel", Robert Rodriguez est de retour avec "Hypnotic". Un thriller hitchcockien rempli de twists, pour lequel nous avons rencontré le réalisateur lors du 76e Festival de Cannes, où le film était présenté en Séance de Minuit.
Hypnotic : Ben Affleck pris au piège par un puissant médium
Après le blockbuster Alita : Battle Angel, ambitieuse adaptation du manga Gunnm produite par James Cameron, Robert Rodriguez revient à un projet nettement plus modeste. Avec Hypnotic, le réalisateur de Desperado et Planète terreur s'essaie au thriller hitchcockien, dévoilant un récit rempli de twists centré sur Danny Rourke (Ben Affleck), un policier brisé par l'enlèvement de sa fille. Alors qu'il enquête sur une série de braquages importants, il découvre que l'auteur de ces crimes, un puissant médium dénommé Dellrayne (William Fichtner), pourrait être lié à cette disparition.
Robert Rodriguez s'est fait plaisir avec Hypnotic, long-métrage qui lui permet de se réapproprier certains codes du film noir après Sin City et d'intégrer également des éléments de western, autre genre qu'il chérit. Un puzzle aux multiples rebondissements que le spectateur essaie de reconstituer en même temps que le héros, pour lequel nous avons rencontré le réalisateur lors du 76e Festival de Cannes, où Hypnotic était présenté en Séance de Minuit.
Rencontre avec Robert Rodriguez
Comment est né Hypnotic ?
Robert Rodriguez : J'ai commencé à écrire le film en 2002 ! Je me suis dit que je voulais faire un film dans la veine de ceux d'Alfred Hitchcock, avec un titre en un seul mot très mystérieux, comme Psycho (Psychose, ndlr), Vertigo (Sueurs froides, ndlr) ou Spellbound (La Maison du docteur Edwardes, ndlr). Et Hypnotic m'est venu d'un coup. Ça partait d'un homme qui ne peut pas se faire arrêter par la police, qui réussit à ne pas se faire attraper. J'ai écrit beaucoup de séquences-clés à l'époque. J'ai rassemblé plein d'idées en me disant que j'y reviendrai plus tard. Et puis quinze ans sont passés ! (rires)
Un jour, je suis retombé dessus et je me suis dit que j'aimais toujours ce projet. J'aime l'idée que les cinéastes hypnotisent le public et lui font croire que ce qu'il voit est réel, en tout cas suffisamment réel pour qu'il réagisse. Et c'est ce que recherche le public, ce moyen de pouvoir s'évader. Il a évidemment conscience que ce sont des acteurs mais a envie de croire aux personnages. Il y a eu différentes versions du script mais il y a toujours eu ce sentiment qu'à un moment, on n'est plus sûr de ce que l'on voit et l'on se demande si ce que l'on a vu est bien réel.
Et puis, Alita est arrivé donc j'ai dû reporter Hypnotic. Pendant que je faisais Alita, Max Borenstein a repris le script pour s'assurer que tout fonctionne parfaitement, que le récit soit millimétré. Un thriller comme celui-ci doit être plus précis que mes précédents films qui ont souvent une part d'imaginaire, où les personnages peuvent avoir une mitraillette à la place d'une jambe ou s'envoler avec un jetpack. Ils n'ont pas besoin d'être logiques, à l'inverse d'un thriller, même si la perception du réel est biaisée dans celui-ci. Depuis 2019, je me suis consacré aux réécritures et au film.
Après Sin City, vous revenez en quelque sorte au film noir ?
Robert Rodriguez : Oui, c'est une sorte de film noir moderne. C'est une sorte d'hybride entre plusieurs genres mais oui, ça ressemble à une histoire de détective. Il y a aussi des éléments de western et de science-fiction. Je me suis beaucoup inspiré de la façon dont Alfred Hitchcock faisait ses films, de sa capacité à utiliser des trucages ingénieux, à jouer avec la caméra et le montage. Il y a évidemment des effets spéciaux et des matte painting mais il y a toujours cette notion d'artisanat chez lui que j'adore. J'adore aussi ses retournements de situation. On ne sait jamais vraiment où l'histoire va nous emmener.
Hypnotic est donc aussi un moyen pour vous de revenir à un projet plus dépouillé après une grosse machine comme Alita ?
Robert Rodriguez : Oui. J'ai toujours aimé faire des choses différentes. J'aime par exemple faire un film pour enfants puis revenir à un projet plus modeste comme Red 11, qui a seulement coûté 7000 dollars. Hypnotic est un film que nous avons tourné très rapidement. Là, je viens de terminer un nouveau Spy Kids (Spy Kids : Armageddon, ndlr) qui va sortir cette année. J'aime cette variété, le fait de pouvoir alterner entre un projet bourré d'effets spéciaux et un autre où il y en aura beaucoup moins. J'aime ce changement, ça permet d'en apprendre beaucoup.
Comment votre choix s'est porté sur Ben Affleck pour jouer Danny ?
Robert Rodriguez : C'est la première personne à qui j'ai pensé. Il a ce côté très paternel. À chaque fois qu'on se parle, on parle de nos enfants. C'est aussi une tête d'affiche très charismatique, qui me fait penser à Cary Grant ou James Stewart, avec lesquels Alfred Hitchcock a travaillé. Je voulais quelqu'un capable de porter le film et il est génial pour ça.
Comment s'est passé le tournage ?
Robert Rodriguez : Ça été compliqué, parce que le Covid nous a mis à l'arrêt. Nous avons tourné le film en seulement 34 jours, qui ressemblaient d'ailleurs plus à 24 jours parce que certaines journées étaient raccourcies, nous ne pouvions pas tourner plus de dix heures. Certains jours, nous devions faire plusieurs déplacements d'un lieu de tournage à un autre. C'est l'emploi du temps le plus serré que j'ai eu depuis El Mariachi. C'était génial d'être avec Ben parce qu'il a lui aussi participé à des productions indépendantes dans les années 1990, et on a pris beaucoup de plaisir à revenir à une production similaire, extrêmement rapide. C'était un vrai challenge mais d'un côté, ça a rendu le film meilleur, avec ce côté artisanal. (rires)
Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Robert Rodriguez : Je suis en train de terminer ce nouveau Spy Kids, vous vous rendez compte ?! C'est un reboot de tout l'univers. J'ai travaillé avec mes enfants dessus, c'était génial. C'était drôle parce qu'ils ont grandi avec les premiers films de la saga et ils avaient une checklist de tous les éléments qu'ils souhaitaient absolument intégrer dans le nouveau.
Êtes-vous confiant pour une éventuelle suite d'Alita ?
Robert Rodriguez : On en parle souvent et on espère pouvoir la faire. J'adorerais. Il y a eu des complications quand la Fox a été rachetée par Disney et qu'ils ont mis en pause les films Fox pendant un moment. Mais ça a repris ! Donc il y a peut-être une chance qu'on puisse la faire.
Hypnotic est à découvrir au cinéma dès le 23 août 2023.